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6 janvier 2014

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Chronique Concert

 

"Le Carnaval Baroque",

Le Poème Harmonique, dir. Vincent Dumestre,

mise en scène et chorégraphie Cécile Roussat

© Christian Ganet, 2010

"Le Carnaval Baroque"

Spectacle d’ Arts du cirque mis en musique

 

Conception et direction artistique : Vincent Dumestre ;

Mise en scène et chorégraphie : Cécile Roussat ; Costumes : Chantal Rousseau ; Scénographie : François Destors ; Eclairage : Christophe Naillet ; Maquillage : Julie Coffinières.

Alto : Bruno Le Levreur ; Ténors : Serge Goubioud et Hugues Primard ; Basse : Emmanuel Vistorky ; Mimes, acrobates, guitares : Stefano Amori et Julien Lubek ; Acrobates : Ahmed Saïd, Olivier Landre, Quentin Bancel, Antoine Hélou, Rocco Le Flem.

 

Musiques de : Maletti, Il Fasolo, Kapsberger, Monteverdi

 

Musiciens du Poème Harmonique :

Johannes Frisch (violon), Judith Pacquier (cornet à bouquin), Stephane Tamby (basson et flûtes), Lucas Peres (basse de viole, lirone et tamburello), Martin Bauer (violone et flûte), Michèle Claude (percussions), Vincent Dumestre (guitare baroque, Colascione)

 

Direction Vincent Dumestre

 

10 et 11 décembre 2011, Odyssud, Blagnac (31)

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Le Poème Harmonique et son directeur artistique, Vincent Dumestre, produisent depuis 1998 des spectacles de toute beauté. Souvenons-nous de ceux passés à l’éternité grâce au DVD comme le Bourgeois Gentilhomme et Cadmus & Hermione. Le Carnaval Baroque tourne depuis 5 ans et nous avons déjà pu à deux reprises, en 2007 et en 2010 vous en conter l'émerveillement. Une nouvelle équipe d’acrobates, de mimes et deux musiciens, permet cette série de reprises. Leur parfait amalgame à la troupe est le signe du travail très original du Poème Harmonique qui prolonge plusieurs fois la vie d’un spectacle toujours en évolution en un vrai travail de troupe. Ce qui fait que chaque fois il s’agit d’un spectacle un peu différent et toujours du même esprit. Venus à Odyssud pour le Bourgois Gentilhomme en 2010 la scène de Blagnac toute proche de Toulouse permet à un nombreux public d’assister à ces merveilleux moments. Deux soirées pour le Carnaval Baroque avec une salle pleine à chaque fois.

Avec ce Carnaval Baroque, Vincent Dumestre et Cécile Roussat ont su créer un spectacle total, comme nous les aimons nous les baroqueux. Le Carnaval était la seule période pendant laquelle un peu de liberté desserrait le joug papal. L’interdiction faite aux femmes de monter sur scène pénalisait les spectateurs comme les compositeurs. La chose est bien connue et les castrats ont été crées pour combler ce manque de voix aigues. Le spectacle de ce soir comprend donc une distribution uniquement masculine avec un contre-ténor, Bruno Le Levreur,  jouant le rôle féminin avec beaucoup d’esprit et une voix stable et forte. Les musiciens sont sur un praticable à gauche et baignent dans une belle lumière dorée. Ils nous régalent de leurs timbres harmonieux et leurs rythmes endiablés. Musicalement la réalisation est somptueuse.  Les voix sont superbes et les instrumentistes si virtuoses que leur aisance est totale. Vincent Dumestre joue de nombreux instruments, ce soir de la guitare baroque et du colascione (sorte de luth à long manche fait pour être plus facilement transporté qu’un théorbe, utilisé en particulier sur les foires au XVI° et XVII° siècle en Italie).  Il ne dirige que très peu, mais son attention à chaque acrobate assure la cohésion du spectacle.

Les partitions nous permettent de retrouver Il Fasolo, compositeur mystérieux originaire de Bergame au début du XVII° siècle dont le Poème Harmonique  nous a offert un superbe enregistrement déjà en 2002. D’autres compositeurs comme Maletti, Kapseberger et Monteverdi font partie de cette fête. L’humour est très présent dans le jeu et la mise en scène mais également musicalement, ce qui est bien plus rare. Ainsi un inénarrable Lamento del Naso parodie le sublime Lamento della Ninfa de Monteverdi. Quand on sait comment le Poème Harmonique en a proposé tant en concert qu’au disque une version idéale avec la voix de Claire Lefilliâtre le second degré prend une saveur toute particulière. Mais la mélancolie la plus douce qui va nous entraîner dans le sommeil est aussi présente.  Le chant si sensuel de Hugues Primart apporte un sommet d’émotion dans une berceuse lancinante, sorte d’ancêtre de Pierrot.

© Christian Ganet, 2010

Les 2 Arlequins tout simples, donnent le ton, léger et surprenant, mais les chanteurs sont richement costumés et leurs poses sont subtiles. Avec l’entrée des athlètes il est ensuite presque évident que le mouvement en trois dimensions vienne faire son apparition pour faire passer à chacun un moment inoubliable. Tous les arts de la scène se mêlent dans ce spectacle. Magie, danse, musique, théâtre, chant, mime, agrès, sauts, portés, jonglage. Les artistes sont très engagés et s’appuient les uns sur les autres. Les jeunes athlètes deviennent des danseurs tant le travail de Cécile Roussat est exigeant. Moments rares de force herculéenne, de souplesse digne des singes les plus taquins, jeux de scène comique de la commedia dell’arte, poses mélancoliques s’enchaînent avec ductilité.

La violence des rapports humains que le Carnaval révèle est très présente avec des meurtres « pour rire » dont le plus spectaculaire est sur la corde. Cette utilisation des trois dimensions de la scène, la parfaite adéquation des mouvements avec la musique, tous concours à une unité qui loin de superposer les arts et les émotions les relie en un tout cohérent. De nombreux rires, des applaudissements couvrant la musique, des battements de mains spontanés, une standing ovation le premier soir, prouvent la puissance de ce spectacle qui se sert de moyens très simples pour créer un monde onirique. Avec des bougies, un bout de corde, des cageots, tout un monde est inventé comme du temps de l’enfance, en sa noblesse inaliénable, lorsque l’émerveillement était possible de tous petits riens. Ce spectacle unique est baroque dix-septièmiste, mais surtout intemporel en sa force de persuasion décuplée.

Merci à tous ces merveilleux artistes d’horizons si divers, de mettre le meilleur de leur art au service d’un projet si généreux. La mise en scène de Cécile Roussat est un modèle d’intelligence, de sensibilité et d’humour. La réalisation musicale de Vincent Dumestre est absolument superbe, créant un spectacle unique et inoubliable.

Note : une critique alternative et différente de celle-ci, du même auteur, est également parue sur : http://www.classiquenews.com/ecouter/lire_article.aspx?article=5243&identifiant=20111211KKJ4G65CYEK30RBMBC6GWH75Q

Hubert Stoecklin

Site officiel d'Odyssud : www.odyssud.com

Interview : "Je me suis aperçue très récemment à quel point la danse baroque est une bizarrerie"  : entretien avec Cécile Roussat, danseuse et chorégraphe baroque

 

 

 

Affichage recommandé : 1280 x 800

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