Rédigé par 21 h 58 min CDs & DVDs, Critiques

Fantaisies (Mr Charles the Hungarian, Irish Baroque Orchestra, Whelan – Linn)

« Mr Charles the Hungarian. Handel’s Rival in Dublin »

Georg Frederic Hændel (1685-1759)
Ouverture d’après Il Pastor fido HWV 8 c
« Va tacito » extrait de Giulio Cesare HWV 17 arrangement John Walsh (1709-1766)
Water Music ed. John Walsh : Allegro- Andante- Allegro ; Passepied ; Menuet ; Bourrée ; Hornpipe ; Andante ; Ouverture ; Alla hornpipe
Concerto grosso en sol majeur HWV 314 op.3 N° 3

Johann Adolf Hasse (1699-1783) :

Concerto en fa majeur
Concerto op. 4 N° 1 Il Signora Barbarini’s minuet


Georg-Philipp Telemann (1681-1767) :

Napolitana TWV41 :B4 extrait de getreue Music Meister

Lorenzo Bocchi (?) :

Sonate X, extrait de Exercices musicaux pour la chambre

Mr Charles (v. 1705/10- ?1780 :

Suite 1 d’après 12 duos pour deux cors français

Jean-Baptiste Lully (1632-1687) :

Marche pour la cérémonie des Turcs du Bourgeois gentilhomme.

Irish Baroque Orchestra
solistes :
Miriam Kaczor, flûte
Michele Fattori, basson
Leo Duarte, hautbois d’amour

Direction Peter Whelan
1 CD Linn- Outhere CKD 718. Enregistré du 27 au 29 avril 2022 à St-Peter’s Church Drogheda Irlande, 64’52.

« La clarinette, le hautbois d’amour et le chalumeau n’ont jamais été entendus auparavant dans ce royaume »

Avec son Irish Baroque Orchestra, le chef et claveciniste Peter Whelan se plaît à élaborer des programmes originaux parcourant la musique, parfois négligée, du XVIIIe siècle, qui fut composée ou jouée sur son île. Il nous a déjà offert « Welcome home Mr Dubourg », « The Trial of Tenducci», consacré au castrat Tenducci et « The Hiberian muse» destinés aux particularités du baroque irlandais, qui s’inspirait des tendances en vogue en Angleterre, mais tenait à s’en démarquer, quelque peu par esprit d’indépendance ou plus prosaïquement selon les moyens disponibles.

Il s’intéresse ici au fantasque « Mr Charles le Hongrois », de son nom supposé Charles Vernberg, un corniste virtuose membre de la Royal Society of Musicians pendant les années 1730 et 1740, qui « fraichement arrivé de Paris », se fit entendre au Haymarket Theatre de Londres, ainsi qu’à Stamford, York, Dublin, Salisbury, Herreford et Manchester. Au début des années 1750, il fut imprésario d’un théâtre à Bristol. Spécialiste du difficile cor français, qui connaissait un engouement certain outre-Manche, il créa une très rentable école d’instruments à vent à Londres et Dublin.
À Dublin en 1742, il a profité de la « Haendelmania » en tentant de faire fortune avec des interprétations de la musique de Haendel, alors que le compositeur se trouvait en ville. Mr Charles organisa un concert au Smock Alley Theatre, composé principalement de musique de Haendel. N’oublions pas que bien qu’il obtint la nationalité anglaise, Hændel était très populaire en Irlande où il avait créé son Messie en 1741.

Selon l’usage de l’époque, les œuvres, solos et ensembles étaient destinées à faire briller les interprètes et les orchestrations variaient en fonction des effectifs et des instruments disponibles. L’audience était autant friande de timbres nouveaux que de performances instrumentales. Chaque interprétation était éphémère et unique, dans l’unique but de servir les besoins des musiciens plutôt que de chercher la postérité.

Le présent enregistrement recrée le programme et l’atmosphère bohème de l’événement, présentant des solos pour divers instruments, dont certains n’avaient, soi disant, jamais été entendus en Irlande auparavant. L’essentiel du programme est consacré à Hændel avec l’ouverture de Il Pastor fido, l’air « Va Tacito » de Giulio Cesare, où la flûte remplace la voix, orchestré par John Walsh, le Concerto grosso op 3 N° 3 et une interprétation de la première édition de la Water Music de Haendel par John Walsh, où la clarinette et le hautbois remplacent la trompette, agrémenté de pièces de Hasse, Telemann et Bocchi, où les vents ont la part belle, à l’exception de la Sonate X pour violoncelle de Bocchi, dont on ignore tout. John Walsh était un éditeur londonien, qui publié l’essentiel des œuvres de Hæendel dont il avait acquis l’exclusivité des droits dans les années 1730. Il fut également l’un des premiers éditeurs à publier et diffuser la musique provenant de l’important vivier dresdois, notamment celle de l’un de ses fleurons Johann Adolf Hasse. Une sonnerie de chasse pour deux cors de Mr Charles illustre les talents de compositeur du héros éponyme de ce programme, mais force est de constater qu’une infime partie de sa musique a été conservée. Enfin la célèbre Marche pour la cérémonie des Turcs du Bourgeois Gentilhomme de Lully où les clarinettes remplacent les hautbois, clôt ce concert franchement baroque aux couleurs particulières.

Sous la direction énergique et enthousiaste de Peter Whelan, l’ensemble est fort bien joué, avec des solistes d’une virtuosité avérée, même si l’ensemble manque de densité et de dramatisme. Un disque « de niche » peut-être, mais qui illustre agréablement la richesse et la belle diversité du baroque anglo-saxon. Comme à l’accoutumée chez le label Linn, la réalisation du digipack offre une présentation très soignée avec une notice (en anglais seulement) des plus instructives, signée par Emily Worththingyon.

Évariste de Monségou

Technique : enregistrement neutre, à la prise de son un peu sèche mais précise. 

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