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Ah, le baroque autrichien !

Biber, quasi-inconnu voici 30 ans, est devenu en peu de temps un best-seller de la musique baroque, malgré un nom particulièrement alambiqué. Entre ses messes monumentales (Missa Bruxelensis, Missa Salisburgensis, Missa Sancti Henrici) et ses œuvres violinistiques virtuoses (Sonates du Rosaires, Sonates pour violon), l’élève de Schmelzer se caractérise dans ses œuvres instrumentales par une grande liberté formelle…

Heinrich Ignaz Franz von BIBER (1644-1704)

Sonatae Tam Aris Quam Aulis Servientes

 

The Rare Fruits Council, dir. Manfredo Kraemer

Astrée, 1998.

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Biber, quasi-inconnu voici 30 ans, est devenu en peu de temps un best-seller de la musique baroque, malgré un nom particulièrement alambiqué. Entre ses messes monumentales (Missa Bruxelensis, Missa Salisburgensis, Missa Sancti Henrici) et ses œuvres violinistiques virtuoses (Sonates du Rosaires, Sonates pour violon), l’élève de Schmelzer se caractérise dans ses œuvres instrumentales par une grande liberté formelle proche de l’improvisation, l’introduction de rythmes populaires, l’utilisation de la scordatura (accord particulier des cordes) et le goût des trompettes rutilantes, si fameuses à Kremsier connue pour ses musiciens doués.

Ces 12 Sonates “pouvant servir tant à l’autel qu’à la table” datent de 1676. Elles nécessitent 6 à 8 instruments, dont deux trompettes aux parties particulièrement difficiles. L’orchestre est ici beaucoup plus foisonnant que le minimum syndical prévu, et d’une couleur folle : violes d’amour, harpes, guitare, théorbes, viole ténor et violoncelle, clavecin et orgue, rien n’est trop fleuri pour Biber. De plus, on retrouve dans l’orchestre de grands solistes tels Lorenz DuftschmidRolf Lisveland ou Alessandro de Marchi. Er tout ce beau monde s’amuse follement et nous avec eux, tant l’investissement et le plaisir sont contagieux. Comment résister à ces trompettes pétulantes, ces cordes grainées, ce geste épique, ces tempi imprévisibles, ce son ample et résonnant ? Ca remue, ça grouille, on s’imagine plus à la table qu’à l’autel. Et Manfredo Kraemer n’a pas son pareil pour étaler sa palette de timbres, travailler la matière dans toute son épaisseur, prendre à bras l’auditeur et l’emporter avec lui dans ses cadences infernales. Ah, le baroque autrichien ! 

Marion Dammerey

Technique : légère réverbération

Étiquettes : , , Dernière modification: 23 novembre 2020
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