Mozart, La Clémence de Titus,
Le Cercle de l’Harmonie, dir. Jérémie Rohrer
Théâtre des Champs Elysées, Paris, 12 décembre 2014
[clear]Wolfgang Amadeus MOZART (1756-1791)
La Clémence de Titus (1791)
Opera seria en deux actes, K 621
Livret de Pietro Métastase adapté par Caterino Mazzola, d’après Pietro Métastase
Kurt Streit (Titus), Karina Gauvin (Vitellia), Julie Fuchs (Servilia), Kate Lindsey (Sextus), Julie Boulianne (Annius), Robert Gleadow (Publius)
Leslie Menu, récitante (Bérénice, Racine, acte V, scène 7)
Mise en scène : Denis Podalydès
Décors : Eric Ruf
Costumes : Christian Lacroix
Chorégraphie : Cécile Bon
Lumières : Stéphanie Daniel
[TG name= »Chœur Ensemble vocal Aedes : »]
Sopranos : Agathe Boudet, Anne-Emmanuelle Davy, Judith Deroin, Angélique Pourreyron, Pauline Prot, Virginie Thomas
Mezzo-sopranos : Julia Beaumier, Elise Bédènes, Geneviève Cirasse, Marie Planinsek, Thi Lien Truong
Ténors : Paul Crémazy, Martin Jeudy, Anthony Lo Papa, Maurizio Rossano, Florent Thioux, Marc Valéro
Basses : Jean-Bernard Arbeit, Jérémie Delvert, Henri De Vasselot, Sorin Dumitrascu, Jean-Louis Georgel, Pascal Gourgand
Direction Mathieu Romano
[/TG]
[TG name= »Orchestre Le Cercle de l’Harmonie: »]
Violons I : Erian Dean, Marieke Bouche, Blandine Chemin, Gabriel Cornet, Saori Furukawa, Solenne Guilbert, Merel Junge, Sayaka Ohira
Violons II : Tami Troman, Karine Crocquenoy, Rebecca Gormezano, Pierre-Eric Nimylowycz, Martyna Pastuszka, Lilia Slavny, Mieko Tsubaki
Altos : Cécile Brossard, Marie Beaudon, Gilles Deliège, Maria Mosconi
Violoncelles : Jérôme Huille, Julien Barre, Pierre-Augustin Lay, Emily Robinson
Contrebasses : Benoît Van den Bemden, Gautier Blondel, Charlotte Testu
Flûtes : Anne Parisot, Amélie Michel, Benjamin Gaspon
Hautbois : Gilles Vanssons, Lidewei De Sterck
Clarinettes : Nicolas Boud (+ cor de basset), Emily Worthington
Bassons : Philippe Miqueu, Josep Casadella
Cors : Christian Binde, Christoph Thelen
Trompettes : Thibaud Robinne, Nicolas Isabelle
Timbales : Hervé Trovel
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Direction Jérémie Rohrer
Co-production Théâtre des Champs-Elysées/ Opera Théâtre de Saint-Etienne.
Représentation du 12 décembre 2014 au Théâtre des Champs Elysées, Paris
Après une version de concert donnée il y a un peu plus de deux ans sous la direction de Louis Langrée, le Théâtre des Champs-Elysées nous proposait en cette fin d’année une lecture très attendue, mise en scène par Denis Podalydès, avec des décors d’Eric Ruf et des costumes de Christian Lacroix. Celle-ci est plutôt convaincante au plan esthétique : les grandes cloisons d’acajou qui divisent la scène forment un bel écrin, qui évoque immanquablement un palace des années 30, et Christian Lacroix jongle habilement avec les couleurs et les époques pour habiller les chanteurs. L’ajout de la tirade des adieux de Bérénice dans la pièce éponyme de Racine forme une sorte de prologue original à cette mise en scène placée sous le signe du drame. Cette vision nous apparaît toutefois en décalage avec la pièce, plutôt dédiée à la générosité du souverain face à un entourage miné par l’ambition et les trahisons. Plus globalement le sens de cette mise en scène peine cependant à émerger pleinement, et les incessants va-et-vient des domestiques autour des interprètes tendent à diluer l’action plutôt qu’à en souligner le sens.
