Rédigé par 13 h 29 min Musicologie, Regards

Dédicace de Lully au Roi

Armide fut la dernière tragédie lyrique de Lully, et sa dernière collaboration avec son complice de longue date, la poète Philippe Quinault. Sublime chant du cygne auquel le Roi ne daigna pas assister, las des scandales de la vie tumultueuse du Florentin et de ses mœurs dites italiennes.

Dédicace de Lully au Roi
(Armide, 1686)

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François Boucher : Renaud & Armide. Musée du Louvre, Paris. D.R.

François Boucher : Renaud & Armide. Musée du Louvre, Paris. D.R.

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Armide fut la dernière tragédie lyrique de Lully, et sa dernière collaboration avec son complice de longue date, la poète Philippe Quinault. Sublime chant du cygne auquel le Roi ne daigna pas assister, las des scandales de la vie tumultueuse du Florentin et de ses mœurs dites italiennes. La dédicace au Roi de l’édition Ballard parue la même année laisse entrevoir son amertume et sa déception.

AU ROY 
SIRE,

De toutes les Tragédies que j’ay mises en musique voicy celle dont le Public a tesmoigné être le plus satisfait : C’est un spectacle où l’on court en foule, & jusqu’icy on n’en a point veu qui ait reçeu plus d’applaudissements ; cependant, c’est de tous les Ouvrages que j’ay faits celui que j’estime le moins heureux, puisqu’il n’a pas encore eû l’avantage de paroistre devant VOSTRE MAJESTE’. Vos ordres, SIRE, m’ont engagé d’y travailler avec soin & avec empressement : Vn mal dangereux dont j’ai esté surpris n’a pas esté capable d’interrompre mon travail, & le désir ardent que j’avois de l’achever dans le temps que VOSTRE MAJESTE’ le souhaittoit, m’a fait oublier le péril où j’estois exposé, et m’a touché plus vivement que les plus violentes douleurs que j’ay souffertes. Mais que me sert-il, Sire, d’avoir fait tant d’efforts pour me haster de Vous offrir ces nouveaux Concerts ? VOSTRE MAJESTE’ ne s’est pas trouvée en estat de les entendre, & Elle n’en a voulu prendre d’autre plaisir que celui de les faire servir au divertissement de ses Peuples. J’avoüeray que les louanges de tout Paris ne me suffisent pas ; ce n’est qu’à Vous, SIRE, que je veux consacrer toutes les productions de mon génie ; je ne puis aspirer à un moindre prix qu’à la gloire de Vous plaire, & sans l’approbation de Votre Majesté, je compte pour rien celle de tout le reste du Monde. Permettez, SIRE, que dans l’impatience où je suis de vous offrir cet Opéra, je vous le présente sur le papier en attendant qu’il me soit permis de vous le faire voir sur le Théatre, & souffrez que je me serve de cette occasion pour renouveler la protestation d’estre toute ma vie avec un zele très ardent & un très profond respect,

SIRE,

DE VOSTRE MAJESTE’

Le très-humble, très-obeïssant &
très-fidelle serviteur et sujet,
LVLLY.

 

Retranscription de l’original de l’édition Ballard 1686, graphie préservée.

Étiquettes : Dernière modification: 22 mai 2020
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