Rédigé par 19 h 51 min CDs & DVDs, Critiques

Ventre affamé n’a point d’oreilles (Les amours d’un rossignol, La Simphonie du Marais, Hugo Reyne)

En deux volumes et un DVD – dont nous nous consacrerons au seul premier qui retrace l’histoire du flageolet aux XVIIème et XVIIIe siècles, Hugo Reyne survole la destinée de cet instrument qui perdura jusqu’à la fin du XIXe siècle. L’on découvre ainsi les subtilités entre le flageolets français et son homologue anglais bien différent et qui survit jusqu’aujourd’hui sous la forme de la tin whistle irlandaise en métal.

“(…) Je m’en vais vous en dire une chanson si belle
Qu’elle vous ravira : mon chant plaît à chacun.
Le Milan alors lui réplique :
Vraiment, nous voici bien : lorsque je suis à jeun,
Tu me viens parler de musique.
J’en parle bien aux Rois. Quand un roi te prendra,
Tu peux lui conter ces merveilles.
Pour un Milan, il s’en rira :
Ventre affamé n’a point d’oreilles”
(La Fontaine, Le Milan & le Rossignol)

Les amours d’un Rossignol
Musique pour le flageolet français

Thomas Greeting : Nightingale
John Banister : Flageolet et basse continue
Mr Hills : Flourish & Air for the Bull Finch – Flourish & Air for the Canary Bird – Flourish & Air for the Linnet – Flourish & Air for the Woodlark – Flourish & Air for the East India Nightingale
Jean-Pierre Freillon-Poncein: Passacaille
Martin Hotteterre : Prélude et Marche de Surlaube
Georg Friedrich Händel : Concerto pour orgue «Le Coucou et le Rossignol», HWV 295 (*)
François-Adrien Toulan : Prélude & Le Rossignol
Michel Yost : Quatuor, opus II, n° 1 (arrangé par Collinet père) – Concerto V en mi bémol majeur
Nicolas Pfeilsticker : Concerto en sol majeur (*)

Frédéric Heinel: Quatuor pour flageolet, violon, alto et violoncelle
Hector Berlioz : Le Dépit de la bergère, H. 7
Edme Collinet : Sérénade n° 1 pour flageolet et piano
Eugène Roy : Quadrille: L’Aglaë, La Zoé, La Lucie, L’Arsène & L’Amélie
Louis Jullien : Le Rossignol (*)
Philippe Musard : Le Bal de l’Opéra: Galops n° 1, 2 et 3
Jean Carnaud : Air varié pour flageolet et piano
Narcisse Bousquet : Gaule et France (air varié) (*)
Eugène Damaré : Fleurs et papillons, Polka-Rondeau, opus 211 (*)

La Simphonie du Marais,
Hugo Reyne (flageolet, récitant et direction)

Enregistré en l’église de L’Herbergement (28 et 29 mai 2015 [*]) et à la salle de l’Aquarelle de L’Herbergement (25-27 novembre 2019) – 128’10 (CD) et 35’50 (DVD)
Coffret de deux disques et un DVD HugoVox 002

Le dernier et ultime enregistrement de la Simphonie du Marais avant la malheureuse dissolution de l’ensemble fait partie de ses séries pédagogiques ont on citera notamment l’opus de David Monrow sur les instruments du Moyen Âge et de la Renaissance, le vaste guide des instruments anciens (Ricercar), la Défense de la base de viole contre les entreprises du violon et les prétentions du violoncelle (Ricercar aussi) ou bien le csakan dans les Viennoiseries musicales (1806-1826) toujours par la Simphonie du Marais.

Ici en deux volumes et un DVD – dont nous nous consacrerons au seul premier qui retrace l’histoire du flageolet aux XVIIème et XVIIIe siècles, Hugo Reyne survole la destinée de cet instrument qui perdura jusqu’à la fin du XIXe siècle. L’on découvre ainsi les subtilités entre le flageolets français et son homologue anglais bien différent et qui survit jusqu’aujourd’hui sous la forme de la tin whistle irlandaise en métal. Le flageolet français compta quant à lui six trous où chaque pouce actionne  l’un des trous arrière. Petit instrument pratique, se glissant aisément dans la poche la mettre à danser, le flageolet était l’affût de ce que le la pochette était au violon. Et du fait de sa petite taille de sa tessiture aiguë, le flageolets fais souvent associé aux oiseaux et notamment au rossignol, permet de parfaire la couleur champêtre de divertissement gaillard et rustique. On goûte le naturel allié à la ductilité du musicien, l’élégance détachée des articulations, le caractère dansant mais équilibré du tempo dans la Passacaille au voile délicat et doux  avant le prélude et La Marche de Surlaube de Hotteterre qui permet d’illustrer un aspect plus martial proche du fifre et l’on imagine aisément notre flageolet accompagné de roulement de tambour quelque part dans les chemins boueux des Flandres pensant la Guerre de Succession d’Espagne. Le plat de résistance de cette première partie est le fameux Concerto pour orgue de Haendel “The Cuckoo and the Nightingale” qui est ici donné en version malicieusement transposée au flageolet mais avec des effectifs bien chambristes. La vision est digne, aérée, délicate, digne d’un Chardin accroché dans un boudoir. Et si l’orchestre sonne un peu chiche, l’abandon spontané de la ligne du flageolet, le caractère plaisant des ornements, la justesse des articulations fond de cet oiseau un sacré chanteur. 

Nous nous approchons ensuite trop des limbes musicales pour poursuivre ce dangereux périple, et laissons ce rossignol, fin et piailleur, à ses doux ramages. Un disque confidentiel, informatif, et dédié aux amateurs. 

Sébastien Holzbauer

Étiquettes : , , Dernière modification: 8 décembre 2020
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