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mise à jour 6 janvier 2014
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Chronique Festival
Festival d'Ambronay 2010
Samedi 18 Septembre : Ensemble Estampes Gemma Bertagnolli, Europa Galante, dir. Fabio Biondi
Cloître d'Ambronay © Muse Baroque, 2010
© Festival d'Ambronay, 2010
"Cartes blanche aux jeunes ensembles"
Jean-Philippe Rameau 3ème et 5ème Concerts des Pièces de clavecin en concert
Marin Marais Sonate à la Marésienne
Yoju-mi Kawori Keihatsu (Bruges, 2009)
Ensemble Estampes : Yoko Kawakubo, violon Myriam Rignol, viole de gambe Julien Wolf, clavecin Samedi 18 septembre, 17h, Tour Dauphine, Ambronay. Les premières notes sont douloureuses, et l’on réprime un sourcil étonné et interrogateur, en passant discrètement sur les sonorités sèches, le manque de liant, les articulations appliquées du trio, mené avec froideur par le violon extrêmement grinçant de Yoko Kawabuto. Ces insuffisances sont surtout présentes tout au long des deux premières œuvre : le Cinquième Concert des Pièces de clavecin en concert de Rameau et la Sonate à la Marésienne de Marais. Le "Très Lent" de cette dernière ne se révèle ni assez ample, ni suggestif, le continuo dynamique et rythmé de Julien Wolf assurant la cohérence d’ensemble. C’est heureusement à compter de la pièce étrange et contemporaine Keihatsu où les interprètes improvisent un parcours à partir de cellules musicales adjacentes que l’Ensemble Estampes prend son envol, gagnant nettement en musicalité et en assurance. La Sonnerie de Sainte-Geneviève du Mont de Paris permet de redécouvrir l’archet vif de Yoko Kawabuto avec un timbre plus chantant - quoiqu’un brin de raideur subsiste – et enfin un véritable échange avec la viole éloquente de Myriam Rignol. Enfin, le concert se termine – trop vite – sur le Troisième Concert des Pièces de clavecin en concerts de Rameau, interprété de manière incomparablement plus fluide et convaincante que le Cinquième concert qui introduisait le programme. On goûte ainsi une panoplie de portraits croqués avec justesse. Certes, "la Timide" accuse quelques problèmes dans les départs, mais "La Lapoplinière" d’une tendre espièglerie, premier moment d’abandon gracieux du jeune groupe, ou encore les "Tambourins" énergiques et fiers, tout comme les dansants Sauvages donnés en bis remportent l’adhésion et clôturent une prestation inégale mais qui s’est affirmée petit à petit.
Fabio Biondi & Gemma Bertagnolli © Festival d'Ambronay, 2010 "Vivaldi virtuose"
Antonio Vivaldi
Sinfonia Il Coro delle Muse Air "Destin avaro" (La Fida Ninfa) Concerto pour violon en ré majeur op.3 n°9 de l'Estro Armonico Air "Amato ben" (Ercole surl Termodonte) Sinfonia (Ercole surl Termodonte)
Concerto pour 2 violons op.3 n°8 de l'Estro Armonico Concerto pour violon en la mineur RV 357 (La Stravaganza) Concerto pour violon en fa majeur RV 284 (La Stravaganza) Mottetto "In Furore" RV 626
Gemma Bertagnolli (remplace Vivica Genaux souffrante) Europa Galante Direction Fabio Biondi
Samedi 18 septembre 2010, 20h30, Abbatiale d'Ambronay Abandonnant en quatrième vitesse notre enregistreur et notre gros carnet après l’interview que Fabio Biondi nous a accordée, nous plongeons dans la nef de l’Abbatiale, évitant de renverser les caméras d’Arteliveweb qui scrutent avec impatience la scène. Les musiciens prennent place, et voici Europa Galante en terrain conquis, balayé avec passion et nonchalance, énergie et détente. Ces doubles-croches, ces traits acérés qui sont autant de flagellations souriantes, ce balancement mélodique un peu dandy ont fait la gloire et la marque de fabrique de l’ensemble. Bien sûr certains s’offusqueront de la facilité du répertoire, s’indigneront de réflexes interprétatifs outrés et racoleurs. Mais il y a au-delà du jeu et de la lumière, de la légèreté joueuse et théâtrale une part de discours et d’éloquence indéniable. Pour être tout à fait franc, on avouera que la Sinfonia introductive, d’une vivacité crémeuse, dotée d’un Andante sur fond de clapotis de pizzicati n’était pas forcément des plus inspirée en dépit de l’excellence du rendu. Mais l’humaine fragilité du violon de Fabio Biondi s’est révélée soudainement dans le Concerto n°9 de l’Estro Armonico, ample et rond, très différent de la lecture au disque (Virgin). L’Allegro solaire et assuré, surmonté d’une pointe de violon très clair (le nouvel Amati n’a plus les aigus déchirants de l’ancien instrument), un Larghetto très intime, poignant et lancinant, presque douloureux tel un soupir entrecoupé de spasmes alors que la ligne flanche, vacille, trébuche, repart en titubant. Et l’on songe au premier violoncelle de l’orchestre, à cet ami de tant d’années, désormais dans un état de santé critique qui bouleverse l’ensemble.
Fabio Biondi & Gemma Bertagnolli © Festival d'Ambronay, 2010 Les autres pièces instrumentales, brillantes, ne renoueront pas avec ce charme presque dérangeant d’une âme qui s’épanche. On notera cependant l’Allegro bouillonnant d’Ercole sul Termodonte, les attaques cinglantes de l’Allegro du Concerto n°8 pour 2 violons de l’Estro Armonico, l’Allegro robuste et familier du RV 357 qui fait suite à un Grave à la mélodie sinueuse. Le versant vocal du concert a été réduit en raison du remplacement de dernière minute de Vivica Genaux par Gemma Bertagnolli. "Destin avaro" souffre d’une acoustique diffuse qui retient la projection moyenne de la mezzo en dépit d’une superbe agilité dans les coloratures. "Amato ben" s’avère plus expressif, la virtuosité cédant le pas à l’attrait mélodique et à l’écriture souple du Prêtre Roux. C’est dans le motet "In Furore", accompagné d’un tapis de cordes sombres et compactes, que Gemma Bertagnolli (avant un bis mémorable dont on parlera quelques lignes plus tard) révèle des timbres très différenciés en fonction des registres : de la profondeur grainée des graves aux aigus flûtés. L’Alleluia surrempli de mélismes est pris à un tempo d’une ivresse effrénée. Et enfin vient le bis, tiré de l’air final et mélancolique "Tu del ciel" d’Il Trionfo del Tempo e del Disinganno de Haendel, dédié au violoncelliste souffrant. Le violon presque timide et murmurant, la soprano chancelante, la ligne imprévisible, parfois hachée font pâlir la partition alors qu’une émotion palpable étreint les artistes comme le public. Les applaudissements nourris et les remerciements à une chanteuse en larmes parachèvent ce concert singulier, où les marbres de la lagune se sont dissimulés avec sensibilité et pudeur dans les brumes de l’hiver naissant.
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Affichage recommandé : 1280 x 800 Muse Baroque, le magazine de la musique baroque tous droits réservés, 2003-2014
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