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2 janvier 2014

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LA TRIBUNE BAROQUE

Avril 2011

 

 

Andrea Verrocchio (1435-1488), statue équestre de Bartolomeo Colleoni, capitaine-général de Venise

© Muse Baroque, 2010

 

Chaque numéro, la Muse vous propose un parcours baroque à travers les arts extra-musicaux, de l'architecture à la sculpture, de la peinture à la poésie, laissez-vous emporter dans la flânerie du songe d'une nuit d'été, car si la Muse traite de la musique avant toutes choses, elle ne délaisse pas ces dernières.

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Architecture : Coup de cœur pour... le Château de Courances

© Muse Baroque, 2011

Halte-là, va s’écrier immédiatement le lecteur soucieux de minutie historique, car si la bâtisse d’origine avait été construite au milieu du XVI° siècle, les remaniements opérés au XIX° siècle la rendent suspecte en terme d’authenticité.

Mais laissez là votre méfiance, qui pourrait être justifiée dans bien des cas, mais pas à Courances. Prévoyez plutôt de vous rendre en ses lieux une fraîche après-midi d’avril, par exemple, après une giboulée qui a rendu l’atmosphère humide, pimpante et odorante. Franchissez le petit pavillon d’entrée : vous arrivez sur la grande allée pavée bordée de deux canaux de part et d’autre, dans lesquels se reflètent deux rangées d’arbres aux branches allongées au-dessus de l’eau. Face à vous, au bout de la perspective, le château, régulière masse où ressortent les briques rouge-rose et le bleu foncé des ardoises de la toiture. Déjà, le charme opère, vous êtes saisis par la magie enchanteresse des lieux, son calme lénifiant rompu seulement par les trilles de nombreux oiseaux.

Avancez jusqu’à la cour, flanquée de deux ravissants pavillons : certes le portail d’origine a disparu, mais ainsi le château se trouve désenclavé, et séparé du parc uniquement par des douves peu profondes qui en font le tour. Vous pouvez choisir de visiter le bâtiment, dont on ne vous montrera que quelques belles salles – le reste étant privé car Courances est une propriété familiale.

Cependant, la beauté du parc demeure le point essentiel de cette visite. Dans cet univers tout minéral et végétal, les perspectives s’ouvrent largement, bordées de statues et de fontaines, sautant de bassin en bassin. Autour de la maison s’épanouissent quelques massifs de fleurs aux couleurs vives, répondant à celle du château, tandis qu’un magnifique jardin japonais rutile au bout d’une allée latérale. Mais le reste du parc... une splendeur où se déclinent et se marient toutes les teintes de gris, beige et vert, reflétées dans les miroirs d’eau tantôt lisses, tantôt frémissants des longs canaux.

La terre de Courances fut acquise en 1548 par Cosme Clausse, Secrétaire d’Etat de Henri II, qui estima opportun de s’établir en une demeure voisine de celle du roi à Fontainebleau. Le château, fortifié à l’époque, fut bâti sur les indications du maçon Gilles Le Breton, qui travaillait également à Fontainebleau ; et la décoration intérieure fut exécutée par un élève du Primatice, Nicolo del Abbate. Les belles sources du domaine, savamment captées et aménagée, en faisaient déjà tout le prix et la beauté. Le roi Louis XIII y séjourna, enfant, en 1606, et fréquemment dans les années 1620 et 1630. Au milieu du XVIIème siècle, le château subit quelques transformations architecturales, voulues par la nouvelle famille de propriétaire, les Gallard. Ils y reçurent en 1678 la Marquise de Sévigné qui se rendait à Vichy pour y soigner ses rhumatismes. Par le jeu des diverses successions et alliances matrimoniales, le domaine échût à la famille de Nicolay à la fin du XVIII° siècle. Pendant la période révolutionnaire, le chef de famille et son fils aîné furent décapités et le château peu violenté mais mis sous scellés. Il ne revint dans la famille qu’en 1795, qui y resta peu.

Après quelques décennies d’abandon, le baron de Haber, banquier fortuné, devint acquéreur d’un château délabré et d’un parc redevenu sauvage. Aidé par l’architecte Hippolyte Destailleur et par le paysagiste Achille Duchêne, le nouveau propriétaire consentit de grands efforts pour rendre au château et au parc leur lustre d’antan, en y ajoutant au passage quelques "améliorations" architecturales qui finalement ne déparent pas de l’ensemble – ainsi cet escalier du porche à double révolution copié sur celui de Fontainebleau qui confère à la façade un certain cachet.

Voici le site officiel du château : http://www.courances.net  qui, certes bien illustré, ne remplacera jamais une visite...
Un bel ensemble d’aspect Louis XIII, qui servit de décor principal au - joli - film de Laurent Tirard, Molière (2006) (Ah, voir Romain Duris, toute soutane relevée, courir dans les allées du parc, poursuivi par un gros chien noir, passer par une fenêtre du rez-de-chaussée en un extraordinaire vol plané, et atterrir aux pieds de Laura Morante, impavide et ironique...).

H.T.

 

Mobilier : "Louis XIV ? Pas encore, mon fils..."

Cette série de notes n’aura pas vocation à présenter tableau exhaustif des différentes formes stylistiques du mobilier domestique au XVII°siècle, mais plutôt de présenter un aperçu du décor dans lequel évoluaient les compositeurs que nous étudions, ainsi que leurs interprètes et auditeurs contemporains.

