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20 janvier 2014

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Genre : récital

"Concert chez la Reine"

François COUPERIN dit Le Grand (1668-1733)

Concert instrumental sous le titre d’Apothéose composée à la mémoire immortelle de l’incomparable Monsieur de Lully (1725)

François COLIN DE BLAMONT (1690-1760)

Les Festes Grecques et Romaines (1723)

Circé (v.1729-1736), sur un texte de Jean-Baptiste Rousseau

Les Ombres :

Mélodie Ruvio (mezzo-soprano), Manuel Weber (comédien), Sylvain Sartre et Sarah van Cornewal (traversos), Katharina Heutjer et Jérôme van Waerbeke (violons), Mélanie Flahaut (basson), Margaux Blanchard (viole de gambe), Vincent Flückiger (théorbe), Nadja Lesaulnier (clavecin)

Direction Sylvain Sartre et Margaux Blanchard

68’00, éditions Ambronay, enr. 2010.

Les Festes Grecques et Romaines - Chaconne

 

"Moi qui sais des lais pour les reines

Les complaintes de mes années

Des hymnes d'esclave aux murènes

La romance du mal-aimé

Et des chansons pour les sirènes." (Guillaume Apollinaire)

Lors de son entrée dans la sphère versaillaise en 1725, la reine Marie Leszczynska (1703-1768) désira perpétuer les soirées d’appartement qu’avait instaurées le Roi Soleil. De petits concerts ont ainsi été donnés très régulièrement tout au long du règne de Louis XV, astreignant les Surintendants de la Musique à un travail de composition et d’organisation incessant. André Cardinal Destouches (1672-1749) et François Colin de Blamont partagèrent cette tâche, avec une alternance de six mois chacun. Les concerts comportaient généralement trois parties, à l’image du programme que les Ombres nous offrent d’écouter dans leur premier enregistrement. Le siècle des Lumières fit la part belle à l’Antiquité ! Apollon nous invite ainsi à le suivre au Parnasse où Lully et Corelli, accompagnés des Muses française et italiennes, se célèbrent l’un et l’autre ; de là, nous entendons les plaintes et les tourments amoureux de Circé, magicienne qu’Ulysse rencontra lors de son retour à Ithaque et à qui elle abandonna son cœur. Quelques pas de danse enfin nous entrainent aux Festes Grecques et Romaines.

Un vent de fraicheur, d’une légèreté charmante anime ces différentes pièces et si un nuage vient parfois leur donner un peu de gravité, celui-ci n’est jamais que passager. Ce qui séduit avant tout, c’est cette pâte sonore bien particulière, faite de la douceur des flûtes, de la profondeur d’un théorbe, de la sensualité d’une viole et du grain des violons. Mélange troublant de différents timbres qui donne naissance à une sonorité nouvelle et singulière, et exhausse les couleurs harmoniques de chaque morceau. L’Apothéose de Lully devient alors une œuvre de théâtre, pleine de rebondissements, de rumeurs, de sourires et de larmes ("Plaintes des mêmes pour des flûtes ou des violons très adoucis"). Rythmée par la déclamation soignée de Manuel Weber, l’histoire que les Ombres nous racontent prend vie.

D’un sujet plus tragique, la cantate Circé semble annoncer l’œuvre lyrique du grand Rameau ; du chromatisme descendant initial découle une série de tempêtes, d’harmonies angoissantes et de plaintes touchantes, témoins des élans de désespoir qui hantent la magicienne. Colin de Blamont offre au texte de Jean-Baptiste Rousseau un écrin très imagé qui souligne au plus près la belle simplicité de ses vers. Les Ombres font de cette œuvre de jeunesse une miniature aux teintes chatoyantes et contrastées, mises en valeur par le timbre suave de Mélodie Ruvio. Habitant l’étendue de son registre avec une présence égale, l’on ne pourrait reprocher à la mezzo que l’absence d’excès de théâtralité ("C’est ainsi qu’en regrets"). Entré avec discrétion, le basson de Mélanie Flahaut vient enrichir la palette instrumentale d’une sonorité à la fois profonde et éclatante ; portée par une articulation précise, son chant apporte soutien aux phrasés et renforce les dynamiques.

Formées de cinq pièces de danse introduites une majestueuse ouverture à la française, Les Festes Grecques et Romaines permettent à nos musiciens de témoigner à nouveau de leur ingéniosité à mêler couleurs et timbres différents. Simplicité et grandeur se côtoient autour de rigaudons marqués d’accents populaires et d’airs mélancoliques que Sylvain Sartre façonne avec une extrême délicatesse. Une chaconne rayonnante vient clore ce Concert chez la Reine dont les promesses de jeunesse et de bonheur bercent encore nos cœurs. Il ne reste qu’à souhaiter aux Ombres de porter bientôt à la lumière d’autres œuvres oubliées des salons versaillais.

Isaure d'Audeville

Technique : captation bien équilibrée.

 

 

 

Affichage minimum recommandé : 1280 x 800

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