Première en milieu tempéré
Histoire personnelle ou oreilles sensibles, manque d’ambition ou gros doigts boudinés : les excuses ne manquent pas pour expliquer chez la plupart des gens cette incapacité à parcourir gracieusement les touches d’un clavecin de caractère. Pour bon nombre d’entre nous, les doigts ne savent se promener qu’au fil des bacs de disquaires, sautant avec souplesse de tranche en tranche.
“Je cherche l’or du temps” (André Breton)
Nous avions passé sous silence le premier volume de ce diptyque, paru en 2010. Cette discrétion coupable est désormais réparée avec les louanges relatives à ce second volet, d’autant plus que les concertos baroques pour basson ne sont guère légion si l’on exclut Boismortier.
Curarum Levamen
Une pochette au graphique minimaliste (un bel homme sur fond rouge, cela ressort très bien), la promesse de sonates écrites pour clavecin exécutée sur un piano moderne japonais… voilà de quoi intriguer le ou la mélomane qui furète dans les bacs à la recherche de disques baroques classiques, s’il n’est pas déjà un inconditionnel du pianiste…
Pierre Certon, évidemment.
Pierre Certon, évidemment. Le Pierre Certon qui envahit nos discothèques et inonde insolemment les programmes de concerts. Celui dont les oeuvres vocales ont fait s’époumonner toutes les générations de chanteurs depuis le seizième siècle.
Un style fantastique
Certains comme moi se souviennent dans un lointain manuel d’histoire-géographie de lycée avoir aperçu une miniature médiévale où deux hommes, qu’on imagine aisément amis ou du moins complices, jouent aux échecs. L’un est maure, l’autre chrétien.
Il Germanico
Sorti des hiératiques manuscrits des Annales, l’éloge funèbre de Germanicus, comme bien des rejetons de sa race périt en termes sublimes dans les sables de l’Histoire aux limbes de la légende. Germanicus, victime comme il est de ses propres statues, ne retrouve son humanité que dans les arts.
Un style fantastique
Que savons-nous de Pandolfi Mealli ? Rien, presque rien. Des poussières de notices biographiques virevoltent ça et là rappelant que le compositeur fut engagé comme violoniste à la cour des Habsbourg à Innsbruck dans les années 1660. Jusqu’à ce que récemment les travaux de Fabrizio Longo jettent quelques lumières sur un passé vénitien, et un meurtre en 1675 suite à un violent différent entre le violoniste et un castrat romain que Pandolfi transperça prestement de son épée, conduisant le musicien à chercher refuge du côté de la Chapelle Royale de Madrid…
Portrait d’un grand homme bon : “Un grand homme tellement bon qu’il en devient méchant, car ses ouvrages sont extrêmement difficiles.” (Francesco Maria Zambeccari)
Nous voici exactement un an après le 350ème anniversaire de la naissance d’Alessandro Scarlatti, qui passa malheureusement sous un silence triste et irrespectueux pour la mémoire de ce grand compositeur. Si on connait la destinée de son fils Domenico par ses 555 exercices sous forme de sonates pour le clavecin que des mains pianistiques ont tellement déformées, le père – qui fut un des compositeurs les plus respectés et aimés de son temps – n’a de reconnaissance que les fières peintures muettes et les salles de certains conservatoires italiens.
“J’ai tendu des cordes de clocher à clocher ; des guirlandes de fenêtre à fenêtre…” (Arthur Rimbaud, Les Illuminations)
Capté par les micros superlatifs d’Alessandra Galleron, un peu moins intrusifs que ceux d’Alpha (aux captations au demeurant très riches, qui n’ignoraient cependant rien des respirations de l’artiste ou de ses doigts glissant sur la touche au risque de troubler la ligne mélodique), tout en restituant les somptueux coloris instrumentaux avec chaleur et intimité, cette Nascita del Violoncello se veut un voyage initiatique, rêveur et poétique…
Une politique d’Ouverture
Avant-dernier voyage de ce périple entrepris dès 2001 par Café Zimmermann sur le chemin des œuvres pour orchestre de Bach – soigneusement démantelées afin de ne point avoir les Brandebourgeois ou les concertos pour clavecin regroupés en un seul volume – ce cinquième opus laisse entrevoir peu de surprises par rapport à l’excellence de ses prédécesseurs, et c’est tant mieux !
