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6 janvier 2014

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Chronique Concert

Haendel, Rinaldo,

 Orchestre Collegium 1704, dir. Vàclav Luks,

mise en scène Louise Moaty

 

 

© Hana Smejkalova

 

Georg Friedrich HAENDEL (1685 - 1759)

 

Rinaldo (1711), Hwv 7a.

Opéra en trois actes, sur un livret de Giacomo Rossi, d'après Aaron Hill, inspiré de La Jérusalem délivrée du Tasse.

 

Solistes :

Mariana Rewerski (Rinaldo), Yeree Suh (Almirena), Stanislava Jirku (Goffredo), Marketa Cukrova (Eustazio), Marie Fajtova (Armida), Adam Plachetka (Argante), Jan Martinik (Mage/ un héraut), Andrea Brozakova et Stanislava Mihalcova (Sirènes)

Danseurs : Andrea Mlitnerova, Romana Konradova, Viktor Badinka, Jan Brezina, Germans Filipovs et Peter Kriz.

 

Orchestre Collegium 1704

Direction : Vaclav Luks

Mise en scène : Louise Moaty, scénographie : Adeline Caron, costumes : Alain Blanchot, lumières: Christophe Naillet.

 

Représentation du 21 mai 2010 à l'Opéra de Rennes

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Rinaldo dans son jus baroque

 

© Hana Smejkalova

Rinaldo fut le premier succès du jeune Haendel, alors âgé d'un peu plus de 25 ans, sur les scènes londoniennes, en l'occurrence celle du Queen's Theatre de Haymarket. Son jeune directeur, Aaron Hill, avait de son côté réuni tous les ingrédients d'une réussite annoncée : canevas tiré de La Jérusalem délivrée du Tasse (un "best-seller" de la fin du XVIIème siècle...), machines de scène à profusion (en ce temps où n'existait pas le septième art, l'opéra était le lieu de prédilection de ce que l'on appelait pas encore les "effets spéciaux"...), et stars du chant (les castrats Urbani et Nicolini, les chanteuses Francesca Vanini Boschi et Isabella Giradeau), sans compter évidemment le recours à un jeune compositeur de génie.

Le livret comporte de nombreux éléments de merveilleux médiéval, prétextes à des interventions de machines toutes plus spectaculaires les unes que les autres : la magicienne Armide, maître du roi des Sarrasins Argante, apparaissant sur son char tiré par un dragon ; la barque qui emmène les chevaliers vers l'île enchantée d'Armide...S'y ajoutent de nombreux ballets, en particulier aux troisième acte (combat pour délivrer Rinaldo puis affrontement des Chrétiens et des Sarrasins). Pour restituer cette brillante atmosphère, Louise Moaty n'a pas lésiné sur les moyens : costumes à la mode médiévale, décors soignés, char d'Armide tombant des cintres, barque improbable enlevée par les sirènes. Les ballets sont habilement suggérés par quelques danseurs esquissant des pantomines adaptées au déroulé de l'action. Sur des décors généralement sombres, les bougies cachées au premier plan de la scène diffusent des lumières dorées du plus bel effet, à peine appuyées par quelques projecteurs. Ne serait-ce l'intime cadre à l'italienne de l'opéra de Rennes, avec son imposant foyer en rotonde, on se croirait donc ramené à une représentation originale au Queen's Theatre...

 

© Hana Smejkalova

A la baguette le maestro Luks pose dès l'ouverture sa conception de l'oeuvre. La direction, à la fois fluide et tonique, met en mouvement un ensemble d'un format réduit (mais bien adapté à la salle), et qui saura faire preuve de beaucoup de personnalité lors des passages solos (notamment le clavecin qui accompagne Armide à la fin du second acte, ou les trompettes lors de leurs différentes apparitions sur scène). Très convaincant également dans les ensembles, l'orchestre Collegium 1704 porte ainsi avec conviction l'oeuvre, de l'ouverture au final.

Côté distribution, la virtuosité des airs contenus dans Rinaldo ne facilite pas le choix des interprètes. Le maestro Luks s'en acquitte fort honorablement, en alignant autour de Mariana Rewerski, Rinaldo de haut vol qui domine l'ensemble sans toutefois l'écraser, une distribution homogène à défaut d'être exceptionnelle. Les esprits chagrins pourront certes souligner une Stanislava Jirku un peu à la peine dans le premier air de Godefroy, ou un Adam Plachetka un peu hiératique dans le rôle d'Argante. Ou bien encore dénoncer le timbre un peu trop nacré de Maria Fajtova dans le rôle d'Armide (mais c'est une magicienne, comme Alcina, pas une sorcière !). L'essentiel n'est pas là.

Le ressort orchestral a tôt fait d'emporter les débuts empruntés de certains chanteurs au premier acte. Et l'apparition d'Armide sur son char tiré par un dragon, dévalant son "Furie terribili" du haut des cintres nous remet rapidement dans l'ambiance musicale. Après un duo bien équilibré avec Armide, les deux airs solos de Maria Rewerski (dont le célèbre "Cara sposa") appellent les applaudissements mérités qui couronnent le final du premier acte.

 

© Hana Smejkalova

Eustazio (Marketa Cukrova) ouvre le second acte avec expressivité, en s'acquittant avec mesure de son air sans toutefois pousser ses moyens. Les deux sirènes qui entraînent Rinaldo vers l'île d'Armide sur une barque sont bien convaincantes dans leur numéro de séduction lascive. Et si Godefroy (Stanislava Jirku) manque un peu d'abattage dans le "Ho in cor che no sei dir", Yeree Suh (Almirena) s'acquitte fort honnêtement du célèbre "Lascia, ch'io pianga", avec une expressivité toutefois un peu appuyée à certains moments. Le succès principal revient incontestatblement à Fajtova, qui emporte des applaudissements nourris à la suite de ses grands airs, dont elle dévale les redoutables ornements avec un bel abattage.

Au troisième acte, les pantomines se succèdent pour mimer les affrontements, dans des lumières ténébreuses, et sous le rythme nerveux du maestro Luks. Jirku s'y montre un peu plus à l'aise que dans ses airs précédents, avec un timbre bien posé. Cukrova (Eustazio) y développe aussi une prestation convaincante, toujours dans la mesure de ses moyens. Mais c'est Rewerski qui emporte le succès avec un énergique "Or la tromba" aux ornements pyrotechniques, accompagné par les trompettes sur scène, à l'aube d'un final fort justement applaudi.

Pour conclure, saluons cette méritoire production de Rinaldo dans son jus d'origine, réinterprétation intelligente de la création originale de 1711, avec des recherches poussées sur les éclairages et les costumes. Servie par un orchestre nerveux et rythmé, lui-même relayé par une distribution homogène où brille Rewerski, il n'en fallait pas davantage pour passer une excellente soirée...baroque !

 

Bruno Maury

Site officiel du Collegium 1704 :  www.collegium1704.com

Site officiel de l'Opéra de Rennes : www.opera-rennes.fr

 

 

 

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