Transfigurations
Johann Christoph Pez (1664-1716)
Passacaglia (From Concerto pastorale in F Major for 2 flutes, ca.1700)
Johann Sebastian Bach (1685-1750)
Contrapunctus XIV, Fuga a 3 soggeti (From The Art of Fugue, BWV 1080, ca.1750)
Canons
Canons on the first eight fundamental notes of the Aria from the Goldberg Variations, BWV 1087, ca.1746 Transcription and edition by Javier Lupiáñez
I-Canon simplex, II-All’ roverscio, III-Motu recto e contrario, IV-Motu contrario e recto, V-Canon duplex à 4, VI-Canon simplex à 3, VII-Idem à 3, VIII-Canon simplex, il soggetto in alto, IX-Canon in unisono post semifusam à 3, X-Alio modo, per syncopationes et per ligaturas à 2, XI-Canon duplex à 5, XII-Canon duplex à 5, XIII-Canon triplex à 6, XIV-Canon à 4 per augmentationem et diminutionem
Traditional
The Broom of Cowdenknowes
Bonny Christy from The British musical miscellany or The delightful grove,1734
Francesco Geminiani (1687-1762)
Sonata I The Broom of Cowdenknowes – Bonny Christy
Traditional
Bush aboon Traquair
Francesco Geminiani
Sonata II Bush aboon Traquair
Traditional
The last time I came o’er the Moor
Antoine Pontiel (ed.)
St Martin’s Lane
Francesco Geminiani
Sonata III The last time I came o’er the Moor
Michel Corrette (1707-1795)
Concerto comique XXV (ca.1773)
Biagio Marini (1597-1665)
Passacaglio à 4
Tarquinio Merula (1595-1665)
Ciacona
Giuseppino del Biabo (?-1616)
Fuggi, fuggi
Biagio Marini
Sonata sopra Fuggi dolente core
Traditional
John come kiss me now
Les Esprits Animaux
(Tomoe Badiarova, violin I – Javier Lupiáñez, violin II – David Alonso Molina, viola – Lena Franchini, flutes – Élodie Virot, traverso – Patrícia Vintém, harpsichord & organ – Roberto Alonso, cello)
71’55, Ambronay éditions, 2013
Il y avait eu un Telemann de bon aloi (Ambronay éditions). Convaincant mais un peu sec. Et voici les Esprits Animaux qui nous reviennent pour des transfigurations. Pour commencer, il faut bien avouer que le titre de ce programme qui ouvre la voie à un pot pourri allant « de la passacaille à la fugue, de la sonate aux chansons à boire, de la partition à l’improvisation » semble un prétexte à une plongée personnelle dans l’univers baroque, variant les genres et les continents, mêlant compositeurs célèbres (Bach, Geminiani, Corette), moins connus (Marini, Merula) et carrément inconnus (Pez, Pontiel, del Biabo) sans même parler des « anonymes » ou « traditionnel ». C’est donc moins – en apparence – à la découverte d’un répertoire ou d’une époque qu’à un parcours singulier, juxtaposant des styles et affects très différents, que Les Esprits Animaux nous convient. Le résultat assurément intéressant, à l’image de l’entrée en matière du CD : on passe ainsi d’une Passacaille de Johann Christoph Pez enlevée mais convenue à une très belle interprétation du Contrapunctus XIV de l’Art de la Fugue pour consort de cordes, douloureux et grainé, d’une intériorité puissante. Clair-obscur où l’ombre triomphe sans peine d’une lumière fastueuse et superficielle. De même l’exercice – risqué – des canons pour corde et clavecin sur les 8 premières notes des Goldberg se révèle extrêmement brillant et convaincant. Il prouve également la maestria de Javier Lupianez et une aisance non dénuée d’humour taquine dans les enchaînements qui peut se laisser aller dans les danses populaires (excellentes whistles dans Bonny Christy avant de bénéficier de la version en musique savante de Geminiani).
Parvenu à ce stade, l’on finit par découvrir que que la construction du disque est tout à fait logique, avec sa mise en miroir autant que possible de procédés d’écriture (basse obstinée, fugues, canons) ou de transposition (du registre populaire au registre savant) et ce fil conducteur qui sous-tend l’enregistrement lui donne tout son sens, expliquant aussi certains passages à vide (St Martin’s Lane d’un assoupissement bourgeois) alors même que Les Esprits Animaux font preuve ailleurs d’une vivacité frémissante (Les Sauvages revus par Corrette d’une boulimie irrésistible), d’une noirceur ample (Passacaglio à 4 de Marini où les cordes presque hésitantes, aux subtiles inflexions, pressent les chromatismes jusqu’aux larmes), d’une virtuosité racée (Ciacona de Merula sur tétracorde bien obstiné). Ajoutons que les musiciens dénotent une complicité et une maîtrise technique indiscutables, si bien qu’en dépit des effectifs chambristes, l’on est souvent impressionné par la grandeur « visuelle » de l’image sonore, très saturée.
Transfigurations, c’est l’histoire d’un caméléon, difficile à cerner, à la beauté changeante et l’on ne saurait tirer la langue à une telle bestiole.
Armance d’Esparre
Technique : enregistrement coloré mais froid, beau timbre des cordes.