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6 janvier 2014

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Les Concertos Brandebourgeois : Titre & Dédicace

ou comment écrire une lettre de motivation en 1721

Portrait supposé de Bach jeune, lorsqu'il était à Cöthen. D.R.

 

En Prusse, le français était la langue de l'aristocratie et de la Cour. Aussi, lorsque Bach envoie au Margrave Christian Ludwig de Brandebourg, oncle du Roi de Prusse Frédéric-Guillaume Ier, six concertos parmi ceux qu'il a composé pour l'orchestre de Cöthen, il demande une traduction du compliment en français, qu'il recopie avec élégance.

Bien que les biographes n'en soient pas totalement certains, cet envoi et l'épître flagorneuse adressée à Son Altesse - habituelle pour l'époque et si outré qu'elle en devient amusante - pourraient constituer une sorte de CV et lettre de motivation pour une éventuelle candidature de Bach à la Cour de Prusse. En effet, sa femme Maria Barbara vient juste de décéder à 35 ans, le 7 juillet 1720, tandis que son ami et protecteur le Prince Leopold d'Anhalt-Kothen songe à épouser Frederica Henrietta von Anhalt-Bernburg  (le mariage sera célébré le 11 décembre 1721), donzelle qui ne goûte guère la musique, et sera la cause directe du départ de Bach à Leipzig en 1723.

Quoiqu'il en soit, on ne peut que sourire de voir Bach s'excuser des "imperfections" des "petits talents que le Ciel [lui] a donné pour la musique". Au passage, le nom de Concertos Brandebourgeois est une invention de Philipp Spitta, l'un des premiers biographes de Bach. 

Voici donc l'épître des Concertos Brandebourgeois, où l'on découvre que celui qu'on imagine trop souvent comme l'austère Cantor rabat-joie de Leipzig était aussi un courtisan de premier ordre. La mise en page, ainsi que l'orthographe originale ont été préservées.

M.B.

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Six concerts

Avec plusieurs Instruments

                  Dédiés

A Son Altesse Royalle

                  Monseigneur

                  CRETIEN LOUIS

Marggraf de Brandenburg & c. & c. & c.

                  par

Son très-humble & très obeissant Serviteur

        Jean Sébastien Bach

            Maître de Chapelle de S.A.S. le

                    prince regnant d'Anhalt-Coethen.

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A Son Altesse Royalle

                  Monseigneur

                  CRETIEN LOUIS

Marggraf de Brandenburg & c. & c. & c.

 

    Monseigneur.

Comme j'eus il y a une couple d'années, le bonheur de me faire entendre à Votre Alteße Royalle, en vertu de ses ordres, & que je remarquai alors, qu'Elle prenoit quelques plaisir aux petits talents que le Ciel m'a donné pour la musique, & qu'en prenant congé de Votre Alteße Royalle, Elle voulut bien me faire l'honneur de me commander de Lui envoyer quelques pièces de ma Composition : j'ai donc selon Ses très gracieux ordres, pris la liberté de rendre mes très-humbles devoirs à Votre Alteße Royalle, par les présents Concerts, que j'ai accomodés à plusieurs Instruments ; La priant très-humblement de ne vouloir pas juger leur imperfection, à la rigueur du goût fin et délicat, que tout le monde sçait qu'Elle a pour les pièces musicales ; mais de tirerplutot en benigne Considération, le profond respect, & la très-humble obeissance que je tache à Lui témoigner par là. Pour le reste, Monseigneur, je prie très humblement Votre Alteße Royalle, d'avoir la bontè de continüer Ses bonnes grâces envers moi, et d'être persuadèe que je n'ai rien tant à coeur, que de pouvoir être employé en des occasions digne d'Elle et de son service, moi qui suis avec un zèle sans pareil

                                                                                Monseigneur

                                                                                        De Votre Alteße Royalle

                                                                                               Le tres humble & tres obeissant Serviteur

                                                                                                Jean Sebastian Bach

    Coethen, le 24 mars 1721

                                                                                    

Source : Bibliothèque nationale de Berlin, BDI/150

 

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