Kreuzige, kreuzige !
Avril – mai 2011. Passion entière et passionnée, empreinte dès le départ d’un sentiment de malaise et d’instabilité, d’une soif de sang malsaine et d’une volonté destructrice. Telle est la vision, très noire et extrêmement tendue que propose Philippe Pierlot de cette œuvre déjà plus ramassée et descriptive que la Saint-Matthieu et que le chef parcourt avec un souffle puissant et démonstratif avec une théâtralité vigoureuse qui aurait sans doute effrayé les prudes autorités de Leipzig…
Travaux en cours
Chers Amis et lecteurs, Vous êtes de plus en plus nombreux sur ces pages, et nous dépassons désormais les 45 000 visiteurs mensuels. Cette volumétrie, largement supérieure à la force de projection actuelle de notre glorieuse armée au Moyen-Orient, de même que les vœux formulés par les lecteurs fidèles nous conduisent à mettre en œuvre des réformes structurantes, tournées vers l’avenir sans renier le passé dont il est l’héritier. Car en effet, pourquoi une revue devrait-elle se limiter à la musique et aux arts baroques ? N’est-ce pas faire preuve de sectarisme austère, d’œillères d’acier, de confinement transi voire d’une malsaine nostalgie ?
Entretien avec Jérôme de la Gorce, directeur de recherche au CNRS, et Pierre Jugie, conservateur en chef à la section ancienne des Archives Nationales
Entretien avec Jérôme de la Gorce, directeur de recherche au CNRS, et Pierre Jugie, conservateur en chef à la section ancienne des Archives Nationales, commissaires de l’exposition Dans l’Atelier des Menus-Plaisirs du Roi…
Armide de Lully ou le sublime crépuscule du Florentin
Crépuscule peut-être, mais flamboyant automne, brillant déclin, sublime chant du cygne. Armide fut la dernière tragédie lyrique de Lully, et sa dernière collaboration avec son complice de longue date, la poète Philippe Quinault. Il y aura bien la pastorale héroïque Achille & Polyxène sur les médiocres vers de Jean Galbert de Campistron en 1687…
“Je suis perdu des songes qui me viennent” (Jacques Amyot)
Janvier-Février 2011. Certains – et cela inclut d’éminents membres de notre rédaction -, certains trouveront que cette Muse du Mois se révèle trop convenue et trop prévisible, tout comme le dernier récital de Philippe Jaroussky. Que la formule du récital est trop fragmentée, sorte de best-of ou de mise en bouche à laquelle manque la rigueur d’une belle intégrale d’un opéra de Caldara qu’on attend encore…
L’Opéra au cinoche ?
Tout comme le Palais alexandrin assiégé par les troupes de Ptolémée, les guichets de l’Opéra Garnier n’ont pas résisté au déferlement du public. Il ne reste plus rien des légions triomphantes balayées par le souffle du vent alors que s’élève une âcre odeur d’incendie au-dessus de l’Opéra Garnier. Et, afin de n’être pas reconnu, nous abandonnons notre manteau écarlate de général dans les flots, en conservant précieusement notre sésame vers l’ovale doré.
“L’ayant fait passer dans plusieurs cours, il a passé icy en revenant de Londres, & il a eu l’honneur de jouer du violon devant le Roy, & devant toute la Cour…” (Le Mercure Galant, décembre 1682)
Gunar Letzbor est l’un de ces musiciens à l’exigence musicale et intellectuelle intransigeante, Chevalier de l’archet, Défenseur du violon seul et orphelin, le Paladin errant poursuit sa quête sinueuse des Sonates et Partitas de Bach, épreuve ultime selon lui, après avoir passé par les rudes et mystiques des Sonates du Rosaire et l’Artificiosus Concentus pro Camera de Vilsmayrs (tous deux chez Arcana).
“Les Voix humaines”
Que de chemin parcouru tout au long de cette intégrale d’abord parue chez Pierre Verany puis chez Ligia Digital depuis 1992. Voilà une œuvre colossale que celle d’enregistrer les 584 pièces de violes de Marin Marais, éditées entre 1686 et 1725 dans ses 5 Livres dont on retient trop souvent uniquement le Second (1701) pour ses fameuses Folies d’Espagne.
Jerusalem, convertere ad Dominum Dem tuum
Second volet du triptyque que les Passions consacrent à Jean Gilles, avant le futur Te Deum et après le Requiem que nous avions pu goûter chez le même éditeur, les Trois Lamentations pour le Mercredi, Jeudi et Vendredi saint du compositeur datent vraisemblablement de sa période aixoise, et l’on ne reviendra pas sur l’écriture dans le style du grand motet que Jean-Marc Andrieu a décrit mieux que nous ne ferions…
“Boire de l’eau de framboise avec vous me comble”
C’est dans le cadre intime et flottant de la Péniche Adélaïde (un nom qui plairait à Nattier) que nous avons assisté à la reprise de La Veuve et le Grillon de Daniel Soulier, comédie baroque autour des airs de cours français, joute imaginaire entre une morganatique Madame de Sévigné et un Monsieur de la Fontaine on ne peut plus bon vivant.
