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20 janvier 2014

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Genre : récital

Venetian composers in Guatemale & Bolivia

Baldassare GALUPPI (1706-1785)

Aria "De Dios esposa amante"

Introduction et Récitatif "En el medio silencio de la noche"

Aria "Gira volando la sacra esfera"

Cantada al Santisimo con violines

Aria "Quien no busca la estrella"

Prélude instrumental "Duro como una pena"

 

Giacomo FACCO (1670-1757)

Cantada humana de dos arias con violón

Récitatif  "Torméntase el alma"

Aria "Morir más es vivir"

 

Antonio Gaetano PAMPANI (1705?- 1775)

Aria "Oy gustoso el corazón"

 

Roberta Pozzer (soprano)

Sylva Pozzer (soprano)

Vincenzo Di Donato (ténor)

 

Ensemble Albalonga, dir. Aníbal E. Cetrangolo

 

SACD hybride 76'00, Arts Music, 2008

 

Galuppi et le temple du soleil ? Tribulations vénitiennes d'une mer à l'autre.

Il est parfois dans l'Histoire des arts et des idées des oublis injustifiés et même souvent injustes. Tel est le cas du compositeur vénitien Baldassare Galuppi. Contemporain et complice de Carlo Goldoni, qui écrivit la plupart de ses livrets comiques, proche d'Antonio Vivaldi et élève d'Antonio Lotti Galuppi eut une carrière internationale fulgurante. Entre 1741 et 1743 il compose pour le King's Theatre de Londres, en 1765 il entame son service auprès de la tsarine Catherine II de Russie dans la lointaine Saint-Pétersbourg où il sera le premier des grands compositeurs à réjouir les nuits blanches de l'Ermitage avant l'arrivée des Paisiello, Cimarosa et Martín y Soler. Mais bien plus loin que les Russies, la musique de Galuppi a voyagé vers les jeunes Amériques où la liturgie était avide des nouveautés européennes. L'enregistrement des pages galuppiennes adaptées aux cérémonies religieuses de circonstance est une heureuse première. Par ailleurs, le commentaire assez détaillé du fascicule explicatif nous raconte que les maîtres de chapelle coloniaux achetaient en Europe les airs qui y faisaient fureur et changeaint le texte - avec souvent peu d'inspiration - pour les adapter à un caractère liturgique. Par ailleurs, saluons également la recréation discographique de la Cantada de Giacomo Facco, compositeur vénitien au service du roi d'Espagne dont l'Ensemble Albalonga avait déjà enregistré l'opéral Amor es todo invención o Jupiter y Anfitrión. Et n'oublions pas la page, peut-être la seule que nous entendrons à l'avenir, du maître modénais inconnu Antonio Gaetano Pampani.

Ce disque est tout d'abord un objet de recherche et de découverte très intéressant. Dans le patrimoine colonial latino-américain, largement négligé dans les pays concernés, des fonds immenses d'archives musicales dorment encore dans les sous-sols des Cathédrales. Gabriel Garrido et son Ensemble Elyma nous ont déjà charmé avec des partitions qui s'entassaient dans l'oubli. L'initiative de Aníbal Cetrangolo et d'Albalonga est louable, il démontre une fois encore que des trésors se cachent au plus profond des archives et met en lumière l'enthousiasme que ces découvertes peuvent produire. Pour les airs de Galuppi, tous issus d'opere serie créés à Venise, nous retrouvons la verbe joyeuse et pétillante du buranais. Bien entendu, le rapport entre la musique et le texte est galvaudé, puisque le texte est apocryphe. Dans la Cantada  de Facco le style s'avère moins brillant, un peu plus sage, mais beaucoup plus en phase avec le texte. Enfin, l'air de Pampani est extrait de son opéra Artaserse, dont le texte métastasien a été remplacé par une adoration sacrée, le style est intéressant et nous remplit d'impatience à l'idée d'en découvrir plus de pages. Cette édition se révèle véritablement un pari réussi pour la nouveauté et un bel hommage à Galuppi, Facco et Pampani, accompagnée d'une bonne revanche pour ceux qui se contentent d'un répertoire connu et repris ad nauseam.

Malheureusement, le bat blesse du côté des voix. À première écoute, nous admirons la justesse et l'habilité de Roberta et de Sylva Pozzer. Cependant, l'émission de Roberta Pozzer se double parfois d'un caractère strident et très forcé dans les aigus, notamment dans l'air "Quien no busca la estrella" où vocalises et portamento en ressortent meutris. Pour sa part, Sylva Pozzer sculpte avec tendresse l'air "De Dios esposa amante" mais ne réussit malheureusement pas à nous élever vers les cieux, comme le voudrait le texte, les aigus étant souvent distribués à tout va et manquant de contrôle. En outre, les deux chanteuses, pourtant initiées à l'interprétation de la musique ancienne, restituent le texte avec confusion, dans une diction qui embrouillera les hispanophones. Cela est dommage, car les paroles, même niaises, sont essentielles afin de comprendre la transfiguration des airs séculaires en mélopées rituelles. Ici la délicieuse musique de Galuppi, la grâce de Facco et la fraîcheur de Pampani sont mâtinées des couleurs vocales de Verdi, Massenet et Puccini, en un contraste surréel et malaisé. Vincenzo Di Donato fait preuve d'une diction plus soignée dans la Cantada humana de dos arias con violón de Giacomo Facco, mais les articulations sont pesantes, le style superficiel, non dépourvu de reflexes verdiens . Dans la délicate berceuse finale "Dulze Filomena" il nous offre une surenchère de vocalises exagérées et des ornements qui cassent le fragile équilibre poétique qu'Aníbal Cetrangolo avait réussi a mettre en place. On en vient à regretter que cette magnifique page n'ait pas été confiée à un expert de la nuance comme Paul Agnew ou Richard Croft...

C'est du côté de l'orchestre Albalonga et de son chef Aníbal Cetrangolo que nous trouvons l'humilité, le travail et le plaisir absolu de la recréation réussie. L'enregistrement  de l'opéra Jupiter y Anfitrión de Facco pour le label Pavane en 1999, montrait des profondes faiblesses du côté de l'orchestre et une direction insuffisamment centrée. Cet enregistrement efface durablement ce souvenir mitigé. Cetrangolo est à l'aise dans Galuppi, même si on aurait voulu un peu plus de vivacité. Pour la Cantada de Facco nous retrouvons un continuo émouvant, un recueillement non démuni de tendresse toute séculaire. L'orchestre n'accompagne plus, il soutien les chanteurs et joue, à défaut, le rôle d'acteur. L'ensemble Albalonga, notamment dans les airs "Gira volando la sacra esfera" , "Quien no busca la estrella", dont la musique est normalement faite pour les affetti métastasiens, nous transporte dans les salles de Venise si bien qu'au final, les pages qui quittèrent la Lagune pour l'Amérique, reviennent par l'esprit vers les lampions de leur histoire.

Pedro Octavio Diaz

Technique : enregistrement un peu voilé dans ses contours, avec une belle captation de Bernarda Fink

"Je pense la musique à travers des images, très souvent des images abstraites…" : entretien avec Giovanni Antonini, directeur musical d'Il Giardino Armonico 

 

 

 

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