Orchestre Baroque de
Venise, direction Andrea Marcon
L'Olimpiade : siam navi
all'onde algenti
La fede tradita e
vendicata : sin nel placido soggiorno
Orlando furioso : ah, fuggi rapido
Tito Manlio : non
m'afflige il tormento di morte
Semiramide : quegl'occhi
luminosi
Il Tigrane : squarciami
pure il seno
Catone in Utica : se in
campo armato
Il Tamerlano : allegro /
andante molto / allegro
Griselda : agitata da due
venti
Tito Manlio : dopo si rei
disastri
La Verita in Cimento :
amato ben, tu sei la mia speranza
Tito Manlio : combatta un
gentil cor
La Farfalletta audace
Giustino : or che cinco ho
il crin d'alloro
Archiv, 71'36, enr. 2007.
Tito Manlio :
"non
m'afflige il tormento di morte"
Un profane divin !
Février
2008. Vous en avez rêvé, Simone Kermes l'a fait !
Avec Andrea Marcon, la soprano n'a pas hésité à puiser dans des pièces peu connues
du Prêtre Roux (dont 5 premières mondiales). Elle en en extrait une substantifique moelle dont le centième
ferait s'évanouir un dilettante tant elle accumule les airs de fureurs débordant
de difficultés techniques. Voulez-vous des coloratures, des trilles, des mesures
tellement remplies qu'on ne sait plus comment en ornementer les reprises ? Et voilà que
ça monte, que ça descend, que les trompettes pétaradent, que les cordes se
déchaînent, que le continuo s'excite jusqu'à l'ivresse dans une débauche de
timbres et de beauté. On écoute le disque et on en sort comme grisé. Ces aigus
lunaires, cette égalité des registres, cette précision millimétrique et
naturelle dans les vocalises est proprement inhumaine et nous laisse nous
morfondre dans une interrogation existentielle : soit Simone Kermes est une
déesse devant la statue de laquelle chaque mélomane doit déposer des offrandes
en la remerciant pour son talent, soit les avancées incroyables de la
technologie moderne ont virtuellement crée LA chanteuse baroque par excellence.
On réécoute le disque, et l'on discerne derrière l'époustouflante façade une
intériorité, une profondeur, une diversité des climats et des portraits
psychologiques qui laisse sans voix. Il y a paradoxalement une sorte de calme sous la
tempête de notes, une âme d'airain dans une gorge de velours, une manière
indéfinissable de poser les notes avec délicatesse telles des pièces de jeu
d'échec au moment du coup de grâce. Rien ne se fait au hasard, les tempos
effrénés ne sont pas synonymes de hâte, chaque phrase prend le temps de
s'envoler et de s'étioler... Au milieu de ces déferlements périlleux, de graves
siciliennes plus lancinantes laissent à la soprano le soin de dire la souffrance
et le désespoir, avec une sensibilité à fleur de peau, une richesse du discours
aux mille reflets. Alors que notre syntaxe se trouble autant que nos sens, nous
laissons humblement d'autres plumes - en espérant qu'elles seront nombreuses -
couvrir de louanges Simone Kermes et Andrea Marcon, pour aller repasser
en boucle ce programme divin.
Viet-Linh Nguyen
Technique
: Prise très dynamique et équilibrée, avec la part belle aux timbres.