Rechercher Newsletter  - Qui sommes-nous ? - Espace Presse - FAQ - Contacts - Liens -   - Bookmark and Share

 

mise à jour

6 janvier 2014

Editorial

Brèves

Numéro du mois

Agenda

Critiques CDs

Critiques concerts

Interviews

Chroniques 

Tribune

Articles & Essais

Documents

Partitions

Bibliographie

Glossaire

Quizz

 

 

Chronique Festival

 

"Tous les chemins mènent à B.A.C.H."

Les Parodies organisées, Michel Alabau

 

 

© Michel Roubinet
 

"Tous les chemins mènent à B.A.C.H."

Transcriptions pour grand orgue et cordes d'œuvres d'Haendel, Corelli, Albinoni et Bach

 

Ensemble les Parodies Organisées dont :

 

Marie Poillion, Orlando Fanette, Clarisse Rinald, Axelle Girard (violons) ; Camille van Essen, Marie Weisse (altos), Claire Lamquet (violoncelle), Alice Cota (viole de gambe), Sylvie Reynaert (percussions), Irina Dansina (clavecin)

 

Michel Alabau (orgue et direction)

 

Festival Toulouse les Orgues, 4 octobre 2008, Eglise-Musée des Augustins, Toulouse.

 

horizontal rule

Bach ne s'est pas bâti en un jour

Il y a d'abord la magie du lieu. Le convent des Augustins baigné dans la pénombre, puis sa grande nef ornée de tableaux baroques et ce grand orgue, de facture récente, mais fidèle au modèle germanique de l'époque qui nous intéresse, vaste grimoire ouvert aux pages comme suspendues en l'air, offrant au public l'étreinte de ses pastels rinceaux.

On frémit à l'intitulé du redouté programme d'un ensemble non moins téméraire. En effet, les Parodies Organisées se sont spécialisées dans la transcription d'œuvres pour orgue et cordes. Certes, l'on sait que la pratique de la parodie stricto sensu - c'est-à-dire la réutilisation d'une œuvre dans un autre contexte souvent par le même compositeur avec les ajustements nécessaires - était courante à l'époque baroque. L'Oratorio de Noël de Bach comprend ainsi de nombreux airs et chœurs issus de ses cantates profanes, Vivaldi a transformé en chœur un mouvement des Quatre Saisons dans sa Dorilla in tempe, Haendel réutilisé un de ses airs allemands dans la deuxième version du Giulio Cesare, etc. L'on sait que les compositeurs et les interprètes de l'époque transposaient beaucoup. Pour prendre l'exemple de Bach, ses concertos pour clavecin comprennent des transcriptions de concertos pour violon de Vivaldi et d'autres concertos pour violon ou pour hautbois, sans mentionner le Psaume 51 fortement "inspiré" du Stabat Mater de Pergolesi. De même, d'Anglebert a bien réduit au clavecin des ritournelles de Lully, Forqueray le fils transcrit pour le clavecin les pièces de violes de son père. Mais dans tous ces cas de figure, la transcription était réalisée par un compositeur du temps, et ne choque donc pas le puriste ou le musicologue. C'est donc avec appréhension que nous attendions ce concert, avec l'espoir qu'il serait fidèle à l'esprit sinon à la lettre.

Le programme débute par une Water Music méconnaissable, et sans doute le maillon le plus faible d'une soirée intéressante bien qu'inégale. En effet, jouer cette œuvre martiale et de plein air (quoique Haendel réussit à adjoindre des cordes en dépit du souhait du Roi) qui réunissait cuivres et bois avec une dizaine d'instrumentistes et un grand orgue paraît au mieux un oxymore, au pire un contresens. Et rien n'y fait, malgré l'entrain d'une paire de timbales au peu caverneuses, et les registrations inventives de Michel Alabau (dont on saluera le rendu du contraste entre les trompettes et les cors naturels dans l'original). En outre, l'orchestre, constitué de jeunes talents, a pris du temps pour s'échauffer, le coup d'archet hésitant à s'envoler, les départs pas toujours bien nets, avec quelques soucis de diapason ou d'accord.

Puis vint le Concerto per la Notte natale de Corelli, à la renommée justement méritée. Et là, le miracle se produit : dialogue des timbres très "concerto grosso" entre l'orgue et l'orchestre, orgue fruité et enthousiaste, ampleur du tapis de cordes, élégance des articulations et clarté des lignes. Alabau y dénote une vision équilibrée, vive et sans excès, qui rappelle par son phrasé très rond les anglais comme Hogwood ou Pinnock. S'il ne faut retenir qu'un moment, ce sera un Adagio suspensif, doucement murmuré au positif (car un grand orgue sait susurrer, n'en déplaise aux incrédules abonnés aux souffreteux orgues de chambre portatifs). Le reste du concert s'est déroulé sans parvenir vraiment à renouer avec la poésie entrevue chez Corelli enchaînant sur un concerto albinonien enlevé à la transcription moins complexe où l'orchestre a manqué de cohésion et de vaillance, de sympathiques mouvements des Brandebourgeois, et enfin la difficile fugue BWV 577, cette fois-ci transcrite à l'envers (de l'orgue seul à l'orgue cerné par l'orchestre).

Généralement, ces chemins bachiens ont permis d'admirer le jeu ductile et naturel de Michel Alabau, visiblement très à l'aise dans ce répertoire, avec un choix très pertinent de registrations colorées. L'accompagnement complice des Parodies organisées s'est avéré enthousiaste bien qu'un peu vert, à la fois appliqué et souriant malgré l'hétérogénéité des instrumentistes. Peut-être est-il aussi dû à la difficulté de coordonner les musiciens quand le chef est invisible, perché en haut de la tribune d'orgue à plusieurs pieds au-dessus du sol ? On regrettera aussi que le premier violon n'ait pas opté pour un violon baroque, et que sa sonorité comme son jeu contrastaient parfois fortement avec le reste de l'ensemble, attaché à un style d'interprétation plus historique. Touchons un mot enfin du continuo d'où se distingue la viole légère d'Alice Cota avant de souhaiter une excellente continuation à ce charmant aréopage iconoclaste et prometteur.

Viet-Linh Nguyen

Voir aussi :

 

3 octobre 2008 : "Trionfi Sacri" : Missa in illo tempore de Monteverdi, Motteti & Canzoni de Gabrieli, Solistes et Orchestre de la XVème Académie baroque européenne d'Ambronay, dir. Jean Tubery

horizontal rule

 

Vers les autres chroniques de concerts

 

 

 

 

Affichage recommandé : 1280 x 800

Muse Baroque, le magazine de la musique baroque

tous droits réservés, 2003-2014