Jeg elsker Danmark
A y bien penser, comme celle de nombreux pays, la musique baroque danoise n’est pas des plus connues, et l’évocation de Mongs Pedersøn (une fois passées notre difficulté d’inscrire dans ces pages vertes la graphie du nom, et la votre à la prononcer) ne nous chamboule pas.
Gracieuses mais froides comme un printemps anglais…
… voilà l’impression que laissent, au bout de plus de deux heures d’écoute, ces Douze Sonates dites de Manchester redécouvertes relativement récemment dans les collections de la Bibliothèque Centrale de Manchester.
“Allons, allons, accourez tous !” (Lully, Atys, La Simphonie du Marais, Hugo Reyne)
Atys. La tragédie en musique que, sans doute, les mélomanes connaissent le mieux. Peut-être la première qu’ils ont vraiment connue et appris à connaître, malgré le premier Alceste de Malgoire (1975), malgré Les Boréades de Gardiner (1983), deux productions qui ont contribué à faire connaître la première mouture de l’opéra français…
Musiques de la Ville Rouge
On connait assez mal les musiques de la brumeuse Europe du Nord, passées les Îles Frisonnes, la venteuse Héligoland et les côtes voisines du Danemark il est d’usage de croire à un désert primitif et obscur. Mais, au lendemain de la terrible et sanglante Guerre de Trente Ans (1618-1648), l’Allemagne et le monde baltique ont développé un style musical propre.
Munificence de la musique mais prise de son fautive
Leonardo Garcia Alarcon signe ici un bien joli projet qu’il a lui-même concocté avec art. Puisant dans la munificente production sacrée de Vivaldi il a agencé divers motets pour créer des Vêpres en l’honneur de Saint-Marc, patron de la Sérénissime. En cette fin de XVII° et début du XVIII° siècle les églises, salons, théâtres et palais de Venise bruissaient de musiques aussi riches que variées. Vivaldi n’était pas en reste.
Diabolus in claritudo
Sous-titré Chansons et polyphonies des Dames trouvères, c’est à la découverte des chansons de trouvères (la version d’oïl des troubadours, il va sans dire) féminines que nous sommes conviés à travers ce petit bijou des Diabolus in Musica.
De la querelle des Anciens et des Modernes.
Dès le dix-septième siècle la question du respect desdits Anciens, ou d’un art adapté au goût contemporain, tiraillait les foules. Nous passerons sous silence les longues querelles à coups d’œuvres, de traductions, de récritures, pour arriver au vingtième siècle, à son apogée, quand certains tentent de dépoussiérer les classiques, quand d’autres au contraire s’y tournent en cherchant véritablement les moyens de s’interroger sur leur forme, et la façon de les faire entendre.
“Le neuvième travail consista à rapporter la ceinture d’Hippolyté…” Apollodore, II, 5, 9.
Rome est pour nous actuellement le siège immuable de l’antiquité impériale et de la pourpre pontificale si ce n’est aussi les bacchanales nocturnes et aquatiques d’Anita Eckberg sous la lunette immortelle de Federico Fellini. Outre les sursauts du feuilleton Berlusconien ou bien la magnificence des fontaines et des palazzi, Rome porte en elle l’héritage de sa couronne de capitale du Baroque.
Protecteur des tremblements de terre
Voici la suite du voyage de Claudio Abbado en terre pergolésienne. Après un Stabat Mater d’une beauté un peu froide et au classicisme épuré, le chef fait montre dans ce second volume d’une lecture plus idiomatique et plus contrastée, plus baroqueuse dirons-nous. La Missa S. Emidio du jeune prodige fut probablement composée pour la saint Emidius de l’année 1732 en l’honneur du patron et protecteur de la ville d’Ascoli Piceno suite au tremblement de terre des deux années précédentes.
Ballade initiatique
Après des Sarcasmes sacrés quelque peu décevants, Arcana réédite à l’approche d’un nouveau printemps l’enregistrement de Ballades médiévales de l’Italie du Nord qui témoignent, à l’aube du Quatrocento, de l’émergence d’un nouveau style musical, l’Ars subtilior.
"Le nez de Cléopâtre, s’il eût été plus court, toute la face de la terre aurait changé." (Blaise Pascal, Pensées)
Disons d’emblée que l’exercice auquel se livrent Natalie Dessay et Emmanuelle Haïm en nous proposant ce récital des airs de Cléopâtre s’avérait périlleux. En effet le flamboyant chef d’œuvre du Caro Sassone a déjà fait l’objet de plusieurs intégrales de grande qualité, et il comporte des airs redoutables même pour une soprano aguerrie.
