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mise à jour 6 janvier 2014
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Chronique Concert La Route de l'Orient au temps de Francisco Xavier Hespèrion XXI, dir. Jordi Savall
Jordi Savall © Jordi Savall
LA ROUTE DE L'ORIENT AU TEMPS DE FRANCISCO JAVIER (1506-1553)
I. AD PROCESSIONEM Anonyme Cum Autem Anonyme / Venantius Fortunatus O gloriosa domina Luis Venegas de Henestrosa Diferencias sur "O gloriosa domina"
II. AD MATUTINUM Anonyme (Japon traditionnel) Kagura-bayashi Anonyme Villancico "Senhora del mundo"
III. INVITATORIUM - Invitation à la lumière Anonyme Regem cui omnia vivunt Cristobal de Morales Psaume 94 : Venite, exultemus Domino Pedro de Escobar Virgen bendita sin par
IV. ORATIO Anonyme (Japon, Zen) Reibo Manuale ad sacramenta (Japon, 1549) Exsequiarum ordo, de officium defunctorum Anonyme (Japon, musique sacrée) Rangyoku
V. INVOCATIONEM Anonyme / Venantius Fortunatus O gloriosa domina Improvisations sur "O gloriosa domina" Anonyme (Inde, Goa) Raga sur "O gloriosa domina"
VI. CELEBRATIONEM Bartomeu Carceres (Valence 1540) Soleta i Verge estich Tau garço la durundena Kinshi Tsuruta (Japon) Honnôji
VII. ORACULUM Anonyme / Alonso et Bartomeu Carceres El cant de la sibilla (XVIe siècle)
Pierre Hamon flûte Jean-Pierre Canihac cornet Béatrice Delpierre chalemie Daniel Lasalle sacqueboute Josep Borràs basson Sergi Casademunt viole de gambe ténor Philippe Pierlot viole de gambe basse Begoña Olavide psaltérion Xavier Diaz-Latorre guitare, vihuela Pedro Estevan percussions Luca Guglielmi orgue Montserrat Figueras soprano Adriana Fernandez soprano Pascal Bertin contre-ténor David Sagastume contre-ténor Lluis Vilamajo ténor (remplacé) Francesc Garrigosa ténor Furio Zanasi baryton Daniele Carnovich basse Manuel Forcano récitant Masako Hirao viole de gambe basse Hiroyuki Koinuma shinobue, nokan Ichiro Seki shakuhachi Yukio Tanaka chant, biwa Ken Zuckerman sarod Prabhu Edouard tablas
La Capella Reial de Catalunya Hespèrion XXI
Jordi Savall direction, viole de gambe soprano
29 octobre 2009, Cité de la Musique, Paris. On the road En ce dimanche 29 novembre, jour de l’Avant et 3ème jour de l’Aïd-el-Adha, nous avons pris le chemin, non du Grand Amphithéâtre moderne de la Cité de la Musique, mais de l’aventure et de la découverte, emboîtant les traces de pas fanées du Navarrais. François Xavier - avant d'être célèbre pour les Parisiens utilisateurs du métropolitain du VIIème arrondissement - fut l'infatigable envoyé de Paul III, usant ses sandales sur près de 100 000 km, partant de Rome à Lisbonne, débarquant en 1541 à Goa, alors possession de la couronne portugaise, continuant inlassablement sa marche évangélisatrice jusques à Taïwan et atteignant même les rivages du Japon en 1549. Alors, bien sûr, les puristes que nous sommes seront un brin déçus de la sonorisation du concert, qui, si elle fonctionne relativement bien pour les ensembles choraux, paraît trop poussive pour les cordes pincées et les voix seules, dont la puissance, enflée, perd en naturel et en immédiateté. Pourtant, cet irritant technique ne saurait gâcher une soirée admirable de couleurs, véritable festival de sonorités et d’ambiances, à la spatialisation et à l’enchaînement très bien pensés. Avant de partir sur la route de l’Orient, un mot seulement sur Hespèrion XXI dont on ne peut que louer unanimement l’excellence et l’interactivité complice. Pourrait-il en être autrement lorsque l’on repère la silhouette de Philippe Pierlot au continuo, la flûte de Pierre Hamon, le cornet de Jean-Pierre Canihac, la barbe (pardon, les percussions) de Pedro Estevan ? La surprise viendra pourtant aussi des musiciens invités, en particulier de la virtuosité bluffante au sarod de Ken Zuckerman (une sorte de luth XIXème issu du croisement entre le dhrupad rabâb indien plus ancien et le rabâb afghan) et le shakuhachi intense d’Ichiro Seki. Le dangereux périple débute avec un "O Gloriosa Domina" recueilli, d’une austère mais vibrante verticalité, drapé de sa dévotion très catholique, que les "Diferencias" (variations) de Luis Venegas de Henestrosa viennent égayer de leur inventivité droite et fière. Le chœur, compact et grave, uniquement doté de voix masculines révèle sa cohésion impérieuse. Et puis, sans transition, voici venir l'Extrême-Orient avec un air traditionnel pour flûte éthérée du Soleil levant, surprenant par sa poétique délicatesse, et que débouche vite sur un Villancico hybride, où la voix de Montserrat Figueras, terrestre et charnelle (mais trop amplifiée par les micros) se voit escortée du sarod indien et des tablas (percussions) du subcontinent dans un mélange enivrant, d'une franchise lumineuse, pleine de la poussière dorée du pèlerin las. Cette ivresse étrange, un brin "exotique" pour nos oreilles, est confirmée par l' "invitation à la lumière" qui, définitivement, fait virer ce concert du cadre soi-disant compassé de la musique ancienne à celui de la musique du monde... La dextérité de Ken Zuckerman au sarod, spectaculaire, atteindra son paroxysme en 2ème partie de concert, lors d'un solo improvisé sur le "O gloriosa Domina". Les méandres capricieux et énigmatiques de ce cheminement ne se laissent point facilement conter. Faut-il vraiment détailler l'admirable symbiose des courts textes récités, de la musique d'ici et d'ailleurs, de l'atmosphère d'une spiritualité mélancolique exhalée d'un "Regem cui omnia vivunt" de Morales ou d'un évanescent Reibo japonais expiré avec une concentration d'une force intérieure prenante par Ichiro Seki, en kimono d'apparat, traversant les travées tel un samurai du crépuscule forcé de rendre ses sabres à l'ère Meiji ? Alors, non. nous ne dirons plus rien de ce concert qui s'est conclu avant le bis triomphal sur les célèbres Chants de la Sybille, où tous les continents réunis ont fait le vœu d'une paix harmonieuse. Et à l’issue de ce concert mémorable, l’on se jette sur le beau livre-disque de retour à la maison, afin de prolonger l’émerveillement du voyage.
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Affichage recommandé : 1280 x 800 Muse Baroque, le magazine de la musique baroque tous droits réservés, 2003-2014
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