La palme pour Cléopatre
Giulio Cesare se signale comme l’œuvre la plus monumentale et la plus brillante de Haendel, dans laquelle les arias da capo tubesques, perles du répertoire baroque, s’enchaînent à un tel rythme qu’ils semblent rebondir les uns contre les autres pendant près de quatre heures ! L’Egypte des derniers Ptolémées et de la fin de la République romaine constitue l’écrin exotique de cette intrigue politico-amoureuse où se déchaînent fantasmes, trahisons et inévitables rebondissements en tous genres.
Le baroque américain, entre Broadway et Hollywood…
Prenez deux pièces de Shakespeare (La Tempête et Le Songe d’une nuit d’été), soigneusement mélangées pour le livret, des extraits d’airs de Purcell, Haendel, Campra, Vivaldi et Rameau (et de quelques autres compositeurs baroques moins connus : Leclair, Rebel, Ferrandini) tous transposés en anglais
Vivaldi le Viennois
Cherchant à relancer sa carrière sous de nouveaux cieux, Antonio Vivaldi quittait en mai 1740 la Lagune pour Vienne, où il comptait de nombreux protecteurs, et pouvait s’enorgueillir de la faveur de l’Empereur Charles VI. Il emportait avec lui ses dernières partitions, dont celle de l’Oracolo in Messenia, créé en 1738 au Teatro s. Angelo.
Rendez-nous les antiennes !
La surprise est de taille : l’intégralité des Vêpres à la Vierge de Monteverdi contenues, contraintes, comprimées, retenues dans un CD simple. On se frotte les yeux en se demandant d’abord si la technologie du CD n’a pas fait un bond pour l’humanité ou si Christina Pluhar ne s’est pas laissé aller à des coupes franches par rapport à l’édition de Venise, dédiée à Paul V en 1610…
Festival pour deux contre-ténors
A côté des prestigieuses (mais coûteuses !) créations d’opéras, l’Italie baroque connut un foisonnement de cantates profanes et duos de chambre, émanant souvent des mêmes compositeurs. Qu’on en juge : plus de trois cents cantates de chambre pour le seul Bononcini, et plus de sept cents à l’actif du maestro Scarlatti !
Curarum Levamen
Une pochette au graphique minimaliste (un bel homme sur fond rouge, cela ressort très bien), la promesse de sonates écrites pour clavecin exécutée sur un piano moderne japonais… voilà de quoi intriguer le ou la mélomane qui furète dans les bacs à la recherche de disques baroques classiques, s’il n’est pas déjà un inconditionnel du pianiste…
« Je suis perdu des songes qui me viennent » (Jacques Amyot)
Janvier-Février 2011. Certains – et cela inclut d’éminents membres de notre rédaction -, certains trouveront que cette Muse du Mois se révèle trop convenue et trop prévisible, tout comme le dernier récital de Philippe Jaroussky. Que la formule du récital est trop fragmentée, sorte de best-of ou de mise en bouche à laquelle manque la rigueur d’une belle intégrale d’un opéra de Caldara qu’on attend encore…
“Le neuvième travail consista à rapporter la ceinture d’Hippolyté… » Apollodore, II, 5, 9.
Rome est pour nous actuellement le siège immuable de l’antiquité impériale et de la pourpre pontificale si ce n’est aussi les bacchanales nocturnes et aquatiques d’Anita Eckberg sous la lunette immortelle de Federico Fellini. Outre les sursauts du feuilleton Berlusconien ou bien la magnificence des fontaines et des palazzi, Rome porte en elle l’héritage de sa couronne de capitale du Baroque.
"Le nez de Cléopâtre, s’il eût été plus court, toute la face de la terre aurait changé." (Blaise Pascal, Pensées)
Disons d’emblée que l’exercice auquel se livrent Natalie Dessay et Emmanuelle Haïm en nous proposant ce récital des airs de Cléopâtre s’avérait périlleux. En effet le flamboyant chef d’œuvre du Caro Sassone a déjà fait l’objet de plusieurs intégrales de grande qualité, et il comporte des airs redoutables même pour une soprano aguerrie.
On the road
Mai-Juin 2010. Que peux contenir un luxueux digipack, doté d’un livret de 79 pages, et d’un généreux DVD bonus ? La dangereuse récidive de l’Arpeggiata de Christina Pluhar, soucieuse de poursuivre son voyage à travers les cultures, qu’il s’agisse des genres ou des continents.
« L’art d’utiliser le feu »
Voici une période faste pour les vivaldiens, puisqu’après le magnifique récital de Magdalena Kozena (Archiv), vient celui de Vivica Genaux, à l’interprétation plus extravertie et (encore plus) spectaculaire. Depuis Prométhée, le feu a obsédé l’imaginaire humain, un élément incontrôlable, fougueux, irascible mais réconfortant et beau.
Il n’en fait qu’au quintette
Europa Galante nous propose pour la troisième fois de goûter au lyrisme sensuel de Boccherini, compositeur virtuose et prolixe que l’on apprend peu à peu à découvrir et à apprécier. Au service de l’Infant d’Espagne Don Luis, frère cadet de Charles III, il composa plus de 170 œuvres, intégrant trios, quatuors et sextuors à cordes à une perpétuelle production de quintettes.
Une Résurrection au souffle de vie
C’est pendant son séjour à Rome et sous la généreuse protection du marquis Ruspoli que le Caro Sassone composa cet oratorio. La création le dimanche de Pâques 1708 donna lieu à une mise en scène digne d’un opéra, avec des décors peints, et un orchestre de dimensions exceptionnelles pour l’époque (vingt et un violons, soit plus de quarante-cinq musiciens au total).
Douceur de vivre…
Entre Haendel et Mozart, le public de l’opéra avait oublié tout ce qui s’était composé. Nul ou presque ne se souvenait de Grétry ou du dernier fils de Bach si ce n’est pour le premier d’avoir été l’auteur de mignardises pour Marie – Antoinette et pour l’autre d’avoir été le fils préféré du maître absolu et d’avoir eu une réputation de séducteur.
Monteverdi, cheek to cheek
Avril 2009. Voilà un enregistrement qu’on aime ou qu’on quitte. Un enregistrement qui flirte allégrement avec le jazz, qui use et abuse des syncopes et d’une attitude nonchalante et détendue. Où l’Italie du XVIIème siècle s’oublie dans les cabarets d’outre-Atlantique. Cette vision, qui nous avait seulement partiellement convaincus en concert, réussit étonnamment son passage au disque, sur un théâtre d’amour d’une rare finesse, où la poésie affleure, et où il fait bon skater.
"Seigneur, vous entendez. Gardez de négliger Une amante en fureur qui cherche à se venger." (Racine, Andromaque, acte IV, scène 6)
Joyce DiDonato a l’air plus rêveuse que furieuse sur la jaquette du disque. Un brin pensive, les yeux timidement levés au ciel, la mezzo se prend la tête dans les mains, se demandant peut-être ce qu’elle a fait au cours des 75 minutes de ce premier récital d’airs italiens et anglais bien rempli.