Si c’est pour lui faire de beaux enfants…
Mars 2010. Voici un CD qui aurait pu passer aussi inaperçu qu’un garde suisse fermant une grille versaillaise, qu’un courtisan cherchant une chaise d’affaire, qu’un solliciteur faisant les cent pas devant l’Aile des Ministres. Un digipack élégant mais neutre, un label peu connu et difficilement trouvable en grandes enseignes, une œuvre très, trop fameuse.
Des concerti dégrossis
Il Giardino Armonico a décidé de frapper un grand coup, et de fracasser avec témérité la porte de l’année du 250ème anniversaire de la mort de Haendel avec cet enregistrement iconoclaste et ravageur. Sans exagération, l’on peut dire que la phalange italienne provoque avec ce bus bleu turquoise un second choc sismique pour nos habitudes d’écoute…
Pantaleon et tangentenflügel (Guides des instruments anciens – Ricercar, 2009)
C’est une idée que nous caressions depuis quelques temps. Un sorte de CD-Rom ou de livre-disque qui permettrait aux curieux d’enfin connaître les détails des instruments anciens et baroques, et d’en apprécier en même temps les sonorités à travers des exemples musicaux. Eh bien, Ricercar l’a fait.
L’Italie à Madrid
Octobre 2009. Voici un CD élégant et rare, qui en étonnera plus d’un. Car si Juan de Ledesma est bien originaire de la péninsule (la grosse péninsule du Couchant), c’est du côté de l’Italie, et notamment de Naples que se tournent ses regards. En effet, les alliances matrimoniales des Bourbons d’Espagne conduisirent à la venue de musiciens italiens, tels Farinelli lui-même.
Fluctuat nec mergitur
Pour la douzième édition d’Eclats de voix, Patrick de Chirée convie encore une fois les mélomanes en terre gasconne. La promenade musicale d’un éclectisme assumé labourera la carte gersoise, traçant ses sillons d’Auch à l’abbaye cistercienne de Flaran en passant par le minuscule village de Lagraulet-du-Gers paisiblement égaré dans sa campagne verdoyante…
“La Raison vous dit : Trois c’est trois et la Foi déclare que : Trois c’est un” (Flaubert)
Mars 2009. Bruno Cocset possède l’archet agile, assuré, infiniment conteur. Après des sonates de Barrière, Geminiani ou Vivaldi, après les 6 Suites pour violoncelle tous parus chez Alpha, revoilà l’artiste pour un enregistrement programmatique très personnel, cheminement intellectuel que Bruno Cocset décrit avec naturel et candeur dans le livret, autour de la Guerre de Trois.
Cheers !
Janvier 2009. Pour son CD catalogue 2009, Alpha a choisi cet enregistrement très typé des Witches qui en surprendra plus d’un. En effet, dès les premières mesures, l’on comprend clairement pourquoi Nobody’s Jig relève de la collection les Chants de la Terre (jaquette blanche) et non de Ut Pictura Musica (jaquette noire).
Concerts à deux violes inégalables
Voici une critique bien tardive et que nous avions prévu pour l’été. Mais l’écoute de ce monument discographique de près de huit heures méritait bien qu’on prenne le temps nécessaire, et il eut été malhonnête de chroniquer cette intégrale unique des Concerts à deux violes esgales de Sainte-Colombe (sans doute le Parisien Jean de Sainte-Colombe comme les recherches de Jonathan Dunford tendent à le prouver) sans en avoir admirer toutes les facettes.
Ah, la délicieuse saveur des compotes maison…
On avait découvert il y a quelques mois de cela le confort tendre de l’interprétation au virginal des pièces extraites du Manuscrit Susanne van Soldt. Pour mémoire, ce recueil comporte 33 arrangements de chansons profanes, de danses et de psaumes qui constituent l’une des sources les plus précieuses de la musique quotidienne néerlandaise de cette époque.
De l’art de la sanguine et du pastel…
Peut-on mieux dire que Marianne Muller qui nous invite à nous perdre dans les méandre d’une galerie de compositeurs ? Galerie au sens de musée, de collection particulière, de cabinet des curiosités dont l’heureux maître des lieux vous entrouvre la porte, et vous guide avec passion parmi les merveilles qu’il a rassemblées.