Friedrich Wilhelm ZACHOW (1663-1712)
“Ich bin die Auferstehung und das Leben” (cantate de Pâques)
“Bei Gott ist mein Heil, meine Ehre”
Georg Friedrich HAENDEL ? (1685-1750)
“Ach Herr, mich armen Sünder”
“Triumph, ihr Christen seid erfreut”
Gudrun Sidonie Otto, soprano
Margaret Hunter, soprano
Christoph Dittmar, alto
Mirko Ludwig, tenor
Guillaume Olry, basse
Cantus Thuringia
Capella Thuringia
Direction Bernhard Klapprott
62’54, CPO, distribution Codaex, 2011
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Voici un enregistrement comme nous les aimons, un enregistrement téméraire sur le plan économique, accompli et engagé sur le plan artistique, refusant toute facilité tant dans le choix de ces cantates sacrées que des notes de programme austères et denses. Son objet ? La redécouverte de l’école de Halle, berceau de la cantate malgré les oppositions de ceux qui jugeaient inconvenant l’irruption de la poésie sacrée moderne dans un cadre liturgique. Zachow y officia pendant 28 ans à l’église Notre-Dame (Liebfrauenkirche) et acquit une renommée s’étendant à toute l’Allemagne. Bach tenta d’ailleurs de postuler en vain à se succession en 1712.
La cantate “Ich bin die Aferstehung und das Leben” s’articule de manière quasi symétrique avec une brève sonate introductive, 2 chorals encadrant 4 airs d’une écriture lumineuse et relativement moderne, souvent réminiscente du style de Schelle. On goûte l’inventivité mélodique et contrapuntique du maître de Halle, cet équilibre lumineux et virtuose, les thèmes complexes et ornés qui se retrouvent aussi dans le « Bei Gott ist mein heil, meine Ehre ». Le chœur introductif de “Ich bin die Aferstehung und das Leben” donne le ton avec ses nombreuses entrées en imitation adoucies par les arabesques d’un violon obligé. On regrettera l’usage d’une voix par partie pour ce chœur qui aurait gagné en puissance évocatrice avec l’usage de masses chorales plus étoffées, mais la précision des attaques, la transparence ductile des solistes emporte l’adhésion. De même, la Capella Thuringia se montre tout à son aise dans ce répertoire, qu’il s’agisse de la lisibilité du continuo, des couleurs pastels des instruments obligés (notamment les bois), ou de la tranquille assurance des solistes, d’une belle homogénéité, qui livrent de courts airs apaisés et confiants, déclamatoires et tendres. Si Margaret Hunter possède un soprano un peu tendu dans les aigus (« Gott lob »), on distinguera la basse stable et grainée de Guillaume Olry, le soin apporté à la déclamation par Mirko Ludwig, très égal sur la tessiture, ou encore la sincérité appliquée de Christoph Dittmar à la projection ciselée (« Meine Hoffnung steht auf Gott »).
Les deux dernières œuvres ont été attribuées au jeune Haendel qui fut l’élève de Zachow, et conserva tout au long de sa vie un grand respect pour son maître au point qu’il envoya des subsides à sa veuve. Bien que cette paternité soit toujours sujette à débat, il est tout à fait flagrant que ces cantates proviennent du même cercle, tant la proximité stylistique est audible, qu’il s’agisse des combinaisons instrumentales ou des inflexions mélodiques. Le « Ach Herr, mich armen Sünder » dévoile un sublime chœur « Heil du mich lieber Herre » d’un désespoir lancinant et amer qui s’éclaire lentement avec l’air évanescent qui suit « herr, tröst’ mir mein Gemute », tandis que le « Triumph, ihr Christen seid erfreut » se révèle assez frustrant de par l’extrême concision de ses mouvements, d’autant plus qu’on y trouve une écriture brillante, plus extravertie, dont un « Weiber spart nur euren Mut » avec un violon très pachelbelien.
Bernhard Klapprott dirige avec chaleur et sensibilité l’ensemble de ces cantates, dénotant une humanité souriante, établissant un climat de ferveur intimiste. On regrette parfois que les contrastes ne soient pas plus marqués, ou que les attaques des chœurs soient volontairement arrondies, mais il faut avant tout saluer la redécouverte sensible et convaincante de ce pan de répertoire.
Sébastien Holzbauer
Technique : captation chaleureuse aux contours un peu imprécis