Voyage sur un archet
Les pièces de viole d’Antoine Forqueray publiées, remaniées et complétées par son fils Jean-Baptiste Antoine sont bien connues des mélomanes. C’est d’abord un bel objet que ce luxueux disque sous fourreau doté d’un livret riche en extraits de traités d’époque…
Petits motets
En dépit de ses ascendances vénitiennes, Fiocco naquit à Bruxelles en 1703 et connut une carrière fructueuse. Membre de la chapelle ducale de Bruxelles (dirigée par son demi-frère) dès 1726, vite promu sous-maître de cette institution en 1729 ou 30, nommé maître de chapelle de la cathédrale d’Anvers en 1731…
Empfisamkeit
Empfisamkeit. Sensibilité. C’est le seul et unique mot qui vient à l’esprit à l’écoute de cet enregistrement galant et raffiné, d’un préclassicisme racé, terriblement évocateur d’un art de vie sautillant du boudoir à l’alcôve. Avouons-le, lors de la première écoute, nous avons été charmés par l’élégance mélodique, la fluidité lumineuse…
“O Wunder !”
Voici un enregistrement comme nous les aimons, un enregistrement téméraire sur le plan économique, accompli et engagé sur le plan artistique, refusant toute facilité tant dans le choix de ces cantates sacrées que des notes de programme austères et denses. Son objet ? La redécouverte de l’école de Halle, berceau de la cantate…
Profond Carmin (Lully, Armide, d’Oustrac, Les Arts Florissants, Christie – DVD FraMusica)
Les dernières pages du monumental Ulysse de James Joyce s’achèvent par l’éternel féminin, le monologue extraordinaire de Molly Bloom. Si la femme concupiscente du peu reluisant Leopold Bloom n’a rien d’une enchanteresse mythique, Joyce, en quelques pages, nous fait pénétrer au coeur même du subconscient…
L’Europe haendélienne, de la Sicile à la Scandinavie
Dernier oratorio composé par le Cher Saxon, Jephta incorpore des réminiscences de ses œuvres antérieures mais aussi des matériaux issus des six Messes du compositeur bohémien Franz Habermann (1706-1783), publiées en 1747. Pour adapter cet épisode de l’Ancien Testament, Haendel s’appuya sur le révérend Morell, qui intégra la tradition littéraire antérieure…
“Atys, ne feignez plus, je sais votre secret” (Idas, Acte I, scène 2)
Noël 2011. Le 13 mai dernier, nous subissions le choc dramatique et esthétique de la recréation du mythique Atys de Christie / Villégier à l’Opéra Comique, et nous ne reviendrons pas sur les qualités exceptionnelles de cette production, que nous avons abondamment décrites dans un compte-rendu enthousiaste auquel nous vous renvoyons.
L’or du temps (Vivaldi, Concertos pour basson, Azzolini – Naïve)
Si cet enregistrement se démarque nettement d’une grande partie de la production vivaldienne, ce n’est guère par son écriture, poétique, énergique, d’un optimisme virtuose et d’une rêverie élégiaque, éclairs de doubles croches, arpèges, cantilène lyrique… le cru vivaldien des années 1720-30 possède ses fondamentaux. Mais le basson de Sergio Azzolini est là, transcendant le matériau, orchestre à lui seul, incroyable conteur.
D’une grandiose volupté
Juillet-Août 2011. Maître de Chapelle de la Cathédrale de Ségovie puis du renommé Monastère royal de La Encarnaciòn à Madrid, Josep Mir i Llusà fut un compositeur prolifique, sous la plume duquel fusionnent harmonieusement l’esprit galant du baroque tardif, son expressivité lorgnant vers l’opéra dotée d’une aisance mélodique attrayante, avec un substrat polyphonique et un choix des timbres instrumentaux plus traditionnels.
