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mise à jour 20 janvier 2014
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Genre : récital Il Pianto di Maria – The Virgin's lament Antonio Vivaldi (1678-1741) : Sonata « Al Santo Sepolcro » RV 130, Concerto « Madrigalesco » RV 129, Sinfonia « Al Santo Sepolcro » RV 169 Giovanni Battista Ferrandini (1710-1791) : Il Pianto de Maria, Cantata sacra da cantarsi dinanzi al Santo Sepolcro [autrefois faussement attribué Haendel (HWV 234)] Biagio Marini (1594-1663) : Passacaglio pour cordes et basse continue Claudio Monteverdi (1567-1643) : Pianto della Madonna (sopra il Lamento d'Arianna) Francesco Bartolomeo Conti (1681/82-1732) : « Sento già mancar la vita » air du Martirio di San Lorenzo Johann Georg Pisendel (1687-1755) : Sonata en ut mineur pour deux hautbois, cordes et basse continue Bernarda Fink (mezzo-soprano) Il Giardino Armonico Direction Giovanni Antonini
60'54, L'Oiseau-Lyre/Decca, 2009
La passion du Christ selon Marie
Ce récital est un drame à part entière. Dès les premières mesures de la sonate “Al Santo Sepolcro” de Vivaldi, nous voilà transportés dans une douleur à la fois avouée et solitaire. Comme dans un oratorio, le premier récitatif d'Il pianto de Maria de Ferrandini est enchainé sans transition après ce qui tient lieu d'ouverture. La “Cantata Sacra” a été longtemps attribuée à Händel ; depuis 1991 et grâce à une copie du célèbre Padre Martini sa création revient au compositeur vénitien Giovanni Battista Ferrandini (dont l'opéra seria nettement plus galant Catone in Utica de 1753 a récemment été sorti de l'ombre par Oehms). Dans Il pianto de Maria, le chant et les cordes nous font traverser tous les stades de la désolation, depuis la profonde et latente cavatina “Se d'un Dio fui fatta Madre” jusqu'à l'explosion du désarroi et des sanglots du “Sventurati miei sospiri” pour terminer sur le plaintif et tragique “Pari all'amor immenso”. Cette atmosphère prégnante de recueillement se poursuivent dans le Passacaglio de Biagio Marini aux accents préfigurant Corelli. Suit alors le Pianto della Madonna où Monteverdi renouvelle les accents dramatiques en parodiant son célèbre Lamento d'Arianna sur un texte latin pour les cérémonies liturgiques. Ici la dolorisme de la mère est décliné avec les injonctions de l'abandon. Renouant avec un passage instrumental, Il Giardino Armonico nous surprend par le mode mineur des accords du Concerto “Madrigalesco” vivaldien, qui brosse de manière franche et visuelle le récit de la Passion. Le récital se poursuit avec Francesco Bartolomeo Conti qui nous expose dans son “Sento gia mancar la vita” issu du Martirio di San Lorenzo, un air aux couleurs intéressantes notamment grâce à la sonorité plaintive du chalumeau soprano qui soutient la voix. Le drame s'achève sur la rigueur germanique de la Sonata en ut mineur de Johann Georg Pisendel où nous retrouvons l'esprit de Bach et nous sommes surélevés à la fin de l'Allegro par la promesse de la résurrection. Pour Marie, la passion de son fils est aussi la sienne, nous pouvons nous hasarder à dire que c'est le plus poignant de tous les récits de la Passion du Christ. Ce magnifique récit de la douleur, qui vaut bien plus que tous les autres récitals autour de la figure mariale, doit sa force émotive à Bernarda Fink. Nous l'avons entendue dans des rôles à la lisière de Marie, incarnant une Cornelia meurtrie dans Giulio Cesare de Haendel ou bien une Phèdre damnée dans Hippolyte et Aricie de Rameau, et sa voix profonde, au timbre mat et sombre nous émeut au plus haut point sous les voiles de crêpe et le jais de la Mater Dolorosa. Malgré la différence de styles et d'approches de Ferrandini, Monteverdi et Conti, Bernarda Fink maintient une cohérence sans faille, fait montre d'un engagement et d'une diction exceptionnels, notamment dans l'air “Sventurati miei sospiri” de Ferrandini, Il Pianto della Madonna de Monteverdi et “Sento già mancar la vita” de Conti. Souvent négligés par d'autres chanteurs, les récitatifs deviennent ici la clef du récit et Bernarda Fink varie la déclamation avec ardeur sans pour autant bousculer les phrasés. A ses côtés, nous sommes au pied de la croix et vivons avec elle la mort et le deuil dans la transparence des larmes et les nuances de la désolation. Et comment oublier le soutien incontestable et la présence iridescente d'Il Giardino Armonico dans la pénombre ? Après la lumière et la chaleur de leurs Concerti Grossi de Haendel (Decca), Giovanni Antonini se lance corps et âme dans ce récital plus intimiste et confirme la réputation d'excellence de sa phalange. Le pari était de taille, car il fallait donner une homogénéité à des pages aussi différentes que celles de Ferrandini, Marini, Monteverdi ou Conti ? L'orchestre réussit avec panache à donner une parfaite cohérence à un programme qu'une oreille distraite pourrait confondre l'intégrale d'un oratorio longtemps oublié. Les airs chantés sont splendides dans la précision, l'émotion et les nuances, les pages orchestrales autant de redécouvertes colorées. A la lueur des chandelles de la semaine sainte, Il Giardino Armonico nous fait voir les voiles sur les figures votives, nous fait même sentir l'encens et l'humidité des catacombes. Et cet indispensable "Il Pianto de Maria" nous confirme encore une fois que Giovanni Antonini et les membres d'Il Giardino Armonico arrivent à réaliser l'impossible alchimie de la musique en peinture.
Technique : enregistrement un peu voilé dans ses contours, avec une belle captation de Bernarda Fink
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Affichage minimum recommandé : 1280 x 800 Muse Baroque, le magazine de la musique baroque tous droits réservés, 2003-2014
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