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mise à jour 6 janvier 2014
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Chronique Concert Haendel, La Résurrection Le Concert d'Astrée, dir. Emmanuelle Haïm
© Simon Fowler / Virgin Classics
Georg Frederic Haendel
La Résurrection Oratorio en 2 parties HWV 47 sur un livret de Sigismondo Capece
Camilla Tilling (L'Ange) Kate Royal (Marie-Madeleine) Sonia Prina (Cléophe) Toby Spence (Saint Jean) Lorenzo Regazzo (Lucifer)
Le Concert d'Astrée Direction Emmanuelle Haïm
1er Avril 2009, Théâtre des Champs Elysées, Paris "La résurrection est une idée toute naturelle ; il n'est pas plus étonnant de naître deux fois qu'une" (Voltaire)
Une idée toute naturelle en effet, sous la férule ou plutôt le clavier d'Emmanuelle Haïm et de son ample chevelure se balançant au gré des mouvements, alors qu'elle dirige depuis son instrument. Toute naturelle car sa direction jubilatoire croque à pleines dents un Haendel tout à son périple italien, chargé par le Marquis Ruspoli et le Cardinal Ottoboni de composer cet oratorio opératique pour Pâques 1708... Et si Sa Sainteté le Pape Clément avait eu connaissance du casting féminin assemblé au Théâtre des Champs-Elysées cette première nuitée d'avril quelques 2 siècles plus tard, il aurait également interdit la représentation comme il le fit à l'époque devant l'attribution du rôle de Marie-Madeleine à la célèbre cantatrice Margherita Durastanti remplacée par un castrat dès le lendemain (puisque les femmes ne pouvaient interpréter d'œuvres religieuses à Rome).
Mais revenons au Concert d'Astrée, qui dévoile sa grande forme dans un déluge de couleurs qui sied tant à cette œuvre opulente, qui fait abondamment appel aux instruments obligés. Certes, les trompettes ne sont guère martiales ou cuivrées, rapidement dépassées par des cordes tour à tour fermes et précises, ou d'un drapé évocateur. Mais tout le reste de l'orchestre, flûtes et bois en tête n'appelle que les louanges d'un jeu virtuose et très caractérisé, où l'apparente liberté des articulations n'a d'égale que la cohésion des musiciens et leur évidente complicité. Et l'on ne peut cacher sous le boisseau un continuo sur mesure, d'où émerge le luth perlé de Laura Monika Pustilnik, la viole languissante d'Atsushi Sakaï et le violoncelle souriant et à l'archet varié de Claire Thirion.
Si la soirée fut - à juste titre - impétueusement plébiscitée par le public, c'est bien par la vision d'ensemble d'Emmanuelle Haïm dramatique à souhait, téléologique, pleine de sens et de poésie à l'image du bel enregistrement d'Il Trionfo del Tempo dont elle nous a déjà gratifié (Virgin Classics). Est-ce à dire que la distribution déméritait ? Point du tout. D'abord il y a un monstre vocal, une bête immonde, vautrée dans ses graves profonds et rocailleux, impérialement à l'aise dans les récitatifs jouissifs, mitrailleur dans les vocalises, d'une tenue mélodique charmeuse. Lucifer, c'est un Lorenzo Regazzo puissant et totalement investi dans sa caractérisation maligne ("O voi, dell'Erebo" notamment avec de brutales cascades), presque envahissant pour l'ange un peu appliqué de Camilla Tilling qui peine à soutenir le duel de mots. La soprano au timbre clair, sensible dans ses ornements mais dénotant un vibratello sur les longues notes souffre d'une projection réduite, qui ne lui permet pas de s'affirmer suffisamment face à l'orchestre. Le "D'amor fu consiglio" d'une berçante caresse est ainsi déséquilibré. A l'inverse, Sonia Prina a campé une Cléophe meurtrie exemplaire. La voix corsée, d'une étendue remarquable, capable d'une virtuosité ébouriffante (un "Naufragando va per l'onde" qui repousse les limites humaines), d'une intériorité et d'une profondeur bourrée d'émotion tremblante ("Piangete, si") nous a proprement charmé, au sens premier du terme.
Enfin, on glissera sur les performances de Kate Royal, au timbre racé, cependant d'abord stylistiquement trop large et superficielle (mélodie très appuyée et legato constant, manque de concertation avec l'orchestre, très "air de concert"), mais qui s'est révélée plus haendélienne en seconde partie, et surtout sur la seule vraie déception : l'intrusion malvenue de Toby Spence dans le superbe rôle de Saint Jean. Le ténor en totale méforme a fait valoir des aigus tirés et poussifs, une diction brouillonne que déflore encore plus un placement approximatif (vocalises et trilles inclus) rendant méconnaissable les passages si nobles du "Quando è parto" dell'affetto", du sacro-saint "Cosi la tortorella" que même le luth ne sauve pas, ou encore du triomphant "Ecco il sole". Glissons, glissons, car un disciple décevant ne saurait faire oublier une résurrection si... divine.
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