“J’ai tendu des cordes de clocher à clocher ; des guirlandes de fenêtre à fenêtre…” (Arthur Rimbaud, Les Illuminations)
Capté par les micros superlatifs d’Alessandra Galleron, un peu moins intrusifs que ceux d’Alpha (aux captations au demeurant très riches, qui n’ignoraient cependant rien des respirations de l’artiste ou de ses doigts glissant sur la touche au risque de troubler la ligne mélodique), tout en restituant les somptueux coloris instrumentaux avec chaleur et intimité, cette Nascita del Violoncello se veut un voyage initiatique, rêveur et poétique…
Voyage sur un archet
Les pièces de viole d’Antoine Forqueray publiées, remaniées et complétées par son fils Jean-Baptiste Antoine sont bien connues des mélomanes. C’est d’abord un bel objet que ce luxueux disque sous fourreau doté d’un livret riche en extraits de traités d’époque…
“Atys, ne feignez plus, je sais votre secret” (Idas, Acte I, scène 2)
Noël 2011. Le 13 mai dernier, nous subissions le choc dramatique et esthétique de la recréation du mythique Atys de Christie / Villégier à l’Opéra Comique, et nous ne reviendrons pas sur les qualités exceptionnelles de cette production, que nous avons abondamment décrites dans un compte-rendu enthousiaste auquel nous vous renvoyons.
La plume, pierre noire et sanguine de Mariette
C’est une exposition à la fois intime et discrète que le Louvre convie le visiteur qui ne s’est pas égaré dans le dédale du palais-musée avant d’arriver dans ces petites pièces du département des Arts Graphiques, où quelques curieux et amateurs s’attardent autour de quelques beaux dessins à l’encre brune et au lavis, à la mine de plomb, pierre noire ou sanguine. Ces quelques dessins, souvent magnifiquement encadrés, superbement montés (le fameux montage dit Mariette dont nous vous reparlerons plus loin) ne constituent qu’une infime partie de la collection initiale de Pierre Jean Mariette (1694-1774)…
Le chant de la terre
Ce chant naît de la contemplation d’un monde surexposé, irradié d’une lumière paillée renonçant à la douceur mordorée du soir. Il laisse paraître son émerveillement et sa déception au sein du crin des archets, du laiton des pavillons des cuivres, de la douceur du palais ou de l’anche des hautbois. Alors qu’en dehors du confort velouté du canapé bourgeois et de l’installation audiophile, ou à l’extérieur des rideaux cramoisis damassés des opulentes salles de concert, le monde s’égare, que les rebelles luttent, que les gouvernements s’interrogent sur leur pérennité, que les égos s’entrechoquent pour les candidatures, nous voici, intangibles amateurs du beau et de l’émotion, confinés dans la pétillance de notre bulle de champagne et de ses plaisirs.
Entretien avec Jérôme Correas, directeur musical des Paladins
Entretien avec Jérôme Correas, directeur musical des Paladins, autour du L’Egisto de Marco Marazzoli & Virgilio Mazzocchi. Parmi nos bonnes résolutions pour 2012 figure celle d’exhumer les interviews inédites. Il ne s’agit pas ici de se livrer à des mémoires d’outre-tombe, en ressuscitant la parole d’artistes disparus, à la manière de cet entretien de Pasolini, donné 3 jours avant sa mort, et que son traducteur suédois a retrouvé et fait publier dans l’Espresso en décembre dernier…
Entretien avec Váklav Luks, claveciniste, directeur du Collegium 1704
Entretien avec Váklav Luks, claveciniste, corniste & directeur musical du Collegium 1704, à propos de l’oeuvre de Zelenka et du Messie de Haendel. L’interview n’est prévue que dans quarante-cinq minutes, un court entretien d’une demi-heure environ. Dans le hall de l’hôtel, nous croisons soudain quelqu’un. Visage souriant, petit air d’adolescent espiègle, voici Váklav Luks. Nos bagages encore à la main, nous voici lancés dans une conversation à bâtons rompus, amicale et passionné, assis sur la fraîche terrasse, jusqu’à ce que l’attaché de presse finisse par nous séparer au bout d’une bonne heure, pour nous rappeler nos emplois du temps respectifs…
Entretien avec Benjamin Lazar, comédien et metteur en scène, à propos du spectacle Visions d’après Francisco de Quevedo
Entretien avec Benjamin Lazar, comédien et metteur en scène à propos du spectacle Visions d’après Francisco de Quevedo. Il est l’heure de déjeuner, et nous privons Benjamin Lazar de quelques minutes précieuses de sustentation… Souriant, un brin fatigué, toujours élégant, le voici qui s’installe sur ce vieux fauteuil cabriolet de style Louis XV, au velours rouge râpé, pour cet échange en français contemporain.
Entretien avec Jean-Paul Combet, directeur artistique du festival d’Arques-la-Bataille
Entretien avec Jean-Paul Combet, directeur artistique du festival d’Arques-la-Bataille. Jean-Paul Combet. Le nom semblera familier à certains, non pour l’Académie Bach et le festival d’Arques-la-Bataille, mais pour une aventure discographique, celle du label Alpha. Pourtant, près d’un jubé Renaissance miraculeusement préservé en dépit des préconisation du Concile de Trente, niché au pied d’un orgueilleux castel plusieurs fois assiégé autour duquel Henri IV défit les Ligueurs, meurtri par un Groupe Scolaire plus proche du Blockhaus que du Bauhaus…
D’une grandiose volupté
Juillet-Août 2011. Maître de Chapelle de la Cathédrale de Ségovie puis du renommé Monastère royal de La Encarnaciòn à Madrid, Josep Mir i Llusà fut un compositeur prolifique, sous la plume duquel fusionnent harmonieusement l’esprit galant du baroque tardif, son expressivité lorgnant vers l’opéra dotée d’une aisance mélodique attrayante, avec un substrat polyphonique et un choix des timbres instrumentaux plus traditionnels.
