Georg-Frederic HAENDEL (1785-1759)
« Chemins d’exil »
Deutsche Arien et Sonates en trio
[TG name= »Liste des airs »]
“Künft’ger Zeiten eitler Kummer” HWV 202
“Das Zitternde Glänzen” HWV 203
“Süsser Blumen Ambraflocken” HWV 204
“Süsse Stille, sanfte Quelle” HWV 205
“Singe Seele” HWV 206
“Meine Seele hört im sehen” HWV 207
“Die Ihr aus dunkeln Grüften” HWV 208
“In der angenehmen Büschen” HWV 209
“Flammende Rose” HWV 210
Sonates en trio Op. 2 : n°1, n°2
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Capucine Meens (soprano),
Ensemble Hemiolia :
Emmanuel Resche, Alfia Bakieva (violons), Elodie Seyranian (clavecin), Claire Lamquet (violoncelle)
Direction Claire Lamquet
120’1, Label Eyridice, 2013.
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L’on connaît Haendel pour ses oratorios (Le Messie), comme grand dramaturge des harmonies, déployant dans ses opéras de luxuriantes couleurs d’affects et de sentiments. Haendel dépeint par sa musique les fastes de la cour, la grandiloquence italienne comme la rosée fraîchement éclose, et magnifie la tragédie. C’est l’orchestre fourni et généreux, débordant de sensualité et d’énergie. C’est aussi le musicien emporté et exigeant à l’extrême, l’homme gourmand au caractère entier, avide de vie. Avec ce troisième disque, l’Ensemble Hemiolia délaisse pour un temps l’exhumation de compositeurs oubliés pour entreprendre celle d’œuvres insoupçonnées. Nous entrons dans une part plus intime de la production musicale de Haendel, celle de ses compositions de jeunesse, qui ne sont pas sans lien avec les monuments qui suivront. Haendel composa les deux Sonates en trio présentes ici durant son immersion en Italie (c.1706-1710), ou peu après. Elles s’inscrivent dans la veine stylistique d’Arcangelo Corelli (1653-1713), en particulier la première qui révèle en même temps la sensualité toute de rondeurs qui deviendra la marque du compositeur.
Les musiciens ont fait le choix de l’élégance et de la sobriété. Claire Lamquet dessine avec la grâce particulière qu’on commence à lui connaître la ligne de basse, à travers la réalisation légère d’Elodie Seyranian. Belle conduite mélodique et chantante qui invite les dessus à épancher l’expressivité de leurs voix dans les mouvements lents, et dynamise les allegros.
Emmanuel Resche et Alfia Bakieva semblent cependant sur leur réserve, parfois même un peu sages. Ces Sonates, fortement suggestives par leurs tournures mélodiques, appellent à plus d’audace dans les choix ornementaux, plus d’amusement dans le cisèlement des rythmes dansants, à un plus grand abandon expressif dans les affects. L’on est touché par la beauté du son, le balancement du phrasé, la subtilité des nuances. Mais il manque un souffle plus profond, le geste qui nous saisit l’âme, qui fait couler les larmes et connaître la jubilation. N’oublions pas que les Italiens n’avaient que faire de la bienséance et de la juste mesure qui régissaient « le bon goût » à la française, et n’hésitaient pas à en faire trop de leur point de vue pour être certains de faire juste ce qu’il faut pour leur public.
Les Arien attestent de la même prudence. Est-ce un parti-pris musical ? Laissons place au doute. Capucine Meens prête sa voix fraîche et gracile à ces airs glorifiant la bonté du Dieu créateur par des accents printaniers. Tout n’est que joliesse (Meine Seele hört im Sehen) et douceur (Süsse Stille), tendre caresse. Le timbre de la jeune chanteuse sied plutôt bien au caractère des Cantates, mais l’on perçoit parfois une certaine fragilité d’intonation, et le texte manque trop souvent de clarté. Les élans manquent d’ampleur (« Singe Seele, Gott zum Preise », Chante mon âme, à la gloire de Dieu) et de largesse. Les intentions expressives sont bien présentes, mais attendent d’être mener à leur paroxysme.
L’Ensemble Hemiolia affirme par ce nouvel enregistrement sa volonté de parler en confidence, en centrant son travail sur des œuvres intimes qui s’adressent au cœur. Et de fait il interpelle, capte l’attention mais ne parvient pas toujours à la maintenir sienne, en dépit d’une sensibilité touchante.
Isaure d’Audeville
Technique : captation fidèle.