Antonio VIVALDI (1678-1741)
Concerti per viola d’amore
Concerto en ré mineur RV 394
Concerto en la majeur RV 396
Concerto en ré majeur RV 392
Concerto en ré mineur RV 393
Concerto en la mineur RV 397
Concerto en fa majeur RV 97
Concerto pour viole d’amour et luth en ré mineur RV 540
Europa Galante
Fabio Biondi, viole d’amour et direction
77’13, Virgin Classics, enr. 2007
[clear]De la famille des violes, celle dite « d’amour » est sans doute la moins connue. Créé vers la moitié du XVIIe siècle, cet instrument possède une sonorité bien particulière résultant du fait qu’il est accordé en « accord parfait ». A la fin du Seicento, six cordes métalliques passant sous la touche lui furent ajouté, réverbérant en quelque sorte les vibrations des cordes jouées, d’où leur nom de cordes sympathiques (car elles vibrent par sympathie, sans être touchées par l’archet), conférant à la viole d’amour un timbre très particulier. D’un auditeur à l’autre, l’un trouvera le son nasillard, le second sensuel, le troisième mystérieux, tant il est vrai que ces sonorités sont surprenantes et indéfinissables.
Composés entre 1720 et 1740, ces huit concertos constituent l’ensemble du corpus que Vivaldi consacra à la viole d’amour. Ils s’inspirent aussi bien sur des danses nobles (RV 395) que populaires (RV 392, RV 394), et sont marqués par des puissants contrastes d’accentuation. Rien n’est plus agréable à entendre que le jeu ductile et vif de Fabio Biondi, incroyablement visuel. Ainsi, dans l’Andante du concerto en la majeur la voix de l’instrument, s’élève, timide au départ, puis rayonnante à la fin, pareille à l’oiseau qui découvre la nouvelle nature après un rude hiver et qui, tout émerveillé, n’ose s’y aventurer. Certes, la viole d’amour laisse parfois un sillage grinçant, un rien métallique, mais on se vite laisse aller à la poésie de ses cordes peu puissantes et délicatement feutrées. Biondi navigue sur les dissonances et les harmoniques de son instrument caractérisée par un son très tendu, et insiste sur l’aspect mélancolique et douloureux, sans excès de flagellation. Cette atmosphère lancinante convient parfaitement à des compositions très majoritairement écrites en mineur. Dans le concerto pour luth et viole d’amour (RV 540), écrit en l’honneur de la visite du Prince Electeur de Saxe Frédéric Auguste II, le luth de Giangiacomo Pinardi adoucit de ses accords le son de la viole d’amour et les deux instruments dialoguent avec complicité, soutenus par un Europa Galante en sourdine. L’œuvre est d’autant plus touchante qu’il s’agit d’une des dernières que composa Vivaldi. Pendant tout le programme, l’orchestre, précis et homogène, affiche une grande sûreté dans les départs. Les tempi sont bien contrastés, l’impression d’ensemble un brin triste, rêveuse et doucement souriante.
Instrument pastel, la viole d’amour ne produit pas de son miroitant. Elle garde toujours en elle une pointe d’acides regrets, même dans ses accords les plus brillants. C’est ce qui fait son charme, et celui de cet enregistrement bien équilibré où l’espace d’un moment Fabio Biondi a abandonné son violon, pour notre plus grand bonheur.
Isaure d’Audeville |
Technique : le son de la viole n’emplit peut-être pas suffisamment l’espace mais cela préserve le caractère intime de l’instrument.
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