Lettres de Grignan
Tandis que notre rédaction, assoupie, se disperse par monts et par vaux en vue d’endurer les affres d’un repos bien mérité, que certains pratiquent une cure de silence cembalistique, que d’autres se livrent derrière des portes closes et dans de lointaines contrées à l’écoute de compositeurs maudits post-1759, que certains, enfin, dédaignent majestueusement l’invitations de festivals pour l’appel d’une chaise-longue ou d’un hamac (et nous serions le premier à ne point leur jeter la pierre), la Muse, frappée d’une pilosité palmaire que nos lecteurs vilipenderont à juste titre, prend ses quartiers d’été. Aussi, pour cet éditorial qui sent bon la lavande et le soleil, plutôt que de dresser comme à l’accoutumée une litanie suggestive de friandises festivalières baroques, nous exhumerons quelques écrits inédits et à l’attribution controversée, qui feront le lien avec notre Tribune vous invitant à découvrir les charmes de Grignan, en vantant la sévère antiquité de sa collégiale et la théâtralité des façades Renaissance de son castel.
Kreuzige, kreuzige !
Avril – mai 2011. Passion entière et passionnée, empreinte dès le départ d’un sentiment de malaise et d’instabilité, d’une soif de sang malsaine et d’une volonté destructrice. Telle est la vision, très noire et extrêmement tendue que propose Philippe Pierlot de cette œuvre déjà plus ramassée et descriptive que la Saint-Matthieu et que le chef parcourt avec un souffle puissant et démonstratif avec une théâtralité vigoureuse qui aurait sans doute effrayé les prudes autorités de Leipzig…
Travaux en cours
Chers Amis et lecteurs, Vous êtes de plus en plus nombreux sur ces pages, et nous dépassons désormais les 45 000 visiteurs mensuels. Cette volumétrie, largement supérieure à la force de projection actuelle de notre glorieuse armée au Moyen-Orient, de même que les vœux formulés par les lecteurs fidèles nous conduisent à mettre en œuvre des réformes structurantes, tournées vers l’avenir sans renier le passé dont il est l’héritier. Car en effet, pourquoi une revue devrait-elle se limiter à la musique et aux arts baroques ? N’est-ce pas faire preuve de sectarisme austère, d’œillères d’acier, de confinement transi voire d’une malsaine nostalgie ?
Entretien avec Jérôme de la Gorce, directeur de recherche au CNRS, et Pierre Jugie, conservateur en chef à la section ancienne des Archives Nationales
Entretien avec Jérôme de la Gorce, directeur de recherche au CNRS, et Pierre Jugie, conservateur en chef à la section ancienne des Archives Nationales, commissaires de l’exposition Dans l’Atelier des Menus-Plaisirs du Roi…
Armide de Lully ou le sublime crépuscule du Florentin
Crépuscule peut-être, mais flamboyant automne, brillant déclin, sublime chant du cygne. Armide fut la dernière tragédie lyrique de Lully, et sa dernière collaboration avec son complice de longue date, la poète Philippe Quinault. Il y aura bien la pastorale héroïque Achille & Polyxène sur les médiocres vers de Jean Galbert de Campistron en 1687…
“Je suis perdu des songes qui me viennent” (Jacques Amyot)
Janvier-Février 2011. Certains – et cela inclut d’éminents membres de notre rédaction -, certains trouveront que cette Muse du Mois se révèle trop convenue et trop prévisible, tout comme le dernier récital de Philippe Jaroussky. Que la formule du récital est trop fragmentée, sorte de best-of ou de mise en bouche à laquelle manque la rigueur d’une belle intégrale d’un opéra de Caldara qu’on attend encore…
L’Opéra au cinoche ?
Tout comme le Palais alexandrin assiégé par les troupes de Ptolémée, les guichets de l’Opéra Garnier n’ont pas résisté au déferlement du public. Il ne reste plus rien des légions triomphantes balayées par le souffle du vent alors que s’élève une âcre odeur d’incendie au-dessus de l’Opéra Garnier. Et, afin de n’être pas reconnu, nous abandonnons notre manteau écarlate de général dans les flots, en conservant précieusement notre sésame vers l’ovale doré.
“L’ayant fait passer dans plusieurs cours, il a passé icy en revenant de Londres, & il a eu l’honneur de jouer du violon devant le Roy, & devant toute la Cour…” (Le Mercure Galant, décembre 1682)
Gunar Letzbor est l’un de ces musiciens à l’exigence musicale et intellectuelle intransigeante, Chevalier de l’archet, Défenseur du violon seul et orphelin, le Paladin errant poursuit sa quête sinueuse des Sonates et Partitas de Bach, épreuve ultime selon lui, après avoir passé par les rudes et mystiques des Sonates du Rosaire et l’Artificiosus Concentus pro Camera de Vilsmayrs (tous deux chez Arcana).