Cabinet dit de l'Odyssée, 1ere moitié 17e siècle © RMN (Château de Fontainebleau) / Jean-Pierre Lagiewski


Le style Louis XIII (1)

Comme sous la Renaissance, le mobilier du début du XVIIème siècle se réfère encore aux formes architecturales issues de l’Antiquité. L’Italie demeure un modèle que l’on imite, et de surcroît, forte est l’influence de Marie de Médicis, mère de Louis XIII, et de son ministre Mazarin, qui protègent et commanditent, à la cour de France, des artistes de leur pays. D’Italie, on importe également des marbres, des étoffes, des miroirs et des verreries. D’autre part, les pays protestants des provinces du Nord (Flandres, Pays-Bas...) exportent aussi leur goût et leurs artistes, et surtout certaines techniques, notamment en matière d’ébénisterie.

Ce qu’on appelle le "style Louis XIII", et qui déborde en réalité largement du règne de celui-ci (1601 – 1610 - 1643) apparaît comme un mélange de ces différents apports. La forme générale des meubles est souvent compacte ; les lignes, plutôt sévères, en sont architecturées et géométriques. Ces meubles massifs peuvent être abondamment sculptés d’élément de faune et de flore : roses, tulipes œillets, têtes de lions stylisées...

Par ailleurs, la mouluration tend à s’imposer sur les meubles dépouillés et sobres. A cette époque apparaît une nouvelle corporation d’artisans du meuble : les tourneurs, qui produisent de nombreux éléments du mobilier. On utilisait divers modèles de tournage : en chapelet, en spirale, en balustre ; les toupies et les poires qui ponctuent traverses et entretoises.

Le mobilier bourgeois, plus "lourd" d’aspect, fut évidement plus répandu ; cependant, parallèlement à cette production plus courante, fut fabriqué un mobilier infiniment plus luxueux réservé à une élite, et qui faisait déjà l’objet de collections. Les cabinets sont les plus représentatifs de ces meubles. Les placages d’ébènes furent employés dès le début du XVIIème siècle ; on utilisa par la suite des matériaux plus variés où bois exotiques, métaux, pierres semi-précieuses et écailles s’associaient en des compositions reprenant les principes architecturaux.

H.T.

 

Cinéma : la tiare et le pinceau

L'Extase et l'agonie
The Agony and the Ecstasy


1965 - Etats-Unis  - 2h18 , réalisation : Carol Reed
Charlton Heston (Michel-Ange), Rex Harrison (le pape Jules II)

"Il peindra ou il sera pendu !"

1508, entre deux batailles, le Pape Jules II - qui a perdu sa barbe mais non sa superbe sous les traits césariens de Rex Harrisson qui retrouve une caractérisation impérieuse proche de l'ironie mordante de son conquérant antique de chez Mankiewicz - commissionne Michel-Ange afin de repeindre le plafond de la Sixtine. En dépit de quelques inexactitudes historiques (par exemple la présence des fresques latérales d'Arrigo Paludano et Matteo da Lecce alors qu'elles n'étaient pas encore peintes à l'époque de l'action, ou encore l'artiste peignant allongé perché sur son échafaudage massif) et de quelques fonds maladroits en trompe-l'œil représentant l'avancement des travaux de Bramante à Saint-Pierre-de Rome, force est d'admirer l'opulence de la reconstitution - notamment cette Sixtine en devenir reconstruite fidèlement à Cinecittà - et la beauté des costumes, tant des tenues ecclésiastiques que militaires. Rarement avant le Métier des Armes d'Olmi avons nous vu traité avec tant de probité les admirables armures d'apparat.

Mais l'essentiel n'est naturellement pas là, et après un premier quart d'heure un peu lourd, scandé par une musique digne de Ben-Hur (pour que Charlton Heston monolithique et bougon ne soit pas dépaysé ?), l'intégralité du film repose sur l'admirable et cinglant jeu d'acteurs entre un Pape despotique amoureux des Arts, défendant son territoire contre les invasions françaises, et un artiste perfectionniste et tourmenté, génial et désobéissant. La gouaille majestueuse du Pape s'oppose ainsi à l'insubordination bornée de son talentueux serviteur, en une succession de séquences d'une théâtralité accentuée par des dialogues littéraires, que certains aujourd'hui considèreront comme peu naturels, mais qui demeurent superbement troussés et délivrés avec conviction de "Comment oses-tu marchander avec ton souverain pontife ! (...)" à "j'avais prévu un plafond, il a conçu un miracle".

On citera dans ce long-métrage à grand spectacle (filmé en Todd-AO 2:20 s'il vous plaît) - qui paradoxalement s'envole davantage au cours des échanges intimistes - plusieurs séquences d'anthologie comme celles où le Pape se faufile nuitamment en catimini dans sa Chapelle pour admirer "son" plafond et se fait surprendre par l'artiste, ou encore celle où sur le champ de bataille Jules II se défait de sa cuirasse afin de pouvoir admirer les esquisses du sculpteur dont il a voulu faire un peintre, alors que pleuvent les boulets. Et alors que le film s'achève en 1512 sur la Sixtine dévoilée et un public peu attentif à la cérémonie liturgique, on ne peut que sourire tandis que le Pape Jules se demande malicieusement s' "il ne faudrait pas faire quelque chose pour le mur décrépi au-dessus de l'autel". Ce vœu sera exaucée par une commande de son successeur Clément VII. La direction de Carol Reed est étonnamment conventionnelle pour le maître du Troisième homme, et le spectateur s'approchera plus de l'extase que de l'agonie à la vision de ce film injustement oublié.

 

Bande-annonce pompeuse de l'époque (1965) © 20th century Fox

V.L.N.

 

Anciennes Tribunes

La Tribune de Janvier 2011

 

La Tribune de Mars 2011

 

 

 

Affichage recommandé : 1280 x 800

Muse Baroque, le magazine de la musique baroque

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