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mise à jour 6 janvier 2014
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Chronique Festival Airs de Frescobaldi, Monteverdi, Ferrari, Haendel, Vivaldi & Paisiello, Franco Fagioli
Franco Fagioli © Franco Fagioli
Airs de Frescobaldi, Monteverdi, Ferrari, Haendel, Vivaldi et Paisiello
Girolamo Frescobaldi (1583 - 1643) : "Se l'aura spira" "Ai miei pianti"
Claudio Monteverdi (1567 - 1643) : "Ecco di dolci raggi"
Benedetto Ferrari (vers 1603 - 1681) : "Amanti io vi so dire !"
Giuseppe Antonio Doni (1600 - 1681) : Toccata e Passacaglia
Georg Friedrich Haendel (1685 - 1759) : Cantate HWV 109 "Dolc'è pur d'amor l'affamo" Cantate HWV 84 "Aure soavi e lieti"
Antonio Vivaldi (1678 - 1741) : Cantate RV 676 "Pianti, sospiri a dimandar mercede"
Francesco Geminiani (1687 - 1762) : Sonate pour violoncelle et continuo
Giovanni Paisiello (1740 - 1816) : Variazioni sull'aria "Nel cor più non mi sento"
Franco Fagioli, contre-ténor Violoncelle : Jonathan Pesek Luth : Luca Pianca Clavecin : Riccardo Doni
3 septembre 2011, Prieuré de Froville-la-Romane (Meurthe-et-Moselle), dans le cadre du Festival de Froville Un festival haut en coloratures
Rares sont les apparitions de Franco Fagioli dans les salles françaises, le contre-ténor argentin effectuant actuellement l'essentiel de sa carrière outre-Rhin. On avait pu l'entendre dans une version de concert du Bérénice de Haendel au théâtre des Champs-Elysées à l'automne 2009 mais sa prestation, probablement à contre-emploi, ne nous avait pas laissé un bon souvenir. Aussi c'est avec intérêt -et un peu d'appréhension- que nous nous sommes rendus l'autre soir à Froville, dans le cadre d'un Festival dont nos fidèles internautes sont désormais familiers, afin d'essayer de nous faire une plus juste idée des talents de ce contre-ténor, loués sur les sites musicaux germanophones (les familiers de la langue de Goethe peuvent aller consulter notamment "operasora.com").
C'est peu dire que nous avons été entièrement convaincus, ou plutôt transportés. Fagioli possède en effet une étendue de registre étonnante, comme il en administra magistralement la preuve dans ses stupéfiantes vocalises sur l'air de Paisiello.
Naturellement haut placée, sa voix a une couleur qui évoque le timbre d'une mezzo -ce qui l'a parfois fait comparer à une Bartoli au masculin. Ses attaques possèdent certes une pointe d'acidité, toujours adoucie par une facilité déconcertante dans les aigus. Sa diction est dotée d'un léger affect sur lequel il appuie un jeu scénique très extraverti (allant parfois jusqu'à battre le rythme de ses pieds !), qui fait craindre à chaque instant pour un legato qui demeure fluide comme par miracle...Vêtu d'un smoking noir à la chemise ouverte, Fagioli chante en effet chacune de ses phrases avec conviction, illustrant chaque mot d'une mimique du visage ou d'une expression corporelle. Certains trouveront peut-être incongru cette démonstrativité dans un récital. Tel n'était pas l'avis du public ce soir-là, qui fit de cette incursion sur le sol français un véritable triomphe.
Le concert débuta sur un air lent de Frescobaldi, "Se l'aura spira". Après un beau prélude au luth, les premières phrases tombèrent comme d'une voix céleste, mais fortement soulignées d'un jeu très expressif. Sur un rythme plus vif, "Ai miei pianti" mit en valeur la qualité d'une projection généreuse dans les aigus. Monteverdi fut abordé avec une couleur de timbre plus sombre, brillamment accompagné par le luth mélancolique de Luca Piana, avec une belle descente d'ornements finale.
L'enthousiasme du public se déchaina après l'air de Ferrari : sur des accords enlevés, le contre-ténor donna la mesure de son aisance dans les aigus, voix aérienne se jouant des ornements virtuoses et s'achevant sur un final au luth.
Nef du Prieuré © Wikimedia Commons
Intermède orchestral avec la toccata et la passacaille de Doni, sur le luth grave et austère de Piana qui déploie dans la petite église la richesse insoupçonnée de ses sons en solo. La première partie du concert s'acheva sur la cantate HWV 109 de Haendel, très applaudie : d'une voix diaphane, Fagioli enchaîne airs et récitatifs, très à l'aise aussi dans ces derniers qui mettent en valeur la qualité de sa diction. Le chanteur est en grande forme, le violoncelle nerveux et le clavecin vif sont à peine tempérés par la sagesse du luth.
Après un petit passage dans le jardin d'Harmonies, à peine écourté par les premières gouttes de l'orage, nouvelle cantate de Haendel : après un récitatif bien expressif, l'air se déploie avec toujours cette petite pointe d'affect qui ne nuit pas à de beaux ornements filés, pour terminer sur un final d'aigus cristallins...Onctueux à ses débuts, le violoncelle se fait plus nerveux à mesure que Fagioli dévale les ornements étourdissants de la cantate de Vivaldi, faisant preuve d'un abattage déconcertant qui suscita de longs applaudissements. Clin d'oeil aux compositions lyriques du Caro Sassone qu'il fréquenta à Londres, la sonate pour violoncelle de Geminiani offrit à Jonathan Pesek l'occasion de montrer l'étendue de son talent : son doigté précis et assuré nourrit des sons souples et d'une belle ampleur, qui résonnent majestueusement sous les arcatures romanes.
Mais Fagioli nous réservait le meilleur pour la dernière pièce du programme. Les variations sur l'air de Paisiello parurent en effet bâties à sa mesure, ou plutôt à sa démesure : après une attaque fluide finement accompagnée au clavecin, les ornements arrivent, d'abord filés avec soin, puis s'enflant, se décomposant en une époustouflante vocalise parcourant d'un trait toute l'étendue du registre du contre-ténor, des aigus aux graves !
Cette prouesse vocale suscita un tonnerre d'applaudissements et de bravos, qui appelèrent deux bis : "Si dolce il tormento" de Monteverdi, puis à nouveau la Chaconne de Ferrari, appuyée de quelques claquettes !
Alors, monsieur Fagioli, à quand votre prochaine présence sur une scène française ?
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Affichage recommandé : 1280 x 800 Muse Baroque, le magazine de la musique baroque tous droits réservés, 2003-2014
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