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mise à jour 6 janvier 2014
| Chronique Festival Pergolesi, Leo, Ferrandini Sabina Puertolas, Vivica Genaux Les Talens Lyriques, dir. Christophe Rousset
Christophe Rousset - © Éric Larrayadieu Leonardo Leo, Salve Regina Battista Ferrandini (anciennement attribué à Haendel) Il Pianto di Maria Giovanni Battista Pergolesi, Stabat Mater
Sabina Puertolas (soprano) Vivica Genaux (mezzo-soprano) Les Talens Lyriques, dir. Christophe Rousset
Basilique de Saint-Denis, 23 juin 2009 dans le cadre du Festival de Saint-Denis Hymne à la Vierge C'était une soirée très attendue, qui n'avait rien à envier à celles du stade voisin. Une soirée où le public malheureux qui n'avait pu assister au concert avec les happy few de la Basilique se consolait devant la façade gothique, devant laquelle s'alignait des transats et un écran géant. Une soirée que les lecteurs pourront encore revivre, en streaming (dieu que ces anglicisme sentent bon l'échafaud de l'Académie!) sur le site officiel du Festival. Une soirée surprenante dédiée à la Protectrice de la France, et où la grâce vint de la pièce et de l'artiste d'où on l'attendait moins : un Salve Regina classicisant de Leo, avec une soprano peu connue de nos autres baroqueux. Mais commençons donc au commencement, c'est-à-dire... le coussinet. L'heure du début de la représentation approchant, le public se pressait vers les petites chaises de l'église, qui pour l'occasion s'étaient vues ornées d'un carreau bleu au nom du festival afin de garantir le précieux confort des auditeurs. Quelques murmures. Et puis, dans cette acoustique un peu flottante, où les graves bourdonnent, s'élève une voix aux aigus transparents, au vibrato bien maîtrisé quoique sous la contrainte, dotée d'un phrasé généreux, ample, d'une éloquente noblesse. Le Salve Regina de Leo, à l'écriture parfois acrobatique, ne démonte pas l'ardeur naturelle de la soprano Sabina Puertolas, notamment dans un impressionnant "Ad te clamavus" où l'on aurait cependant goûté des Talens Lyriques plus fermes dans leur attaques, suivi d'un "Ad te susperamus" très mélodique avec des cordes en suspension. Le "Eia ergo" plus théâtral et vain débouche enfin sur un "Et Jesum" traité à la manière d'un accompagnato ouvrant l'invocation "O Clemens" finale d'une tendresse souriante et paisible. La seconde partie du triptyque marial de ce programme était constituée par Il Pianto di Maria, récemment à l'honneur chez Il Giardino Armonico avec Bernarda Fink (Decca). Cette cantate pour mezzo solo est ici encore attribuée à Haendel sur la plaquette générale, et à Haendel / Ferrandini sur la feuille de distribution. Nous n'entrerons pas dans les débats musicologiques récents visant à redonner à Battista Ferrandini la paternité de cette œuvre poignante et inspirée, remarquable pour sa célèbre cavatine "Se d'un Dio". Vivica Genaux apporte à la Vierge sa fougue usuelle, campant le portrait d'une mère de Dieu plus furieuse qu'éplorée, pleine de feu et de colère, bien loin des représentations picturales adoucies dont nous avions l'habitude. Le timbre est sombre et stable, les articulations d'une belle fluidité, les récitatifs très déclamatoires. Toutefois, la mezzo a semblé manqué de puissance dans sa projection, et certaines notes s'évanouissent bien vite : la première intervention du "Se d'un Dio" pâtit ainsi d'une sorte de fragmentation de la mélodie qu'on ne retrouve heureusement pas par la suite dans sa reprise. Par rapport aux Italiens, la vision de Christophe Rousset s'avère plus équilibrée, l'orchestre plus élégant mais moins rythmiquement marqué. L'air "Sventuri miei sosperi" en est une excellente illustration, avec Il Giardino Armonico d'une brusquerie caravagesque contre des Talens Lyriques plus colorés et enveloppants. Enfin le Troisième Homme, Pergolesi était sans aucun doute le plus attendu pour la majeure partie du public, en raison de son destin tragique et de la dimension quasi my(s)thique de son Stabat Mater. Nous avouons que les versions à deux voix féminines nous ont toujours moins convaincues que celles faisant usage d'une soprano et d'un contre-ténor. Cette réticence mise à part, l'interprétation de ce motet pour lequel les exigences sont sévères, a été inégale. Dès le "Stabat Mater dolorosa" apparaît le principal écueil du duo de femmes : une différence trop forte de projection vocale entre Vivica Genaux étonnamment discrète et Sabina Puertolas bien affirmée. Le contrepoint s'en trouve bancal, la juxtaposition des parties prenant le pas sur leur dialogue fusionnel. A côté de certains passages peu convaincants : un "Cuius animam" trop cursif, un "Sancta Mater" presque hâtif, l'on admire un "Quis non posset" d'une suggestivité contrite, un sublime "Fac, ut" vibrant d'ardeur, et surtout le lancinant "Quando corpus morietur" que Rousset investit d'une sève épaisse et colorée. Lamartine écrivit : "après m'être assouvi de Rome, je voulus voir Naples". A entendre les délices napolitains, nous n'en sommes pas encore repus.
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Affichage recommandé : 1280 x 800 Muse Baroque, le magazine de la musique baroque tous droits réservés, 2003-2014
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