“Que me dit ton silence après cette prière ? / Ta vertu tremble t-elle à se montrer entière” (T. Corneille, Darius, IV,1)
Abbado ne quitte plus le destin tragique de Pergolèse, et ce troisième opus s’avère sans nul doute le plus énergique et le plus convaincant d’une quête commencée avec le fameux Stabat Mater et poursuivie par l’intéressante Missa S. Emidio que nous avons eu le loisir de chroniquer précédemment. Et pourtant, cet opus n’a pas le bénéfice des feux d’un Giuliano Carmignola, d’une Sara Mingardo ou d’une Veronica Cangemi, ni le prestige que confère une œuvre de référence que chacun se doit de connaître et d’apprécier pour briller lors d’un dîner en ville. Alors, pourquoi la Muse étreint-elle tant cet enregistrement ?
“A la manière d’une invention italienne”
Après une exploration heureuse du délicat Charles Levens, Michel Laplénie et Sagittarius reviennent à leurs amours premières, la musique allemande du début du XVIIe (rappelons que le nom de l’ensemble vient de la latinisation de Schütz), avec le plus méconnu des trois S de la musique allemande (Schütz, Schein et Scheidt).
Nuits d’ivresse printanière
Du Scarlatti au clavecin, mais pas celui qu’on croît, car un Scarlatti peut en cacher un autre. Le sourire aux lèvres, tel que dépeint sans doute par Francesco Solimena sur la jaquette. Vous autres lecteurs qui vous délectez de l’intégrale de Scott Ross des Exercices de clavecin de Domenico serez peut-être surpris d’apercevoir dans les bacs (d’un disquaire de goût) cette réédition où Rinaldo Alessandrini se lance avec jubilation et nonchalance dans les pièces d’Alessandro Scarlatti, bien plus célèbre pour ses oratorios. La parution célèbre le 350ème anniversaire de la naissance du compositeur…
Pergolèse entre seria et bouffe
Fauché à la fleur de l’âge par la maladie (probablement la tuberculose), Giovanni Battista Pergolesi n’eut guère de temps pour contribuer au répertoire lyrique baroque. Ses rares productions se distinguent toutefois par leur raffinement musical. Cette grande qualité intrinsèque est probablement à l’origine de la notoriété du compositeur, qui a résisté à l’oubli où étaient tombés les compositeurs baroques au XIXème siècle et au début du XXème. En 2010, la Fondation Pergolesi Spontini entreprit d’enregistrer l’ensemble des oeuvres parvenues jusqu’à nous du compositeur (soit quatre opere serie, deux intermezzi, et deux comédies)…
"Ich habe genug"
La ravissante Hilary Hahn s’était déjà illustrée chez Bach dans quelques périlleuses Sonates et Partitas (Sony), qui bien que stylistiquement hors-ton pour nos baroqueuses exigences, s’étaient avérées tout à fait convaincantes. Hélas, cette nouvelle parution, récital d’airs issus de cantates sacrées et profanes, de la Messe en si et de la Passion selon Saint-Mathieu se révèle de ces enregistrements sur lesquels l’on préfèrera ne pas s’attarder.
Fantastiques fantaisies
Cet enregistrement procède de la captation de trois concerts du Concert Brisé d’octobre 2009 au Musée de Neuchatel. La prise de son live relève ici d’une démarche artistique désirant éviter l’artificialité et la perfection lisse due aux multiples montages, et à une esthétique qui, parce que rendue possible, s’impose comme référence et norme, où l’artiste se fait son propre imitateur par la répétition des prises…
L’élégance du hérisson ?
Après la lecture de caméléon virevoltant de Bertrand Cuiller (Alpha) que nous avons récemment chroniquée, Mathieu Dupouy, musicien et fondateur du label Hérissons, nous propose en guise de quatrième parution un récital également consacré aux Sonates de Domenico Scarlatti, ces quelques 600 essercizi (esercizi en italien actuel pour répondre à des remarques d’orthographe de nos lecteurs) sans prétention mais si jouissifs destinés à la princesse Maria Barbara du Portugal.
“Montre-toi plus humain que critique ; et ainsi tes plaisirs en seront plus grands” (D. Scarlatti, Préface des Essercizi per gravicembalo)
K119. Ce n’est pas encore le matricule de l’épopée dangereuse d’un sous-marin soviétique en perdition sous les pôles, mais une aventure tout aussi périlleuse dans les méandres scarlattiens. C’est sans compter l’énergie et la fantaisie de Bertrand Cuiller, qui se lance avec délectation dans l’écriture variée et imprévisible du compositeur, aidé en cela par le Bel Italien de Philippe Humeau, un clavecin coloré, résonnant, aux graves ventrus.
Une musique à se damner
Les motets de Giovanni Felice Sances, ressemblent à tout sauf à l’idée qu’un esprit contemporain pourrait se faire de la musique d’église. L’austérité, la gravité, ne sont pas de mise dans ses compositions. Car il y met en œuvre le principe essentiel de la Contre – Réforme : séduire le pêcheur corrompu en lui faisant entendre une musique céleste voluptueuse, lui apportant la félicité éternelle.
