« C’est Bach que je préfère entre tous, car c’est une musique qui vous construit. Il y a une telle harmonie chez lui qu’on a l’impression que le paradis existe. » (Brigitte Bardot sur Radio Classique, 2014)

Brigitte Bardot dans La Vérité de Henri-Georges Clouzot (1960 – capture d’écran
On la connaissait sur la plage abandonnée ou dans les scansions provocantes de Gainsbourg. On la connaissait bouleversante dans La Vérité de Clouzot (1960), bousculant les conventions et les apparences, faisant sauter par sa candeur incandescente les verrous du musicien de bonne famille, mais aussi découvrant lors d’un choc esthétique les beautés de la musique classique. “A quoi ça te servira de savoir ce qui est vrai?”, demandait Camille dans Le Mépris. Pourtant, derrière le mythe B.B. se cache une âme fascinée par la rigueur du contrepoint et le lyrisme d’un air cantabile italianisant. A l’heure où une icône nous quitte, tissons quelques ponts en hommage à LA femme, au fil d’une brève enquête sur les liens insoupçonnés entre Brigitte Bardot, la danse et la musique de Bach.
Si le grand public voit en Brigitte Bardot l’incarnation d’une liberté sauvage, il faut se rappeler son éducation bourgeoise de fer et les aspirations artistiques de sa mère Anne-Marie Mucel (1912-1978). Celle-ci passa une partie de sa jeunesse à Milan et souhaitait devenir danseuse et actrice. Ses parents disposaient d’une loge à La Scala. Avant d’être B.B., Bardot a commencé la danse chez Marcelle Bourgat de l’Opéra de Paris, puis fut reçue au Conservatoire de Paris, dans la classe de Jeanne Schwarz. Elle quitta le Conservatoire en 1950. Dans ses mémoires, Initiales B.B. (Grasset, 1996), l’actrice se rappelle la souffrance physique imposée par la barre, transcendée par la beauté des partitions qui l’accompagnaient.
Bien plus tard, lors d’un entretien accordé à Olivier Bellamy sur Radio Classique en septembre 2014, Brigitte Bardot a avoué sa passion pour la musique classique, fuyant la laideur du monde moderne pour se réfugier dans l’harmonie de Bach et Mozart. Au sujet de ce dernier, elle cite notamment le mouvement lent du Concerto pour clarinette et l’Andante du Concerto pour piano n° 21. Mais elle confesse surtout toute son admiration pour Bach (“C’est Bach que je préfère entre tous, car c’est une musique qui vous construit.” ), évoquant avec émotion le Largo du Concerto pour deux violons en ré mineur (BWV 1043) qu’elle compare – avec à propos – à la respiration d’une femme endormie. Dans Larmes de combat (Plon, 2018), elle réaffirme cette quête d’absolu et d’harmonie. Pour Bardot, la musique classique constitue un rempart contre l’agression du siècle. Comme elle le confiait à TV Magazine pour ses 80 ans : “Le classique, c’est l’ordre après le chaos.”
Un paradoxe pour cette égérie sensuelle, si flamboyante qu’elle fut longtemps accusée de semer le désordre dans les mœurs, et à laquelle on souhaite désormais l’apaisement d’un doux sommeil, bercé par l’espérance d’une cantilène.
V-L.N.
Étiquettes : Bardot Brigitte, cinéma, Jean-Sébastien Bach, Mozart, nécrologie Dernière modification: 29 décembre 2025
