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Une façade peut en cacher une autre

“La façade de l’église des Blancs-Manteaux en 1865”. Huile sur toile. Paris, musée Carnavalet.

Le promeneur du Marais parisien ne s’est-il jamais demandé pourquoi la façade de l’église des Blancs-Manteaux semblait un bien grosse calotte pour une petite tête, pour paraphraser une pique acerbe du Bernin ? Elle ne manque pourtant pas d’allure, cette belle façade à la romaine, avec ses trois travées, ses pilastres doriques et ioniques, son fronton un peu aplati sculpté d’une Gloire et d’anges. Certes, à Rome, les ressauts auraient été plus marqués, des pots à flammes ou pyramidions auraient couronné le tout, et quelques niches et statues auraient égayé d’un baroque mouvement cette façade somme toute sévère et sobre. Mais c’est parce que la mariée a emprunté sa robe.

Façade inachevée de l’église des Blancs-Manteaux, gravure de Michel d’après le dessin de Garneray, extraite des Antiquités Nationales de Millin (Tome 4, 1792)

L’ancien couvent des Blancs-Manteaux menaçant ruine, on le reconstruisit entre 1685 et 1690, ainsi que l’église qui change alors d’axe ce qui pousse à détruire des vestiges de l’enceinte de Philippe Auguste. Ainsi, en 1685, la première pierre du nouvel édifice est posée par Michel Le Tellier et l’église devait être reconstruite par Charles Duval sur les plans de Dom Antoine de Machy. Mais comme souvent l’argent vint à manquer. La façade sud de l’église ne sera jamais achevée. En 1863, Baltard (celui des Halles) agrandit l’église d’une travée au sud et d’un bas-côté à l’est pour lui accoler la façade que l’on connaît. Il s’agit de celle démontée et déplacée de l’église des Barnabites dite aussi église Saint-Éloi (à ne pas confondre avec l’église Saint-Martial toute proche mais détruite dès 1722), sise sur l’île de la Cité sur une parcelle étriquée entourée d’immeubles, due à l’architecte Jean-Sylvain Cartaud (1675-1758). Cette église dut être démolie en 1858 au moment du percement du boulevard du Palais et l’emplacement est actuellement en partie occupé par la Préfecture de Police, le sabre chassant le goupillon. Des fouilles eurent lieu en 2003 permettant d’exhumer une pierre tombale, des éléments médiévaux de remploi dans les fondations, ou encore des vestiges gallo-romains. [M.B.]

Vue générale du chantier de fouilles de l’église des Barnabites en juin 2013. Niveaux successifs : zone romaine, terre agricole du cloître avec une pierre tombale encore en place, début du chœur, extrémité de la nef – Source : Wikipedia

Étiquettes : , , Dernière modification: 24 février 2023
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