La passion dévastatrice
La jeune et éplorée poétesse vénitienne Gaspara Stampa (1523 – 1554), chantée par Rainer Maria Rilke semble à la mythique Elissa ou Didon, reine de Carthage mille et mille fois abandonnée dans les livrets baroques. Tant Didon que Gaspara Stampa partagent le regret du départ, de l’indifférence et de l’abandon de leur amant, appelées par la guerre pour l’une et par son destin pour l’autre.
« Une beauté qu’on vient d’arracher au réveil. » (Purcell, Cease, anxious world, La Rêveuse – Mirare)
Voici un programme riche et bien mené, plus complexe qu’il n’y paraît de prime abord. S’y côtoient un choix d’airs purcelliens qui ne cède pas aux caprices du best-of (seuls Sweeter than roses et O let me weep sont réellement célèbres), des sonates, ground et pièces pour clavecin.
Quelques galanteries
Johann Georg Neruda arriva à Dresde en 1741 et débuta sa carrière de violoniste au service du comte Rutowski, gouverneur de Dresde et descendant d’Auguste le Fort. Soumis à l’influence italienne de compositeurs tels que Corelli, Albinoni ou encore Caldara, il fit publié dans son premier Opus (1764) des Sonates en trio aux accents chaleureux et méditerranéens. Ses œuvres s’adressaient avant tout à un public d’amateur d’où une structure claire, une mélodie simple à mémoriser et un caractère plaisant…
Un Didov et Enitch déchirant
Il faut bien le confesser, un peu honteux, en contemplant le bout de ses souliers : c’est avec un sourire un peu goguenard que l’on a pris connaissance de la distribution chorale et instrumentale de cet enregistrement, de ces New Siberian Singers Chamber choir of the Novossibirsk State Academic Opera and Ballet Theatre, de cet ensemble baroque russe inconnu, dirigé par un jeune chef grec, responsable musical de l’Opéra de Novossibirsk et formé au Conservatoire de Saint-Petersbourg.
“Autrefois, disoit-il, j’aimais faire du bruit; à présent je tâche de faire de la musique.”
C’est ainsi que Jean-Jacques Rousseau, chroniqueur avisé de son temps, rencontra Domènec Terradellas à son retour de Londres et le fit témoigner sur ses compositions. En effet, le musicien catalan connaissait un succès hors pair sur les scènes les plus prestigieuses d’Europe.
Le miel de l’Abbaye…
Jamais autant une époque n’aura célébré l’art choral avec autant de flamboyance que le XVIIIe siècle. Il devient l’aboutissement ultime, d’un baroque cherchant toujours à s’élever en un mouvement perpétuel, là où la courbe se fait couleurs, nuances, pourpres et or. Les deux œuvres retenues dans cet enregistrement par Arsys Bourgogne en sont la démonstration.
Tartinons…
Il y a certaines occasions où l’on voudrait se laisser convaincre et céder aux promesses de ce programme assez original que Chiara Banchini nous propose. Confortablement calée dans un fauteuil, l’opulent coffret entre les mains, on se prend à feuilleter les pages de l’épais livret, qui contient les œuvres poétiques desquelles Tartini s’est inspiré, ainsi qu’une belle iconographie picturale.
« Tandis que des soldats, de moments en moments, Vont arracher pour lui les applaudissements »(Racine, Britannicus, IV, 4)
Le marketing a parfois du bon. Car qui s’intéresserait réellement à un disque intitulé Regna Triumphalem à 12 voix et Missa super Dominis Regnavit à 16 voix ? Pourtant, il s’agit bien-là des deux compositions principales sur lesquelles se fonde cette reconstitution fastueuse du Couronnement de l’Archiduc Mathias, frère de Rodolphe II, en 1612.
La luxuriance du chœur
Grand oublié de l’histoire, Pierre Robert fut pourtant avec Henry du Mont celui qui porta durant la période la plus prospère du Règne de Louis XIV, le genre du grand motet à son accomplissement. Tout deux devinrent par semestre Sous-maîtres de la Chapelle Royale en 1663 et quittèrent leurs fonctions en raison de leurs réticences aux demandes d’évolution du Roi, en 1682 lors de l’installation officielle de la cour à Versailles.
Vous avez du feu ?
Voici un enregistrement léger comme une bulle de champagne, et à la lisière du baroque et du classique. La basse continue est encore là, mais la simplicité mélodique, les crescendos, le côté galant et dépourvu de toute pompe nous rappelle que les perruques in-folio sont remisées au placard, que les femmes reçoivent en déshabillé, que les longues traînes des robes à la françaises se font encombrantes.
