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mise à jour 6 janvier 2014
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Chronique Festival
"Cette ville est Lanvellec et le trésor est un orgue"
26e édition du Festival de Lanvellec et du Trégor "Folies universelles"
Il y a dans un petit coin de la Bretagne une petite ville d’à peine plus d’un demi-millier d’habitants. Dans cette ville, d’apparence peu signifiante — une église, un restaurant, un bureau de poste, une mairie, et un magasin à tout vendre, et puis des habitations — dans cette ville, donc, se cache en fait un trésor. Cette ville est Lanvellec et le trésor est un orgue.
Oh, pas n’importe quel orgue : un orgue achevé en 1653 par Robert Dallam, illustre facteur anglais du XVIIe siècle à qui la Grande-Bretagne doit certains de ses instruments les plus prestigieux. Cet orgue « de Lanvellec » n’est pas celui de Lanvellec en réalité, du moins Robert Dallam ne l’a pas construit pour Lanvellec : c’est à quelques kilomètres de là qu’il avait installé l’instrument qui lui avait été commandé, à Plestin-les-Grèves. Mais l’histoire l’a changé de place. En mauvais état au XIXe siècle, les autorités ecclésiastiques de Plestin l’ont revendu à Lanvellec en 1864 pour subvenir à un pressant besoin d’argent pour élever un calvaire en souvenir d’une mission jésuite. Un orgue contre un calvaire… L’orgue de Robert Dallam n’a pas été entièrement remonté à Lanvellec, ce qui l’a sauvé de la Révolution des orgues — entendez : celle de l’entreprise Cavaillé-Coll. Seuls le buffet et les tuyaux de façade ont été installés à Lanvellec, « pour faire joli ». Les autres sont rangés dans des caisses. Aussi dans les années 1970 on retrouve cet orgue presque inchangé, en partie démonté. En 1971 et 1977, l’ensemble de l’orgue est classé Monument historique. L’idée d’une rénovation a déjà germé, mais elle s’annonce difficile : outre les jeux rangés, dont certains ont été abîmés par le temps, deux jeux manquent.
© Festival de Lanvellec Mais l’histoire réservait un nouveau rebondissement : la légende dit qu’un matin, un particulier vient à Lanvellec déposer une caisse contenant 150 tuyaux, qui sont bien ceux de Robert Dallam. En fait, une partie des tuyaux de l’orgue, sans doute au cours du XXe siècle, avait été récupérée pour être utiliser dans l’orgue de Saint-Quay-Portrieux. Lorsque cet orgue a été restauré, au début des années 1970, le facteur Jean Renaud a remplacé les tuyaux de Robert Dallam par des neufs, ce qui a permis un peu plus de dix ans après au facteur de les rapporter à Lanvellec — il avait sans doute entendu parlé de l’histoire des jeux manquants — où ils peuvent réintégrer leur orgue d’origine. La restauration de l’orgue de Robert Dallam est lancée et orientée : dans le plus pur respect de ce qu’il a pu être originellement, en 1653. Il faut dire que Cavaillé-Coll est maintenant assez loin, bien plus loin que les baroqueux. C’est Barthélémy Formentelli qui y travaillera, optant entre autres — ce qui en fera grogner plus d’un — pour un tempérament mésotonique à peine adouci. La suite de l’histoire voit son inauguration par Gustav Leonhardt, qui aime cet instrument assez exceptionnel. Et après ? Il fallait bien que l’orgue vive, or on ne saurait le faire vivre, dans ce coin un peu reculé de la Bretagne, sans organiser autour de lui une manifestation musicale. Il lui faut des musiciens et des mélomanes. C’est ainsi que naissent les Rencontres internationales de musique ancienne du Trégor, connues désormais sous le nom de Festival de Lanvellec et du Trégor.
© Festival de Lanvellec Et s’il n’est pas connu, c’est qu’il est loin et un peu discret, car les artistes, eux, le connaissent. Il suffit pour s’en convaincre de regarder la liste de ceux qui y sont passés : Gustav Leonhardt, certes, le premier, puis dans le désordre l’ensemble Clément Janequin, Kenneth Gilbert, Jordi Savall, les Kuijken, Jean-Claude Malgoire, Fretwork, l’ensemble 415, Ton Koopman, Alla Francesca, Scott Ross, Pierre Hantaï, Café Zimmermann, Le Poème Harmonique, John Holloway… Bref, en 25 ans, tous ou presque sont venus ! La programmation de cette vingt-sixième édition ne laisse guère plus à désirer, faisant la part belle aux jeunes, voire très jeunes ensembles : Gli Inconniti, Faenza, mais aussi Les Ombres et Scherzi Musicali, Lucile Boulanger et Arnaud de Pasquale côtoient ainsi l’ensemble XVIII-21 de Jean-Christophe Frisch, Lorenzo Ghielmi, le Concerto Soave, Jos van Immerseel et Christophe Coin. Chaque édition est portée par un thème. Ainsi les artistes ont concocté leurs programmes avec la complicité de la programmatrice, Geneviève Le Louarn, autour des Folies universelles — qu’elles soient, donc, d’Espagne ou d’ailleurs — pour fournir en concerts trois week-ends d’octobre. Et cela les amène, et nous avec, loin des sentiers battus et rebattus — un peu, finalement, à l’image de cette Bretagne où le Festival de Lanvellec nous a installés le temps d’une escapade musicale.
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