Rédigé par 16 h 33 min CDs & DVDs, Critiques

Intense

Si les concertos de Vivaldi se suivent et se ressemblent – disent les mauvaises langues – ce n’est pas le cas de ses sonates où il fait montre d’une plus grande originalité. En 1974, Michael Talbot exhume un manuscrit autographe qui dormait à la Central Library de Manchester, sans doute copié de la main du père même de Vivaldi pour être offert au Cardinal Ottoboni, malgré l’absence de dédicace.

Antonio VIVALDI (1678-1741)

« Sonates de Manchester »

Romanesca : Andrew Manze (violon), Nigel North (archiluth, théorbe et guitare), John Toll (clavecin)

Harmonia Mundi, 1993, re-ed. 2003. [clear]

Si les concertos de Vivaldi se suivent et se ressemblent – disent les mauvaises langues – ce n’est pas le cas de ses sonates où il fait montre d’une plus grande originalité. En 1974, Michael Talbot exhume un manuscrit autographe qui dormait à la Central Library de Manchester, sans doute copié de la main du père même de Vivaldi pour être offert au Cardinal Ottoboni, malgré l’absence de dédicace. Contrairement à la lecture plus rieuse et poétique de Fabio Biondi (Arcana), Andrew Manze et son petit groupe ont délibérément choisi la rupture. Le violon grinçant et survitaminé de Manze excelle à redécouper la ligne mélodique, à imposer des respirations, des phrasés étourdissants, des silences là où on les attend le moins. La musique se fait discours, souvent violent. Même les figures dansées prennent un relief étrange sous cet archet ravageur et troublant. Le continuo, inventif et aussi débridé, participe tout autant à cette aventure auditive qui reçut le Prix international du disque Vivaldi en 1993.

Toutefois, à trop privilégier le cri sur le murmure, Manze se trouve très mal à l’aise dans les passages lents et suggestifs dont il se débarrasse avec froideur pour attaquer les prochains allegros à une vitesse échevelée. L’on a l’impression que la formidable technique d’Andrew Manze s’ennuie dans la douceur, demande des arpèges, des doubles cordes, des variations virtuoses à affronter. En un mot, Romanesca manque désespérément de romanesque et confond le charme sulfureux de Venise avec l’auto-flagellation des Sonates du Rosaire d’Heinrich Franz Ignaz von Biber, l’un de leurs meilleurs enregistrements à ce jour.

Sébastien Holzbauer

Technique : Prise très proche, un peu sèche toutefois

Étiquettes : , , , , Dernière modification: 23 novembre 2020
Fermer