La direction de Jérémie Rohrer laisse une appréciation mitigée. Au plan purement orchestral elle s’avère bien inspirée, avec de vives attaques, et de brillants contrastes enchaînés sans faille. Mais le ralentissement (à notre sens excessif) des tempi lors des airs donne le sentiment un peu désagréable que les interpètes s’écoutent chanter. Il malmène en outre quelque peu la dynamique d’ensemble. Ajoutons que le choix d’un pianoforte (plutôt que d’un clavecin) pour accompagner les récitatifs était parfaitement judicieux. Nous regrettons cependant que ses interventions aient été trop présentes au plan sonore, et aussi peu inspirées au plan musical. Ces réserves s’évanouissent cependant dans les ensembles, menés de main de maître – en particulier les finales intenses des deux actes.
[clear]Du côté des interprètes, et malgré une indéniable présence scénique, la prestation de Kurt Streit dans le rôle-titre s’est avérée plutôt décevante au plan vocal, avec des attaques trop rugueuses et un manque d’ampleur dans les graves (« Ah, se fosse interno al trono »). Les ornements du grand air du second acte (« Se all’impero, amici Dei ») l’ont mis en grande difficulté, avec des respirations mal maîtrisées (la faute au rythme dicté par l’orchestre ?), et un final qui a écorché nos oreilles. On peut toutefois retenir le grand récitatif « Che orror ! Che tradimento ! », dans lequel sa voix s’était montrée plus à l’aise, et appuyée sur une solide projection.
Dans le rôle de Vitellia, Karina Gauvin témoigne à nouveau de l’éclatante prestance scénique qu’on lui connaît. Elle mène avec force l’intrigue d’un bout à l’autre, tour à tour princesse ambitieuse et jalouse dépassée par ses propres agissements, pour mieux témoigner de son repentir sincère à la fin du second acte. Au plan vocal sa prestation nous a semblée toutefois en retrait par rapport à ses moyens habituels, avec une légère faiblesse dans les mélismes finaux du « Deh, se piacer mi voi ». Malgré une ornementation réduite, son magnétique rondo « Non piu di fiori » lui vaudra un triomphe auprès des spectateurs.
Les rôles « secondaires » bénéficient d’une distribution de qualité. Julie Fuchs s’y distiingue avec brio dans le rôle de Servilia. Son timbre cristallin fait merveille dans le « S’altro che lacrime » comme dans les récitatifs, l’expressivité est bien présente. Le Sextus de Kate Lindsey parvient à s’affirmer face à Vitellia (duo « Come ti piace imponi »), et son air « Parto, parto, ma tu ben mio », très réussi, lui vaudra un tonnerre d’applaudissements. Au second acte le « Deh per questo istante solo » révèle toutefois quelques faiblesses dans les respirations, légère réserve que des applaudissements nourris dissiperont rapidement. Julie Boulianne se tire avec honneur du rôle d’Annius. Sa voix, pleine de fraîcheur pour un vaillant « Torna di Tito a lato », témoigne ensuite d’un bel abattage dans le « Tu fosti tradito » ; le phrasé des récitatifs est soigné. En revanche nous n’avons guère aimé le Publius de Robert Gleadow, dont le timbre manque de relief malgré une projection correcte. Enfin on ne saurait trop louer les vaillantes incursions de l’Ensemble Vocal Aedes dans les choeurs, qui animent admirablement les ensembles.
Bruno Maury
Étiquettes : Bruno Maury, Gauvin Karina, Le Cercle de l'Harmonie, Mozart, opéra, Théâtre des Champs-Élysées Dernière modification: 29 décembre 2014