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La jeune fille et le Cupidon grassouillet (Vermeer, exposition à la Gemäldegalerie de Dresde, septembre 2021 – janvier 2022)

Un nouveau Vermeer ?

Johannes Vermeer (1632-1675)
Jeune femme lisant une lettre près d’une fenêtre ouverte, huile sur toile – 83 x 64,5 cm, Dresde, Gemäldegalerie Alte Meister© Gemäldegalerie Alte Meister, Staatliche Kunstsammlungen Dresden, Foto: Wolfgang Kreische (cliché pris en cours de restauration avec le Cupidon en partie dévoilé)

La Gemäldegalerie Alte Meister de Dresde a annoncé après 2 décalages, qu’elle ouvrira sa très attendue exposition sur Vermeer du 10 septembre 2021 au 12 janvier 2022. Outre 10 Vermeer, une quarantaine de tableaux de contemporains seront présentés dont de grands maîtres : Pieter de Hooch, Frans van Mieris, Gerard Ter Borch, Gabriel Metsu, Gerard Dou, Emanuel de Witte et Jan Steen. Ce sera notamment l’occasion d’évoquer le sujet de la restauration de la Jeune femme lisant une lettre près d’une fenêtre ouverte, chef d’œuvre du peintre des années 1657-59 et dont une Brève de la Tribune de l’Art s’est faite récemment l’écho.

Or le Musée a pris l’audacieuse – et controversée – décision de donner une nouvelle jeunesse à cette œuvre.  Depuis la fin des années 70, les spectrographies infrarouge avaient révélé en haut à droite, derrière le mur nu, un immense tableau repeint à une date ancienne. Le repeint recouvrait une figure énorme de Cupidon, de face, presque provocative autant qu’allégorique, disproportionnée par rapport à la silhouette décentrée et verticale de la jeune fille à la lettre. De nouvelles analyses menées en 2017 concluent que ce repeint bien qu’ancien date de “plusieurs décennies” après la composition, et probablement même après la mort du Maître. Une commission internationale d’expert a alors décidé en faveur du retrait du repeint, et de l’allègement des vernis, et surtout la mise à jour du Cupidon et le retrait du surpeint pictural.

Avouons que l’on est un peu décontenancé du résultat et de l’équilibre chamboulé de l’œuvre. Si le surpeint n’est pas de la main de Vermeer (et il faudrait en être certain), la décision de restauration du putto géant est fondée historiquement. Elle n’en est pas moins troublante d’un point de vue esthétique, et l’intrusion de ce lourd, grasseyant et remuant Cupidon rend la lecture de la saynète plus directe et renforce les hypothèses du contenu probable de la lettre que tient la jeune fille. Ajoutons enfin que ce Cupidon est sans nul doute vermeerien, et qu’on le retrouve, quasi identique, dans La Dame à l’épinette, conservé à la National Gallery de Londres. [M.B.]

En savoir plus :

  • https://gemaeldegalerie.skd.museum/en/research/vermeer
Étiquettes : , Dernière modification: 30 août 2021
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