Wiener Blut ! (Caldara, La Concordia dei’Pianeti, La Cetra, Andrea Marcon – Archiv)
Capté en live à Dortmund, cette Azione Teatrale en un acte de Pietro Pariati, mise en musique par Antonio Caldara, sanctionne l’entrée du grand Vénitien dans l’immortalité. En effet avec cette recréation et première mondiale au disque, Archiv/Deutsche Grammophon prend un risque splendide et fait par la même occasion un joli pied de nez à l’innommable lieu commun de la crise du disque classique.
Viva el Maestro ! (El Maestro Farinelli, Concerto Köln, Archiv)
La surprise a son lot de mystère. Surtout maintenant où on a l’habitude d’entendre pléthore d’enregistrements à l’ère médiatique. Les stars et les novices s’accrochent à l’aura magnifique d’un nom ou d’un concept qui fait rêver. On peut penser que la musique classique est passée, désormais, dans les mains habiles des experts des relations publiques. Un projet est habillé comme un mannequin et exposé comme une voiture de luxe, quand il est soutenu par les bons accessoires et déféré devant les bons agents de diffusion.
Delicatessen
La réédition de ce CD datant de 1981 est une excellente idée qui va permettre de mieux comprendre la naissance de l’opéra. En effet cet art si subtil et codifié ne s’est pas fait en un jour et nombreux ont été ceux qui ont contribué à sa construction. Agostino Steffani n’est pas seulement le compositeur d’airs d’opéras somptueux remis au gout du jour par Cecilia Bartoli dans un CD au graphisme manquant de gout mais contenant des chefs d’œuvre de délicatesse.
Une mezzo au royaume du baroque français au XVIIIème siècle
Quel plus improbable équipage pour explorer le répertoire français du XVIIIème siècle qu’un chef anglais (certes, assurément le plus français de tous !) et une mezzo suédoise formée à Londres ? Car la tragédie lyrique française exige à peu près la même maîtrise de la diction de la langue que le théâtre de Racine ou de Corneille.
« Que me dit ton silence après cette prière ? / Ta vertu tremble t-elle à se montrer entière » (T. Corneille, Darius, IV,1)
Abbado ne quitte plus le destin tragique de Pergolèse, et ce troisième opus s’avère sans nul doute le plus énergique et le plus convaincant d’une quête commencée avec le fameux Stabat Mater et poursuivie par l’intéressante Missa S. Emidio que nous avons eu le loisir de chroniquer précédemment. Et pourtant, cet opus n’a pas le bénéfice des feux d’un Giuliano Carmignola, d’une Sara Mingardo ou d’une Veronica Cangemi, ni le prestige que confère une œuvre de référence que chacun se doit de connaître et d’apprécier pour briller lors d’un dîner en ville. Alors, pourquoi la Muse étreint-elle tant cet enregistrement ?
Savoir prendre de la Otter
Nous avouons compter parmi les inconditionnels d’Anne Sofie von Otter. Tout était ici réuni pour notre plaisir, la sublime musique du Kantor, la voix de caméléon d’Anne Sofie, la légèreté aérienne et piquante du Concerto Copenhagen… Et malgré l’indéniable qualité du résultat, voilà un enregistrement qu’on ne parvient pas à adopter, qu’on ne s’approprie pas vraiment, et qu’on hésite à qualifier de demi-succès.
Terriblement classique…
Par-delà une jaquette bleue où l’esprit s’imagine la baie de Naples, le premier volet de la trilogie que Claudio Abbado consacre à Pergolesi (dont on célèbrera en 2010 le 300ème anniversaire de la naissance) constitue un mystère. Mystère que cette lecture infiniment classicisante, d’une perfection lisse, d’une tenue élégante et insaisissable et où les solistes sont exemplaires, ce qui est d’autant plus remarquable qu’il s’agit d’un enregistrement de concert. Et pourtant, mystère aussi que le peu d’attrait qu’exerce le Stabat Mater trop équilibré de ce disque .
Mozart brisé, Mozart martyrisé mais Mozart libéré !
Les concertos pour violon de Mozart… Cinq œuvres célébrées jusqu’à la trame, jouées, rejouées, rebattues jusqu’à la banalité et à l’indifférence. Et, en dépit de la jaquette du disque qui prétend que cette nouvelle interprétation sur instruments d’époque apporterait une nouvelle énergie et vitalité aux concertos…
Un profane divin !
Vous en avez rêvé, Simone Kermes l’a fait ! Avec Andrea Marcon, la soprano n’a pas hésité à puiser dans des pièces peu connues du Prêtre Roux (dont 5 premières mondiales). Elle en en extrait une substantifique moelle dont le centième ferait s’évanouir un dilettante tant elle accumule les airs de fureurs débordant de difficultés techniques.
Mélancolie contre fraîcheur
Savall contre Goebel. Un choc frontal entre l’Espagne alanguie et la froidure germanique, sur fond de musique française. Mais français, le sont-ils vraiment ces 4 ordres composés de suites de danses, chacune précédée d’une sonate ?
Un mysticisme brûlant (Monteverdi, Vespro della Beate Vergine, Hanns-Martin Schneidt – Archiv)
Les Vêpres à la Vierge de Monteverdi furent rarement enregistrées avec de seules voix masculines, et les circonstances de leur exécution, sans doute à Saint-Marc de Venise avec ses doubles tribunes, relativement peu documentées. Suivant la règle mulier tacet in ecclesia (les femmes se taisent dans l’église, pardonnez mesdames la traduction un peu rustre), Hanns-Martin Schneidt proposa voici plus de 20 ans cette interprétation d’une ferveur mystique, avec chœur d’enfants, et dont l’impact émotionnel est toujours aussi présent.
That is the question…
Habituellement, pour les ouvrages lyriques de Rameau, la question de la version qu’on choisira ne se pose pas : les rares fois où deux enregistrements existent, l’un des deux semblent inenvisageable car un peu trop désuet – ainsi, des deux Dardanus, celui de Leppard et celui de Minkowski, ne sait-on d’avance lequel aura la préférence ?
Avoir un quatre à sec
Les œuvres sont belles, on y sent l’Italie et sa lumière, ses charmes et ses sourires. Hélas, Reinhardt Goebel arrive avec son habituelle précision, et sa légendaire sécheresse. Les aqueducs se bouchent, les fleurs se fanent, le soleil disparaît.