Rédigé par 16 h 25 min Concerts, Critiques

En tête de gondole

Pour ce concert de clôture de la 28ème édition du Festival, nous nous retrouvons à l’Eglise Notre-Dame dont la façade en arc de triomphe rénovée au XVIIIème abrite un vaisseau à la remarquable acoustique. Le programme de ce voyage en Italie nous était connu, puisqu’il correspond exactement à celui du disque publié récemment chez Alpha et dont nous avions fait paraître la critique.

Vivaldi, L’Estro Armonico & autres concertos

Café Zimmermann, Pablo Valetti & Céline Frisch

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Céline Frisch & Pablo Valetti © Café Zimmermann

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A. Vivaldi
L’Estro Armonico & autres concertos

Café Zimmermann
Céline Frisch, clavecin
Pablo Valetti, Mauro Lopes Ferreira,
David Plantier, Nicholas Robinson, solistes violon
Petr Skalka, soliste violoncelle

Eglise Notre Dame, Pontoise, 19 octobre 2013, concert de clôture du festival baroque de Pontoise

Pour ce concert de clôture de la 28ème édition du Festival, nous nous retrouvons à l’Eglise Notre-Dame dont la façade en arc de triomphe rénovée au XVIIIème abrite un vaisseau à la remarquable acoustique. Le programme de ce voyage en Italie nous était connu, puisqu’il correspond exactement à celui du disque publié récemment chez Alpha et dont nous avions fait paraître la critique. Nous y avions admiré les couleurs et la densité de l’ensemble, l’intelligibilité du discours, ainsi que son relatif classicisme, sa retenue par rapport aux interprétations échevelées venues de la Péninsule.

Et pourtant, elle tourne ! Tourne et retourne, monte et descend, virevolte, changeante et énergique. Non la Terre, mais la musique, à l’italianité effervescente, qui, dès le Concerto n°3  de l’Estro Armonico adopte un chemin de traverse nettement plus vif et puissamment charpenté qu’au disque. Changement d’optique pour cette soirée ? Humeur d’un Pablo Valetti solaire et virtuose ? Qu’importe, on se contentera de relever que l’église est propice aux basses, faisant ressortir l’ossature ductile de la contrebasse de Ludek Brany, et le violoncelle grainé et félin de Petr Skalka, qui exulte d’ailleurs dans le Concerto pour violoncelle RV 414 faisant montre d’un archet vigoureux et assertif, jouant avec les harmoniques, variant à l’envi les articulations. Le Concerto pour violon et violoncelle RV 544, à l’écriture très intéressante, offre également un duo ou duel de choc entre le violon incisif et altier de Pablo Valetti, et le violoncelle plus taquin de son confrère. On se laisse bercer par la douceur complice du mouvement central, par ses reflets moirés, entre 2 poussées d’adrénaline.[clear]

© J. Bigorne, 2013

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Car le Café Zimmermann excelle dans toutes ces œuvres à établir une opposition frontale entre les soli et les tutti, à permettre à l’orchestre, cohérent et décidé, aux départs superbement rigoureux et à la justesse d’autant plus admirable que le froid de l’église désaccordait les instruments de prendre soudain la relève, ensevelissant les échappées solistes de son étreinte colorée. La basse continue, très présente, indispensable ossature, d’une éloquence souple souffre cependant du beau clavecin de Céline Frisch trop en retrait, sans doute en raison de l’acoustique du lieu. Dans le fameux concerto pour quatre violons RV 580 (celui-là même que Bach transcrivit pour clavecin), comme dans le RV 567, le Café Zimmermann parvient à un subtil équilibre entre chacun des solistes, dont les timbres se fondent avec ambigüité (ce qui rend le disque plus confus pour l’auditeur qui ne connaît pas la partition et essaie de deviner qui est qui), individualité et spontanéité.

Le mot est lâché : spontanéité. Et c’est sans doute cette fraîcheur souriante, cette excitation perlée, ce discours pêchu, ce goût du risque alliant la jouissance des allegros à la mélancolie vague des largos qui remporte l’adhésion, sans réserve aucune. L’allegro final du Concerto n°12 dénote une fluidité déconcertante, presque familière avec le Prêtre Roux, tandis que l’amertume lancinante du Largo du RV 522 hante encore l’atmosphère en dépit des joyeusetés finales. Et quand retentit l’aria de la 3ème Suite pour Orchestre de Bach, ligne fuselée d’une italianité fantasmée en Allemagne, le parfum de la Lagune peine à se dissiper dans les ombres errantes de la nuit.

A noter ce n’est pas tout à fait fini pour cette édition 2013 : un concert caritatif aura lieu le 7 décembre à l’Eglise Notre Dame sur le Thème « Romances, cantates et motets, une passion française » avec Jean-François Lombard, Stéphanie Paulet, Mathurin Matharel, et Bertrand Cuiller.

Viet-Linh Nguyen

Le site officiel du Festival (réservations, informations, programme) 

Étiquettes : , , , , , , Dernière modification: 8 juin 2021
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