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mise à jour 6 janvier 2014
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Débat : Français restitué et latin à la française : quelle prononciation ?
Philippe de Champaigne, ex-voto (1662), Musée du Louvre. D.R. Le français restitué Il s'agit ici d'introduire les différentes contributions à propos de la question controversée du français restitué c'est-à-dire la prononciation du français à l'époque. On insistera sur la difficulté d'aboutir à une connaissance suffisamment précise et exacte de cette prononciation, ce qui conduit à s'interroger sur les partis-pris actuels des interprètes baroques et les effets induits sur l'intelligibilité du texte pour l'auditeur moderne. La grammaire, le vocabulaire et l'orthographe du français dit classique (celui de Racine) sont évidemment différents de ceux utilisés de nos jours. La façon de prononcer les mots l'était également. Hugo Reyne a décidé pour certains de ses enregistrements de Lully de revenir à la prononciation du XVIIème siècle, afin de pousser l'authenticité encore plus loin. Si l'on utilise des instruments d'époque (ou copies), pourquoi ne pas parler comme un courtisan du Grand Siècle ? Le problème est double : d'une part, cette prononciation obscurcit la compréhension du texte et pare le livret de ridicule à l'oreille de l'auditeur moderne peu habitué aux éclats naissanss (naissants), à Floreeeeeeeeuu (Flore) et à l'arrivée du Roué (Roi). Il est alors impossible de suivre le fil de l'intrigue sans le livret à la main et les nobles protagonistes semblent transformés en saltimbanques grotesques. D'autre part, les spécialistes ne s'accordent guère sur le "français restitué". On sait que les accents régionaux étaient très marqués, et qu'un duc ne parlait pas comme une charretière. Il n'y a donc pas un mais des français restitués. On utilisera pas la même prononciation pour des chansons à boire ou pour une tragédie lyrique. En outre, comme l'a souligné à juste titre un lecteur, dans nos oeuvres opératiques, ce n'est pas la prononciation courante, mais déclamatoire qu'il faut rechercher. Les dramaturges eux-mêmes ont cherché à unifier cette prononciation, en retenant une vision archaïque en général. En très bref, les tenants du français restitué opèrent les modifications suivantes (pour les plus audibles) :
En réalité, en ce qui concerne le "oi", principal pierre d'achoppement, les grammairiens notent qu'ils se prononçait "oué", "ouin" "in" mais aussi "oi", tout comme aujourd'hui. Antoine Lartigaud dans ses Les Principes infaillibles et les règles assurées de la juste prononciation de nôtre langue (Paris,1670) écrit entièrement en phonétique et montre bien que "francois" se prononçait "français", "conoistre" "connaître". Certes, ce "ai" étant plus proche de "ê" mais il n'en reste pas moins que la généralisation de la prononciation restitué "-oué" est totalement incorrecte. Il en va de même pour les autres "règles". Il suffit d'ailleurs de relire Corneille et Racine pour voir que les propositions ci-dessus entraînent à de nombreuses reprises des alexandrins bien suspects, pour ne pas dire bancals. Ne peut-on pas penser qu'il est alors préférable, dans l'état actuel des connaissances, de tout simplement s'abstenir de toute recréation - car c'est bien d'une réinvention-redécouverte dont il s'agit - mais de respecter à la lettre le livret de l'époque ? "Vous me vouliez voir, douce Céphise ?" ne suffit-il pas à rappeler à l'auditeur que plusieurs siècles se sont écoulés sans pour autant rendre le sens de la phrase trop difficile à comprendre ? Ce n'est certes pas l'avis d'un Défenseur du Français restitué :
Le latin à la française Nous avons là affaire à un autre problème puisque le latin est une langue morte (sauf au Vatican, et encore). Diverses prononciations s'affrontent telles latin à la française, latin jésuite, latin classique. L'habitude est de prononcer le latin à la jésuite (latin d'Eglise) dans les enregistrements d'œuvres religieuses et sacrées. Cela est très compréhensible mais il faut noter que la France ne le prononce pas comme les autres pays d'Europe continentale. A l'âge baroque, le latin à la française, celui de le chapelle de Versailles et des grands centres religieux du royaume est le suivant :
Ces quelques grandes lignes permettent de comprendre qu'il s'agit à peu près de prononcer le latin comme si c'était du français. Hervé Niquet ou William Christie ont repris le latin à la française dans leurs enregistrements de grands motets. On entend donc "Te Dé-ume lodamusse" (Te Deum laudamus) ou encore "Tibi sérubim" (tibi Cherubim). La démarche est cette fois cohérente et louable et représente un nouveau pas vers une pratique de la musique baroque non seulement plus "authentique" mais surtout remise dans son contexte, ici le cadre géographique hexagonal.
V.L.N.
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