« Sweet England »
A une époque où le timbre de contre-ténor faisait l’objet de moqueries ou au mieux d’une attention curieuse et polie, Alfred Deller ressuscita les bonnes vieilles ballades élisabéthaines, dont l’influence sur la musique anglaise continue jusqu’à aujourd’hui à se faire sentir.
Les Passions brillent avec Eclats
Eclairé par le chœur de François Terrieux, l’orchestre Les Passions dirigé Jean-Marc Andrieu présente pour son premier enregistrement un programme riche et intéressant, mêlant concertos du Prêtre Roux et motets d’un grand compositeur injustement méconnu. Nicola Porpora ne s’est en effet pas limité à enseigner aux grands castrats tels que Farinelli et Caffarelli, ou encore – ce que l’on sait moins – à Haydn…
“Je suis grand partisan de musique française, je l’avoue” Telemann, 1717
Nous le savons bien à présent, Georg Philip Telemann fut un des compositeurs les plus appréciés de son temps et surtout, celui dont la plume fut particulièrement généreuse et inspirée ; on ne lui doit pas moins de 3600 œuvres répertoriées dont une centaine d’Ouvertures-suites fortement influencées par les compositions d’un certain Jean-Baptiste Lully dont Telemann demeura un grand admirateur et imitateur.
Michel Vershaeve, Traité de chant et de mise en scène baroques
Ah, cela fait longtemps que l’on attendait cette 2nde édition du grand classique de Michel Verschaeve ! Il ne paie pourtant pas de mine, ce modeste in-8 thermocollé, à la couverture très zen, et dont les illustrations en noir et blanc souffrent d’une reproduction de basse qualité avec des effets de quadrillages ou de tramés…
Le second visage de Domenico Scarlatti
Qui l’eut cru ? L’on connaissait Domenico Scarlatti, le virtuose du clavier, célèbre pour son écriture audacieuse et novatrice, précurseur du style galant dans ses cantates. On le comparait souvent à son père Alessandro, grand maître de l’oratorio dans une querelle filiale des Anciens et des Modernes.
Des nocturnes qui feraient oublier Chopin
Voilà hélas le fruit d’une moyenne arithmétique qui perd dès lors tout son sens. Comment juger un programme disparate qui alterne les trois sublimes Nocturnes pour les Défunts de Porpora avec des concertos de type vivaldiens somme toute assez convenus, importuns qui ôtent la magie du chant, et choquent par leur caractère entièrement profane ?
Le triomphe d’Alexandre
On pourrait presque dire qu’Alessandro Scarlatti est à la cantate ce que Graham Bell est au téléphone. Car c’est sous sa plume et très prolifique que se stabilise la forme de la celle-ci avec ses récitatifs et ses airs da capos étendus. Gérard Lesne et Il Seminario Musicale effleurent dans ce disque à peine 1/100ème de sa production : 6 cantates sur 600 donc – quoiqu’ Edwin Hanley en recense même 783 entre 1688 et 1725 -, principalement pour voix seule, avec un faible pour les tessitures de soprano et d’alto.
Les Indes ronflantes
Ces transcriptions sont de la main même de Rameau et furent publiées avec l’unique édition de l’opéra, peu après 1735. Le compositeur regroupait certains airs et danses en quatre grandes suites, qui sont très partiellement enregistrées ici (16 numéros sur 32). Hélas, il semble que la transcription a étiolé le langage suggestif ramiste, et le jeu mécanique de Kenneth Gilbert ne fait qu’accroître une fâcheuse impression de tricotage de luxe.
Des exercices bien virtuoses
Un rayon de soleil traverse l’azur du petit matin et réchauffe le cœur d’une douce caresse… Dès le premier mouvement (largo) du Trio en la Majeur, Sébastien Marq expose son jeu doux et velouté, léger et transcendant. Et l’on s’émerveille, béat, devant la beauté du son, la justesse des sentiments, et ce toucher si délicat qui vous berce et vous emmène dans un jardin d’Eden.
Enfin une version à emporter sur l’île déserte !!!
L’œuvre déchaînait déjà l’enthousiasme dès le XVIIIème siècle en raison de la mort précoce de son auteur. Composé à la demande du Duc de Maddaloni, le légendaire Stabat Mater devait remplacer celui de Scarlatti en l’église Santa Maria dei Sette Dolori, à Naples. Il en conservait l’effectif : soprano, contralto, cordes et basses continue. Pergolesi acheva dans cette oeuvre la réunion du style antico et du stile moderno, juxtaposant ou fusionnant tour à tour archaïsme et modernité.