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6 janvier 2014

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Chronique Festival

 

Haendel, Messiah

Collegium 1704, dir. Václav Luks

Eglise d'Arques-la-Bataille © Muse Baroque, 2011

 

De retour à Arques, après un dîner rapide, nous voilà impatients de renouer avec des nourritures plus spirituelles, et de découvrir le beau jubé tripartite Renaissance de l'église Notre-Dame de l'Assomption dont le chœur et le transept datent du début du XVIème siècle. Les trois baies de pierre blanches séparent la nef du chœur, et laissent admirer la délicatesse de leurs colonnes corinthiennes et d'un entablement opulent. Devant la masse de pierres, alors que l'automne enveloppe déjà dans son déclin crépusculaires les festivaliers emmitouflés, nous apercevons déjà une file de haendéliens à l'affût, programme à la main, devisant avec animation.

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Vaklav Luks dirigeant le Messie © Muse Baroque, 2011

 

George Frideric Haendel

 

Messiah (le Messie)

 

Hana Blaziková, soprano

Lucie Hilscherová, alto

Erik Stoklossa, ténor

Marián Krejcík, basse

 

Collegium vocale 1704

Collegium 1704

 

Direction Václav Luks

 

Samedi 27 août 2011, église d’Arques-la-Bataille (76)

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Worthy is the lamb

Ainsi que Václav Luks nous l’expliquait lors de son entretien, ce Messie est le fruit d’une collaboration ouverte par le Festival de Halle, qui a proposé au chef d’étrenner la nouvelle édition critique de chez Barenreiter. Toutefois, dans la belle église d’Arques qui a conservé son superbe jubé Renaissance, ce sont moins les subtilités de la partition interprétée que l’énergie déferlante du Collegium 1704 qui marquèrent les spectateurs, subjugués par le dramatisme intense d’une lecture décapante.  

 

L’on sait l’affinité de Luks avec le caro Sassone, d’une Rezurrezione multicolore, à un Rinaldo pyrotechnique. Le voyage haendélien se poursuit sur un versant moins italianisant, avec ce Messie où le compositeur a su conjugué en un temps record les influences italiennes et anglaises pour recréer un objet musical au vocabulaire tout à fait idiomatique sur un livret allégorique sans personnage qui comporte le risque de se révéler trop contemplatif. Est-ce pour cela qu’on a rarement vécu un Messie aussi concentré, d’une force épuisante qui ne recule pas devant la brutalité, constamment démonstratif et extraverti ?

 

Dès l’ouverture, le Collegium 1704 fait montre de ses cordes incisives, sabrant avec pugnacité les notes inégales, les attaques sont d’une fermeté franche prêtes à faire jaillir le feu des silex, les violoncelles excellents drapés dans leur sonorité grainée. Vaklav Luks imprime en quelques secondes à peine une vision expressive survitaminée, aux tempi extrêmement vifs, à l’action compacte.

© Muse Baroque, 2011

L’oratorio faisant la part belle aux passages choraux, c’est par ces derniers que nous commenceront, afin de louer sans réserve la vitalité harmonieuse du Collegium vocale 1704 qui affiche une belle cohésion et des aigus souples en dépit des tempi redoutables du chef. On citera ainsi le "For unto us a child is born" sautillant et primesautier, le "His yoke is easy" pulsant mais saccadé, l’amplitude généreuse du "Behold the lamb of God" ou la puissance sauvage et rude du "Surely he hath borne our grief". Nous passerons volontairement sur l’attendu "Alleluia" triomphant et spectaculaire, tonitruant et cuivré, passage obligé de tout Messie, et paradoxalement peut-être l’un des moments les moins sensible de l’œuvre dans sa fierté d’airain.

 

Parmi les solistes,  Hana Blaziková a fait partager des aigus cristallins et purs, un timbre flûté. Si la diction anglaise pourrait être améliorée, de même que la précision des coloratures, la soprano a livré un "How beautiful are the feet" lumineux et plein d’espérance, et un "I know that my redeemer liveth" coloré et souple, d’une délicatesse raffinée, qui a fait oublier son relatif retrait dans la première partie.

 

La prestation de Lucie Hilscherová s’est avérée plus inégale, ses détracteurs ne manqueront pas de souligner une émission trop large, une projection moyenne parfois couverte par l’orchestre "But who may abide"), quelques décalages dans les départs ("Then shall the eyes of the blind be opened"). Nous retiendrons surtout sa lecture poignante et équilibrée de "He was despised", l’un des rares moments d’apesanteur de ce concert, d’une fluidité sereine.

© Muse Baroque, 2011

 

On passera assez brièvement sur le ténor nasal de Erik Stoklossa, appliqué et à la projection normale, aux vocalises un peu confuses, trop discret au regard d’un orchestre corrosif ("All they that see him"), ou aux effets au contraire trop appuyés ("He that dwelleth in heaven") pour féliciter Marián Krejcík, basse imposante et stable, au timbre digne d’un Commandeur. D’un "For behold, darkness shal cover the Earth" subtil et évocateur au tumultueux “Why do the nations” à la virtuosité assumée, Krejcík se révèle un pilier de la terre d’une humanité altière, au phrasé noble et éloquent.

 

La direction de Luks est celle d’une grande fresque polychrome, vibrante et violente, ponctuées de spasmes et de soubresauts, poussant ses solistes dans leurs retranchements par l’audace des tempi, chargeant à la hussarde avec un panache téméraire les champs de doubles-croches, comme effrayé à l’idée de pouvoir, ne serait-ce qu’un battement de cil, céder à l’immobilisme du repos ou de la contemplation.

 

Derrière la fascination et l’excitation d’une approche engagée jusqu’à la garde, fulgurante et persuasive, on regrette toutefois une certaine uniformité dans le mouvement, des contrastes trop estompés, et un Messie omniprésent qu’on ne prend jamais la peine d’attendre…

Viet-Linh Nguyen

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Vers les autres chroniques d'Arques

 

 

 

 

 

24-27 août 2011 : Festival d'Arques-la-Bataille (Haute-Normandie) organisé par l'Académie Bach

 

Le site officiel du Festival : www.academie-bach.fr (programme, réservations...)

 

 

 

 

 

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