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20 janvier 2014

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Genre : musique de chambre

L'Art du violon seul dans l'Allemagne baroque

 

Johann Sebastian BACH (1685-1750) : Chaconne en ré mineur (partita II), Sonata I en sol mineur

Johann Paul von WESTHOFF (1656-1705) : Sonate IV en do majeur

Johann Georg PISENDEL (1687-1755) : Sonate pour le violon seul en la mineur

Heinrich Ignaz Franz von BIBER (1644-1704) : Passacaglie, l'Ange gardien (Sonates du Rosaire)

 

Mira Glodeanu, violon Marcin Gorblicz (1604)

 

Ed. Ambronay, 2009.

Un violon bien solitaire

Le Centre Culturel d'Ambronay nous charme depuis trente ans déjà avec ses partis pris de programmation et depuis quelques années l'enregistrement de certains de ses concerts. Avant de fêter ses 30 ans cette année, le Festival d'Ambronay programmait le génie des femmes dans la musique. Le thème était vaste, ambitieux et hautement intéressant. Dans le numéro du mois précédent, les lecteurs ont notamment trouvé la chronique d'un enregistrement consacré à Barbara Strozzi. Parallèlement, le label Ambronay sort cette année un récital consacré au violon seul par Mira Glodeanu.

Une Partita et une sonate de Bach, une Suite de Westhoff, une sonate de Pisendel et la Passacaille finale des Sonates du Rosaire de Biber, voilà bien un programme fort alléchant. De plus, le Macin Gorblicz de 1604 de la soliste, au son raffiné et vif, nous a d'emblée prédisposé à un moment délicieux de plaisir contemplatif.

Las ! Dès les premiers accords de la Partita n°2 en Ré mineur de Bach, toute la subtilité annoncée, le raffinement et la poésie tant attendus se sont transformés en un monolithe complexe et gris. En 13 minutes, le Cantor redevient la statue terrible qui supporte la neige près de la Thomaskirsche de Leipzig. Dans son introduction, Gilles Cantagrel parle de prière. On a malheureusement l'impression que le recueillement s'est mué sous l'archet de Mira Glodeanu en virtuosité et en algèbre, y perdant son humanité, sa profondeur, son langage affectif. Et nous avouons humblement ne pas comprendre les partis-pris interprétatifs de la violoniste, qui nous semblent souvent peu lisibles voire totalement inappropriés. Techniquement, l'archet est vif, le son grainé, les notes délivrées avec justesse. Et pourtant, l'approche générale sombre et déstructurée décontenance, bouleverse, prends à rebours les attentes et les réflexes, et ne parvient pas à afficher une vision ou une cohérence qui permettraient d'entrer dans le monde de ce violon aussi seul que solitaire.

Le constat d'incompréhension se poursuit avec la Suite n°4 en ut majeur de Johann Paul Westhoff où l'inventivité du musicien est mise à mal par un hachis de notes, un chaos illisible. L'Allemande perd son caractère de danse populaire, la Courante est honnête. La Sarabande, danse de cour se repaît de galanterie, la Gigue commence par un élan intéressant pour retomber pesamment après. Et l'on ne saisit pas l'originalité de Westhoff pour lequel Johann Sebastian Bach montrait de l'intérêt.

La Sonate en la mineur de Pisendel s'avère plus équilibrée et naturelle dans ses grandes lignes, le détail reste cependant mitigé. D'emblée, le Prélude qui laisse carte blanche à l'interprète se voit pourvu d'un mélange d'accords alla Bach avec des coups d'archet Paganiniens. L'Allegro, éloigné de l' “enivrement de la vitesse” décrit par Gilles Cantagrel dans son introduction, devient une série de phrases déchiquetées aux couleurs tristes et sombres, un Allegro pas très joyeux. La Gigue est plus vive, mais reste plombée sous la chape de solennité inexplicable qui plane sur l'ensemble de la Suite. Et finalement, Pisendel revient à lui quand Mira Glodeanu se décide à nous rendre les couleurs de virtuosité de la Variatione finale, d'un étrange parfum vénitien.

Le récital revient dès lors à Johann Sebastian Bach, avec la Sonate n°1 en sol mineur. L'Adagio au lieu de s'élever telles des volutes d'encens vers le divin, reste cloué au granit des cathédrales. La Fugue qui aurait pu nous porter vers la contemplation abstraite de la foi, n'est qu'une suite d'accords bien compassés et parfois bousculés rapprochant Bach de Paganini. La Sicilienne délicate et plaintive devient si tendre qu'elle en est presque mièvre. Enfin, le Presto est joué avec une célérité spectaculaire qui le rend méconnaissable mais diantrement impresionnant.

Enfin, c'est à la fin d'une journée grise que paraît le soleil. Et la Passacaille de Biber n'est que pure merveille. Mira Glodeanu s'y montre à la fois recueillie et dramatique pour ce corollaire des Sonates du Rosaire. La sagesse de l'orfèvrerie de Biber ressortent pleinement dans cette interprétation, réfléchie et passionnée où Mira Glodeanu nous fait vibrer à l'unisson de ses émotions concluant ce récital avec un certain panache. Et l'on se dit qu'un enregistrement intégral des Sonates du Rosaire - dont un DVD du Festival de Sauvigny vient de paraître reprenant les sonates XI à XV couplée avec du… théâtre Nô – serait le bienvenu.

Pedro-Octavio Diaz

Technique : prise de son fidèle et naturelle.

 

 

 

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