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Chronique Festival

 

Monteverdi, L’ Incoronazione Di Poppea,

La Venexiana, direction Claudio Cavina

 

 

© Muse Baroque, 2010

 

Samedi 28 août 2010

Claudio Monteverdi

 

L'Incoronazione di Poppea (Le Couronnement de Poppée)

Opéra en un Prologue et 3 actes sur un livret de Francesco Businello

 

Ottone : Claudio Cavina

Poppée : Valentina Coladonato

Néron : Roberta Mameli

Arnalta : Ian Honayman

Octavie : Xania Meijer

Nourrice d'Octavie : Makoto Sakurada

Sénèque : Raffaele Costantini

Drusilla : Francesca Cassinari

Valetto : Alena Dantcheva

Damoiselle : Marina Bartoli

Lucain : Poalo Antognetti

La Venexiana

Direction Claudio Cavina

28 août 2010, Eglise Saint Etienne de la Cité, Périgueux.

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"Felice cor meo festegiammi in seno" ("Mon cœur heureux jubile dans ma poitrine - Drusilla, III, 10)

C’était un pari risqué de David Theodoridès que de proposer sans livret ni surtitres près de 3h d’opéra italien en version de concert, et nous ne parlons pas d’un bon vieux Haendel avec des airs da capo bien reconnaissables mais du dernier opus de la trilogie opératique montéverdienne avec son intrigue foisonnante, ses rôles travestis et ses déguisements.

Épargnant pour une fois nos lecteurs habitués à nos ratiocinations musicologiques, nous ne nous attarderons que peu sur la question de la paternité de telle ou telle section, ni sur les divergences entre les manuscrits de Naples et Venise qui permettent à chaque interprétation d’être une véritable recomposition du matériau musical. Au passage, si la coupure de certaines scènes dramatiquement un peu plates telles le travestissement d’Ottone en Drusilla est tout à fait compréhensible, on regrettera tout de même l’ablation de la majestueuse sinfonia précédant la cérémonie du couronnement. Claudio Cavina a volontairement paré celle-ci d’une aura intimiste, conforme à la vision qui vient de paraître au disque chez Glossa dans un luxueux livre-disque.

Il faut avouer que l’orchestre comme les chanteurs ont gagné en fluidité et en musicalité au long de la soirée, après un premier acte un peu sec. La réussite de cette lecture équilibrée et subtile réside dans un plateau vocal très homogène, d’où se distingue nettement le trio Poppée / Néron / Octavie. 

Roberta Mameli campe un Néron d'une morgue autoritaire et se vautrant avec une volupté sauvage dans les entrelacs malsains du personnage. Les récitatifs saccadés, les changements de métrique constants, les attaques excessives plus que brutales renvoient à un personnage instable, en quête de pouvoir, un être immature, Louis XIII rêvant d'abattre son Concini. Ce Néron, quoiqu'un brin terne dans la scène d'interrogatoire de Drusilla, explose dans les duos, qu'il s'agisse de la dispute avec Sénèque quant au devenir d'Octavie ou de l'excitation quasi sexuelle du duo avec Lucain vantant les charmes de la courtisane.

L'objet de la folie – ou du moins l'un des objets- échoit à Valentina Coladonato. Là encore, et en dépit des limites inhérentes à une exécution de concert, la soprano dévoile une voix de tragédienne et de femme fatale. Séductrice au sang-froid, calculatrice et intrigante, avide de pouvoir jusqu'à l'ivresse, V. Coladonato use de son timbre tirant sur le mezzo cuivré pour ferrer un empereur manipulable dès sa première étreinte du "Signor, deh, non partire". Le "Come dolci, come suave" incandescent avec de remarquables sons tenus, le chant lyrique et maîtrisé parachèvent le portrait complexe et effrayant de la courtisane ambitieuse et menaçante.

La surprise – en termes de caractérisation - vient de l'Octavie de Xenia Meijer. On n'était pas accoutumé jusqu'ici à une monarque déchue victimisée, dont même la tentative d'assassinat de Poppée était à mettre au compte d'un vertueux désespoir. Cette impératrice-ci est d'une tout autre trempe qui la hausse au rang de rivale de Poppée. Ainsi, son entretien avec Othon –ce dernier interprété avec sensibilité et discrétion par Cavina lui-même - révèle une Octavie sanguine et nerveuse, maîtrisant le chanté-parlé lors de ce qu'on pourra familièrement qualifier de "redoutable engueulade". Son monologue d'adieu voit l'ex-impératrice hébétée et trahie, jouet d'un sort qu'elle espérait si différent de l'exil. 

Musée gallo-romain de Vesunna, Périgueux © Muse Baroque, 2010

 

L'espace manque sur ces colonnes (corinthiennes) pour détailler le reste du plateau, homogène et complice. On citera le timbre fruité et charmeur de la Demoiselle de Marina Bartoli, le cabotinage excentrique de Ian Honeyman (qui n'hésite pas à passer en pyjama le balai au beau milieu des spectateurs), le Sénèque imposant mais appliqué de Raffaele Costantini.

Claudio Cavina a choisi de respecter la sobriété des effectifs des théâtres vénitiens de l'époque, tel Saint Jérôme résistant à la tentation des cornets, flûtes et autres sacqueboutes. Sa direction, dramatique et fluide, s'est peu à peu affirmée au cours du concert, et la qualité du continuo de La Venexiana, notamment des cordes pincées –théorbes, harpe-, est à souligner dans la structuration et la lisibilité d'une intrigue plus que byzantine. On regrettera toutefois une trop grande retenue au niveau de l'ornementation, même pour les voix de dessus, et des clavecins trop insistants lors du "Pur ti miro" final. Mais ces quelques réserves demeurent des péchés véniels au regard de cette lecture vigoureuse et puissante qui bénéficie d'un plateau vocal d'une confondante aisance  dans le parlar cantando.

Pour prolonger cette soirée, les mélomanes invétérés ou somnambules compulsifs ont pu trouver refuge jusqu'à une heure trente du matin auprès de l'ensemble Una Stella qui a réinvesti des œuvres italiennes et espagnoles de José Marin à De Falla avec originalité, porté par l'enthousiasme du fier soprano de Blandine Staskiewicz.

Viet-Linh Nguyen

 

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Vers les autres chroniques de concerts

 

 

 

 

 

Festival Sinfonia en Périgord (24 - 29 août 2010, Périgueux et les alentours)

27 août : Jean-Sébastien Bach, Messe en Si mineur, Collegium Vocale 1704, dir. Václav Luks

28 août : Jean-Philippe Rameau, Suites de clavecin, Céline Frisch

29 août : Jean Sébastien Bach, Sonates pour Viole de Gambe et Clavecin obligé, Emmanuelle Guigues, Bruno Procopio

29 août : Giovani Battista Pergolesi, Cantate da camera, Ensemble Rosasolis, Magali Léger

"Si être signifie quelque chose, ce pourrait être chercher" : Entretien avec David Theodoridès, directeur du Festival Sinfonia en Périgord

 

Le site officiel du Festival : www.sinfonia-en-perigord.com (programme, réservations...)

 

 

 

 

 

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